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Pour les quarante ans de la Révolution islamique en Iran, fleurissent un peu partout en Occident des analyses qui s’évertuent à replacer cet événement dans un cadre historique, social et politique bien défini. Si les conséquences de cette révolution en Iran et au Moyen-Orient sont relativement bien connues, la complexité de sa genèse et la rapidité de l’établissement d’une théocratie islamique dans le pays médusent encore aujourd’hui nombre de politologues et d’historiens.
Le 1er février 1979, l’Ayatollah Khomeiny regagne Téhéran sous les acclamations de quatre millions d’Iraniens après un exil de plus de 16 ans. Il proclame dix jours plus tard la République islamique d’Iran. En voulant faire de lui un ennemi national et une figure du conservatisme, Mohammad Reza Shah l’a propulsé au rang de leader de l’opposition, en symbole de la résistance face aux violences politiques du régime et à l’influence américaine.
Lorsque l’on aborde le sujet de l’opposition au régime du Shah antérieure et contemporaine à la révolution de 1979, on touche le cœur du paradoxe iranien. Comment une révolution causée par des mouvements de résistance libéraux, communistes et cléricaux a-t-elle pu conduire à un modèle politique si éloigné des idéaux des deux premiers ?
La force mobilisatrice de la religion en période de crise, le maillage territorial du clergé chiite en Iran et l’habilité politique d’un dignitaire religieux bénéficiant d’un puissant soutien des nations occidentales jusqu’à sa prise effective de pouvoir semblent être des clés d’explication. Cependant, prétendre pouvoir retracer linéairement les étapes politiques et sociales de la Révolution de 1979 reviendrait à nier son extrême complexité qui implique une grille de lecture plurielle.
Les photographies de cet événement historique présentent un avantage certain puisqu’elles appartiennent au champ des représentations. Michel Setboun, photographe incontournable de la Révolution de 1979, nous dévoile à cet égard une porte d’entrée singulière pour mieux appréhender l’âme de cet événement historique. Selon le géographe Bernard Hourcade, spécialiste de l’Iran, l’étude des photos de Michel Setboun permet de saisir « l’essence même de la Révolution iranienne ».
Michel Setboun nait à Bône en Algérie en 1952. Etudiant en architecture à Paris, il préfère passer ses vacances universitaires à aller sur le terrain pour immortaliser avec son appareil photo les guerres civiles qui ébranlent alors le monde. Il a une conviction forte qui le guide dans son action : « les images peuvent changer le cours de l’histoire, offrir un regard héroïque et humaniste aux événements ». Après s’être rendu au Liban en 1975 et en Angola en 1976, il décide d’aller en Iran en 1978, pressentant une montée des périls après les premiers troubles annonciateurs d’un changement de paradigme politique proche. Entré au service du Shah, Michel Setboun sera aux premières loges et l’un des photographes les plus prolifiques de la Révolution de 1979, dont les photos circuleront de New York aux quartiers Sud de Téhéran.
A l’occasion des quarante ans de la Révolution, il publie un ouvrage, Iran Révolution, qu’il définit comme un « témoignage visuel », un regard porté sur l’histoire sans aucun jugement. Dans cette perspective, Michel Setboun décide de « s’émanciper des règles induites par la photographie et de cesser de prétendre au réel ». Il a ainsi retravaillé ses clichés, où les mondes de l’image et de la photographie se mêlent, offrant au lecteur un point de vue unique sur la Révolution de 1979. Cette narration en image, sans prétendre pour autant capter le réel, est une représentation unique et riche qui permet d’enrichir son regard, confirmé ou novice, sur la naissance de la théocratie iranienne et sur le rôle de leader qu’y a joué l’Ayatollah Khomeiny.
La dizaine d’images issues de son livre Iran Révolution, sont ici présentées sans chronologique particulière (contrairement à l’ouvrage qui suit le cours de la narration), l’objectif étant de se perdre dans les représentations de ce projet artistique sur la Révolution de 1979.
Sous le fameux pommier de Neauphles le château en banlieue parisienne, Rouhollah Khomeiny reçoit émissaires religieux et laïcs, préparant le terrain pour son retour prochain en Iran.
Mohammad Reza Shah est en visite officielle à Mashad dans l’Est de l’Iran, ville sainte du chiisme abritant le mausolée de l’imam Reza, pour tenter de faire taire ses détracteurs qui l’accusent de se détourner de la religion.
Manifestation à Téhéran le 10 décembre 1978, l’armée appelée par le Shah ne peut contenir la foule qui prend possession de la capitale.
Le 11 février 1979, un homme pose devant la caserne Eshrat Abad, tombée aux mains des insurgés.
La Révolution islamique de l’Ayatollah Khomeiny effrayant aussi bien les voisins de l’Iran que les Occidentaux, les Iraniens s’arment. L’histoire leur donnera raison puisque le 20 août 1980, les troupes de Saddam Hussein entrent en Iran soutenues par une large coalition.
Peshmerga (combattant) du Kurdistan iranien en Mars 1979.
Le 11 janvier 1979, la réouverture de l’Université de Téhéran rassemble une foule de plus de 100 000 personnes. Cette institution jouera un rôle crucial pendant le reste de la Révolution de 1979, notamment à l’occasion de la prise d’otage à l’ambassade américaine.
Le 5 février 1978, l’Ayatollah Khomeiny en conférence de presse demande à Medhi Bazargan, démocrate et ancien ministre de Mossadegh, de former un gouvernement (très) provisoire.
Libération des prisonniers politiques le 26 octobre 1978 à la prison de Ghasr, Teheran, lieu d’exercice iconique des méthodes de la milice politique du Shah, la Savak.
Jeune fille arborant un tchador, lors du referendum pour la constitution islamique le 30 mars à Qom. Suite au retour de l’Ayatollah Khomeiny, Qom devient pour quelques temps la capitale politique de l’Iran.
Gabriel Malek
Gabriel Malek est étudiant en master d’histoire transnationale entre l’ENS et l’ENC, et au sein du master d’Affaires Publiques de Sciences Po. Son mémoire d’histoire porte sur : « Comment se construit l’image de despote oriental de Nader Shah au sein des représentations européennes du XVIIIème siècle ? ».
Il est également iranisant.
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