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Après l’empire des Huns blancs (ak Hün İmparatorluğu) de 420 à 552, les Gökturcs (552-743), l’empire Avar de 562 à 796, les khânats Khazar (651-983), Uyghur (Uygur Devleti) (744-840) et Qarakhanide (840-1212), les Ghaznavides (977-1186), les Seldjoukides (1037-1307) et les shāh du Khwarezm (1077-1231), nous terminons l’histoire ethnique historico-mythique des Büyük Türk Devleti, les grands empires turcs. Après l’arrivée des Mongols et la défaite des Seldjoukides, la Horde d’Or s’établit sur un territoire comprenant la Russie européenne actuelle, le nord de la mer Noire, la Géorgie, l’Ukraine et la partie européenne du Kazakhstan alors que les Ilkhanides occupent l’Iran, les Timourides occupent l’Asie centrale et l’Asie du Sud qu’ils se disputent avec deux confédérations tribales nomades : les Moutons blancs et les Moutons noirs. Babūr fonde l’empire moghol en Inde avec l’aide des Safavides alors qu’après la conquête de Constantinople, les Ottomans s’imposent comme une puissance incontournable. Et pour clore la chaine de transmission des Hükümdar, le buste d’Atatürk, symbole de la nouvelle Turquie.
Batu Khan est le fondateur de l’État de la Horde d’or (Altin Ordu devleti) en 1242. Il fait de la ville de Saray sa capitale et étend considérablement le territoire de sa horde. Avant sa mort en 1227, Gengis Khan, son grand-père, partage ses terres entre ses fils et donne les terres situées à l’ouest de la rivière Syr Daria/Seyhun et du lac Balkhash à son fils aîné, le père de Batu, Cuci Khan. Les terres de Cuci sont ensuite divisées entre Batu Khan et son frère aîné Orda Khan. Les terres situées entre les lacs Balkhash et Aral et au sud de la rivière Seyhun sont données à Orda alors que le Khwarezm et les terres nouvellement acquises reviennent à Batu.
Crédits : Selin Altunsoy. Détail des Bustes des Hükümdar, parc de Maçka à Istanbul.
C’est Batu qui conduit l’invasion de l’Europe de l’Est par les armées du khanat mongol et fonde la Horde d’Or, en référence à sa tente, ornée d’or (Altin orda). Il envahit d’abord la Bulgarie en répression à la suite de l’attaque des Bulgares contre les Mongols en 1224. Malgré l’hiver, l’armée de Batu commence l’invasion de la Russie et s’empare des forteresses les plus importantes des knezliks autour de Moscou (qui était, à l’époque, une ville insignifiante) : Kiev, Souzdal, Vladimir ou Yaroslav sur les rives de la Volga. Arrivées au sud du lac Illmen, les armées rebroussent chemin.
À la mort de Batu Khan en 1256, les frontières de l’État comprenaient la steppe de Kipchak, le bassin inférieur et moyen de l’Idylle, la région du lac Aral entre les rivières Seyhun et Idylle et la partie du Caucase allant jusqu’à l’Azerbaïdjan. La Pologne et la Lituanie devaient également payer une taxe à l’État de la Horde d’Or. Le fils de Batu règne pendant une année avant que Berke Khan ne prenne le trône à son tour. Le chamanisme adopté auparavant est alors délaissé, car Berke Khan se convertit à l’islam qui se répand rapidement dans la Horde d’Or. Ils combattent les Ilkhanides (1256-1335), une autre branche des Mongols établie en Perse. Berke vainc également l’armée byzantine en Bulgarie et, en 1260, il fonde la ville de Saray Berke, considérée comme l’une des plus grandes villes du Moyen Âge.
Après la mort de Berke Khan, Mengü Timur Khan, Uzbek Khan et Canibeg Khan maintiennent le pouvoir de l’État de la Horde d’Or. Après la mort de Canibeg Khan, les luttes pour le trône commencent. Toktamish Khan monte sur le trône en 1380 avec le soutien de Timur et met fin à ces conflits. Plus tard, l’expédition de Timur sur les terres de la Horde d’Or et la reprise des luttes pour le trône affaiblissent l’État qui disparaît de la scène de l’histoire en 1502.
