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Le Conseil de coopération des Etats du Golfe ou Conseil de Coopération du Golfe est une organisation aux buts essentiellement économiques et sociaux qui a été créée le 26 mai 1981. Elle rassemble l’Arabie saoudite, le Koweït, Bahreïn, le Qatar, les Emirats arabes unis et le sultanat d’Oman.
Alors que beaucoup d’acteurs doutaient de se viabilité, le Conseil de Coopération des Etats du Golfe n’a cessé d’exister depuis sa création, il y a près de trente ans.
Lors de sa création en 1981, le Conseil de Coopération regroupe six Etats du Golfe qui ont un certain nombre de points communs : ils sont tous des Etats non démocratiques et producteurs de pétrole. L’idée d’une coopération vient d’abord du Shah d’Iran dans le but de s’opposer à la montée des régimes d’aspiration socialiste et anti-occidentale (baasiste en Irak, nassériste en Egypte). En effet, des cellules révolutionnaires liées à Bagdad prolifèrent dans la région, en particulier à Oman et au Bahreïn.
Deux événements vont changer la donne et pousser à la création d’un organisme de coopération des Etats du Golfe. Tout d’abord, le choc pétrolier des années 1970 fait apparaître les Etats du Golfe comme un acteur essentiel à l’échelle mondiale et régionale. D’ennemis, les Etats du Golfe deviennent des « Etats frères » pour les autres pays arabes, capables de faire pression sur le monde occidental en distribuant leurs « pétrodollars ».
Mais c’est véritablement lorsqu’éclate la guerre Iran-Irak que l’idée d’une coopération entre les Etats du Golfe prend forme. Le nouveau régime au pouvoir en Iran, issu de la révolution de 1979, menace de renverser les monarchies conservatrices du Golfe. D’autre part, dans le contexte de la Guerre froide, les Etats du Golfe craignent de voir la péninsule devenir une zone d’affrontement entre les deux grands, surtout après l’invasion soviétique en Afghanistan en hiver 1979-1980. Outre l’Iran et l’Irak, le Yémen représente aussi une forme de menace puisqu’il est républicain et surpeuplé.
Le Conseil de Coopération est donc fondé le 26 mai 1981 à Abou Dhabi par les ministres des Affaires étrangères des six pays concernés. Il n’affirme avoir que des buts de coopération économique, sociale et culturelle. Les aspects proprement sécuritaires ne sont pas évoqués, afin de ne pas présenter le Conseil de Coopération du Golfe comme une menace pour les deux puissances de la région, l’Irak et l’Iran.
Le Conseil de Coopération des Etats du Golfe repose sur trois instances. Les chefs d’Etats se réunissent lors du Conseil suprême, deux fois par an, pour déterminer la politique générale. Les ministres des Affaires étrangères se rencontrent tous les deux mois lors du Conseil des ministres pour lancer les projets communs et préparer le Conseil suprême. Enfin, le Secrétariat Général, qui est le seul organe permanent, est chargé de la mise en place et du suivi des projets. Il est basé à Riyad, en Arabie saoudite.
Malgré de nombreux désaccords, le Conseil de Coopération a élaboré des projets communs ambitieux dans le domaine économique.
Tous les pays membres font partie de l’OPEP (Organisation des Pays Exportateurs de Pétrole) : la coordination des politiques concernant la production et l’exportation de pétrole est essentielle au sein du Conseil de Coopération des Etats du Golfe.
D’autre part, l’idée d’un marché commun est envisagée dès 1983 avec l’instauration de tarifs extérieurs communs. Cependant, il faudra attendre le début de l’année 2007 pour qu’une union douanière voie le jour, pourtant décidée dès 1999. L’ouverture d’un marché commun du Golfe a lieu en janvier 2008 et vise à mettre en place une égalité économique dans des domaines aussi larges que la circulation des biens, des capitaux et des personnes, l’emploi, l’éducation, les services sociaux, la santé, la fiscalité, etc. Néanmoins, les objectifs ambitieux fixés par les accords n’entraînent que peu de réalisations concrètes sur le terrain du fait de l’absence de moyens de l’organisation (très peu de fonctionnaires pour assurer la mise en place des décisions). De nombreux projets, comme une union monétaire (envisagée dès le début des années 1990, mais Oman, les Emirats arabes unis et l’Arabie saoudite se sont déjà retirés du projet) ou encore un accord de libre échange avec l’Union Européenne, piétinent. L’absence de régulation dans de nombreux domaines empêche pour l’instant le Conseil de Coopération du Golfe d’entrer à l’Organisation Mondiale du Commerce, comme il le souhaite.