Le personnage de Timur ou Tamerlan est bien connu de ceux qui apprécient la sagacité des fables philosophico-absurdes du Mullah Nasreddin ou Nasreddin hodja, le bouffon/conseiller du conquérant fondateur de l’empire Timouride ou Gurkani. La diffusion des histoires de Nasreddin s’explique notamment par l’extension de cet empire turco-mongol de culture persane de l’est de la Haute Mésopotamie à l’Inde du nord et incluant l’Asie centrale et le Sud Caucase.
Crédits : Selin Altunsoy. Détail des Bustes des Hükümdar, parc de Maçka à Istanbul.
Timur nait en Transoxiane (actuel Ouzbékistan) et prend le contrôle du khanat Chagataï en 1370 avant d’étendre ses conquêtes dans toute l’Asie centrale, le Caucase et l’Asie du sud et mettre en déroute la Horde d’or, les Mamelouks d’Égypte et de Syrie, le jeune Empire ottoman et le sultanat de Delhi. Sous l’égide de Timur, le chagataï devient la langue diplomatique d’un pouvoir qui se définit comme héritier de l’empire mongol de Genghis Khan.
Mais, à partir de 1467, les Timourides perdent une large partie de leur territoire face à la fédération tribale des Aq Koyunlu ou Moutons blancs (1469-1508) qui, après s’être vu offrir la province de Diyarbakır par Tamerlan, finissent par défaire les Qara Koyunlu ou Moutons noirs (1375-1469) et récupérer leurs territoires le long du golfe Persique, au Khorāsān, à l’ouest de la mer Caspienne, dans l’est anatolien et le long de la haute Mésopotamie. Les Moutons blancs sont alors confrontés au jeune Empire ottoman qui, suite à la prise de Constantinople par Mehmed II en 1453, cherche à s’étendre vers l’est. Ils seront ensuite défaits par les Safavides iraniens.
Timur est le grand-père d’un sultan timouride connu pour son savoir mathématique et astronomique, Ulugh Beg (r.1447-1449) et l’arrière-grand-père de Babur (1483-1530), le fondateur de l’Empire moghol qui se développera en Inde en imposant à la fois la langue persane et la religion islamique.
La première bataille de Pānipat, le 21 avril 1526, marque le début de l’Empire moghol où Bābur (r.1526-1530), descendant de Timur et Genghis Khan, et son fils Humāyūn, défont l’armée d’Ibrāhīm Lodī (r.1517-1526), le dirigeant du sultanat de Delhi, avec l’aide des souverains safavides et ottomans. Babur s’allie avec le shahanshah safavide Ismail Ier (r. 1501-1524) pour reconquérir le Turkestan, mais le perd ensuite à nouveau face aux Sheybanides.
Crédits : Selin Altunsoy. Détail des Bustes des Hükümdar, parc de Maçka à Istanbul.
La vie et les actes héroïques de Bābur, l’histoire et la géographie ainsi que des indications sur la société, la politique, l’économie et la nature qui l’entourent sont consignés dans le Bābur Nāmā écrit en chagataï puis traduit en persan par Abdur Rahim en l’an 998 de l’hégire (1589-1590). Le récit commence par l’intronisation de Bābur comme roi de Fergana au mois de ramadan 899 (1494) et se termine par la fondation de l’empire moghol en Inde.
Le fils de Bābur, Humayun, doit aux armées safavides d’avoir par deux fois regagné son empire dans le sous-continent indien. Il revient de son exil en Perse pendant 15 ans avec des courtisans et des lettrés qui vont amorcer un changement important dans les mœurs, les goûts artistiques, l’architecture et la littérature de la cour moghole où l’on parlera désormais le persan. Le Humayun Nāmā qui décrit la vie tumultueuse d’Humayun, est rédigé par sa demi-sœur Gulbadan Begum (v. 1523-1603) qui l’aurait écrit en turc avant que celui-ci soit traduit en persan.
Le fondateur de la dynastie moghole accordait, semble-t-il, une importance particulière à son héritage turc et chamanique alors que son petit-fils Jalāluddin Muhammad Akbar (r.1556-1605) a souhaité créer à la cour une aire d’ouverture religieuse et intellectuelle. Sur la base des débats d’idées entre les différents dignitaires religieux, il crée la dīn-ī ilāhī ou religion de la lumière qui opère un syncrétisme entre l’islam, le christianisme et le jaïnisme. Son mariage avec Jodha Bai, d’origine hindoue et mère de son successeur Jahāngīr est le sujet de romans et films romantiques qui témoignent de l’attachement des Indiens au personnage et à ce qu’il accomplit durant son règne. L’Empire moghol éclate en 1707 sous la pression des invasions iraniennes, afghanes et hindoues.
Osman Ier ou Osman Ghazi (m. 1323/4) est le fondateur de l’Empire ottoman d’abord connu sous le nom de beylik ou émirat ottoman situé dans la région de Bithynie, au nord de l’Asie mineure, à un endroit stratégique pour se confronter à l’Empire byzantin. La principauté ottomane est l’un des nombreux beyliks anatoliens qui sont apparus dans la seconde moitié du 13ème siècle. Son nom est mentionné dans les sources grecques et arabes, notamment par Ibn Battuta et Ibn Khaldoun, mais son hagiographie, composée au 15ème siècle est surtout légendaire. La tradition ottomane fait descendre Osman de la branche Kayı des tribus turkmènes Oghouzes. Conduite par le père d’Osman, Ertuğrul, la tribu aurait fui l’Asie centrale et le nord de la mer d’Aral au moment des invasions mongoles et serait arrivée en Anatolie, près d’Ankara, où elle s’est établie sous le protectorat des Seldjoukides de Rum, notamment Kay Khusraw II (1259-1284). En échange de l’engagement des siens auprès des troupes du sultanat de Rum contre les Mongols et les Byzantins, Ertuğrul aurait reçu le commandement de la ville de Söğüt qui deviendra la capitale de l’empire de Osman en 1299.
Le premier événement datable dans la vie d’Osman est la bataille de Bapheus, entre Nicodème et Nicée, en 1301 ou 1302, au cours de laquelle il défait une force byzantine envoyée pour le contrer. Après la chute des Seldjoukides de Rum, les Ottomans continuent leurs conquêtes en Anatolie et arrivent à Bursa, le lieu de repli de l’Empire byzantin et un point économique stratégique notamment grâce au commerce de la soie. L’enjeu est de taille et le plan des Ottomans se déroule en deux temps. En 1308, ils conquièrent l’île de Kalolimnos (aujourd’hui İmralı Adası) et en font une base navale qui leur permet de contrôler la mer de Marmara et d’isoler Bursa du reste du monde byzantin. Le 20 avril 1317 commence alors la conquête de Bursa, retranchée derrière ses murailles, qui tombera finalement. Après un siège de près de 9 ans, le 6 avril 1326, le fils de Osman, Orhan, entre dans la ville désertée par les troupes byzantines et en fait la capitale de son empire.
Cet événement marque une étape décisive dans l’histoire des Ottomans et l’étendue de leurs conquêtes des territoires byzantins qui continueront avec le siège puis la reddition de Nicée en 1331, de Nicomédie en 1337 et la prise de Constantinople, par terre et mer, en 1453. L’Empire ottoman devient alors le centre des transmissions et des interactions entre l’Orient et l’Occident, l’acteur mondial incontournable de plus de 6 siècles d’histoire jusqu’en 1923 où Mustafa Kemal Atatürk, suite au traité de Sèvres, chasse les Européens d’Anatolie, abolit l’Empire ottoman et le califat et devient le dernier Hükümdar légendaire qui clôt le panthéon.
Crédits : Selin Altunsoy. Détail des Bustes des Hükümdar, parc de Maçka à Istanbul.
Quelques liens :
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Florence Somer
Florence Somer est docteure en anthropologie et histoire religieuse et chercheuse associée à l’IFEA (Istanbul). Ses domaines de recherche ont pour cadre les études iraniennes, ottomanes et arabes et portent principalement sur l’Histoire transversale des sciences, de la transmission scientifique, de l’astronomie et de l’astrologie.
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