Si le Conseil de Coopération du Golfe n’affirme être qu’une organisation aux buts économiques et sociaux, il entend jouer un rôle sur la scène régionale dès sa création en 1981 : d’ailleurs, lors de la première année d’existence du Conseil de Coopération du Golfe, les ministres des Affaires étrangères vont se rencontrer cinq fois. L’organisation va tenter de se faire entendre dans le conflit Iran-Irak (1980-1988). A partir de mai 1982, face à la possibilité d’une victoire iranienne, les ministres des Affaires étrangères du Conseil de Coopération du Golfe se réunissent pour élaborer un accord de paix qui ne voit jamais le jour, mais des compensations auraient été proposées. Cependant, l’organisation prendra indirectement partie pour le camp irakien : l’Arabie saoudite soutient ainsi l’incorporation de 7000 soldats égyptiens dans l’armée irakienne. En 1984, le Conseil de Coopération élabore un accord de paix prônant la conciliation, mais les Nations unies choisissent de condamner sévèrement l’Iran à travers la résolution 552. A la fin des années 1980, devant la menace irakienne sur le Koweït mais aussi sur les Emirats arabes unis, la position des pays membres du Conseil devient défavorable à l’Irak et ils accueillent des troupes occidentales sur leur. Condamnant l’invasion du Koweït en 1990, le Conseil de Coopération des Etats du Golfe ne constitue cependant aucune alliance militaire face à l’invasion d’un de ses Etats membres, laissant les occidentaux agir. Ensuite, tous les Etats membres du Conseil vont prendre part à l’Opération Tempête du Désert et être consultés pour libérer le Koweït, mais le Conseil de Coopération en tant que tel ne fournit aucun cadre d’action. Il faudra attendre décembre 2000 pour voir signé un accord de défense mutuelle en cas d’agression et une augmentation des forces du « Bouclier de la Péninsule » de 5000 à 20 000 hommes.
D’autre part, le Conseil de Coopération du Golfe essaie de jouer un rôle dans la résolution du conflit israélo-palestinien. Dès septembre 1981, à l’initiative de l’Arabie saoudite, le Conseil de Coopération des Etats du Golfe élabore un accord de paix baptisé « plan Fahd ». Néanmoins, la médiation du Conseil de Coopération du Golfe échoue dans la mesure où Israël refuse toute négociation.
Si le CCG ne parvient pas à se positionner en tant que tel comme un acteur régional crédible face aux conflits de la région, c’est aussi d’abord parce que tous les Etats n’entretiennent pas les mêmes relations avec les deux grands de la région (Iran et Irak). Ainsi, un litige territorial à propos d’îles dans le Golfe persique oppose au début des années 1980 les Emirats arabes unis et l’Iran, tandis que l’Arabie saoudite et Oman envisagent d’abord un rapprochement avec l’Iran. D’autre part, un certain nombre de querelles éclatent entre les Etats membres du Conseil de Coopération eux-mêmes. L’Arabie saoudite, via le Conseil de Coopération, tente ainsi de jouer les médiateurs dans la discorde entre le Qatar et Bahreïn à propos des îles Hawar à partir de 1986. Devant l’incapacité du Conseil de Coopération à régler les conflits internes, le problème est transmis directement à la Cour Internationale de Justice. Il faudra attendre l’an 2000 pour assister au rétablissement des relations diplomatiques entre les deux Etats. Les divisions entre les Etats membres affectent le fonctionnement du Conseil de Coopération : le Qatar, les Emirats arabes unis, Bahreïn et l’Arabie saoudite ont ainsi boycotté l’un des sommets ou menacé de le faire.
Certains auteurs, en particulier Olivier Da Lage, voient en l’établissement du Conseil de Coopération du Golfe « l’instrument privilégié de l’influence saoudienne sur les autres monarchies du Golfe ». En effet, les motifs de discorde entre Riyad (où est d’ailleurs basé le Secrétariat Général du CCG) et ses voisins sont nombreux. En ce sens, le Conseil de Coopération du Golfe aurait été créé afin de permettre à l’Arabie saoudite de contrôler ses voisins et de régler les différends à son avantage, dans la droite ligne des plans d’expansion du royaume et de « saoudisation » de la péninsule arabique dès les années 1920. Outre les nombreux litiges territoriaux qui opposent l’Arabie saoudite à nombre de ses voisins, le régime saoudien voit d’un mauvais œil les transformations sociales et politiques qui ont lieu à ses frontières : instauration de systèmes parlementaires au Koweït, au Qatar et au Bahreïn et réformes parlementaires à Oman. Ces Etats se libéralisent peu à peu, comme en témoigne le lancement de la chaîne qatari Al-Jazeera en 1999 et entament un rapprochement avec les Etats-Unis (qui déplacent leur base militaire d’Arabie saoudite au Qatar en avril 2003). En ce sens, les différents échecs du Conseil de Coopération du Golfe peuvent être interprétés comme autant de témoignages de la perte de puissance de l’Arabie saoudite sur ses voisins.
Bibliographie :
Olivier DA LAGE : « L’Arabie et ses voisins : la revanche des vassaux », Outre-Terre 1/2006 (no 14), pp. 295-305.
Frauke Heard-Bey : « Conflict resolution and regional co-operation : The role of the Gulf Co-operation Council », Middle Eastern Studies, janvier 1998, vol. 5, pp 199 - 222
Steffen HERTOG : « The GCC and Arab Economic Integration : A New Paradigm », Middle East Policy, printemps 2007, vol .14 pp 52-68
Olivia Blachez
Olivia Blachez est étudiante à l’Institut d’Etudes Politiques de Paris où elle a suivi les cours du politologue libanais Joseph Bahout. Elle vit actuellement à Beyrouth et travaille au sein du journal L’Orient-Le Jour.
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