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Sandjak d’Alexandrette

Par Anne-Lucie Chaigne-Oudin
Publié le 15/10/2010 • modifié le 02/03/2018 • Durée de lecture : 3 minutes

Le contexte historique

A la suite de la Première Guerre mondiale et des négociations menées entre alliés et Arabes, le sort des provinces arabes de l’Empire ottoman est définitivement fixé par les accords de San Remo d’avril 1920, qui attribuent les mandats à la France et à la Grande-Bretagne. Allant dans le sens des accords Sykes-Picot signés en mai 1916 entre la France et la Grande-Bretagne, la France obtient de la Société des Nations la Syrie, le Liban ainsi que la Cilicie (province méridionale de la Turquie placée sous administration française de 1918 à 1921). En septembre 1920, le haut-commissaire français, le général Gouraud, organise le découpage territorial de la zone qui lui a été attribuée par la SDN. Sont ainsi créés par arrêtés cinq Etats : l’Etat du grand Liban, l’Etat de Damas, l’Etat d’Alep auquel est ajouté le sandjak d’Alexandrette, le Djebel druze, le territoire des Alaouites.
En Cilicie, l’armée française est présente depuis janvier 1919. Une guerre meurtrière est menée entre les forces de Mustapha Kemal, qui veut récupérer cette partie de la Turquie, et l’armée française. Le 30 octobre 1921, l’accord d’Angora, appelé également accord Francklin-Bouillon, est signé entre la France et la Turquie, mettant fin à la guerre entre les deux pays et fixant la frontière entre le mandat français et la Turquie. Sur le plan territorial, la France cède la Cilicie à la Turquie, mais garde le Sandjak d’Alexandrette en territoire syrien sous mandat français. Le sandjak d’Alexandrette est par conséquent délimité au nord par la frontière avec la Turquie. Sur le plan juridique, l’accord d’Angora met en place un régime administratif spécial, permettant aux populations d’origine turque habitant le Sandjak d’Alexandrette de jouir « de toutes les facilités pour le développement de leur culture. La langue turque y aura le caractère officiel » [1]. Mais cette décision concernant le territoire d’Alexandrette est contestée par des turcophiles, qui provoquent des troubles sur la zone frontalière pendant deux ans. Le calme est néanmoins rétabli par la France jusqu’en 1933.

Le Sandjak d’Alexandrette est cédé à la Turquie

A cette époque, plusieurs manifestations pro-kémalistes se déroulent, mettant en évidence la volonté séparatiste de la population turque du Sandjak d’Alexandrette. En 1936, la négociation du traité franco-syrien relance la question. En octobre, les responsables politique turcs demandent l’autodétermination du Sandjak. Des négociations menées sous l’arbitrage de la SDN permettent de signer l’accord franco-turc du 29 mai 1937 par lequel le Sandjak est séparé de la Syrie et passe sous le contrôle de la SDN. Mais les protestations turques prennent de l’ampleur et un nouveau traité franco-turc est signé le 4 juillet 1938. Dans la situation tendue de l’après Munich (les troupes allemandes entrent à Prague le 15 mai 1939), la question du Sandjak s’intègre de plus en plus dans celle, plus vaste, de la sécurité des Balkans et de la Méditerranée Orientale. Le 23 juin, un accord franco-turc signé par le ministre turc des Affaires étrangères Saracoglu et l’ambassadeur de France René Massigli, assure le retour d’Alexandrette à la Turquie. Les deux pays s’engagent à s’assister mutuellement, en attendant un traité d’alliance franco-anglo-turc qui sera signé le 19 octobre pour 15 ans.
A la suite de l’accord du 23 juin, les Français doivent quitter le sandjak d’Alexandrette pour le 23 juillet. Quant à la population, elle dispose de six mois pour choisir la nationalité libanaise ou syrienne, et de dix-huit mois pour quitter le nouveau territoire turc. Le 23 juillet, les troupes turques entrent dans le Sandjak, dans les villes d’Antioche et d’Alexandrette.
Cette amputation territoriale de la Syrie n’est pas reconnue par le gouvernement de Damas.

Bibliographie :
J.B. Duroselle, Histoire diplomatique de 1919 à nos jours, Paris, Dalloz, 1993, 1038 pages.
J. C. Hurewitz, The Middle East and North Africa in World Politics, vol. II, British French Supremacy 1914-1945, New Haven et Londres, Yale University Press, 1949, p. 544-548, Déclaration d’assistance mutuelle et arrangements pour la cession d’Alexandrette à la Turquie, le 23 juin 1939 et traité d’assistance mutuelle franco-anglo-turc, le 19 octobre 1939
Henry Laurens, L’Orient arabe, arabisme et islamisme de 1798 à 1945, Paris, Armand Collin, 1993, 371 pages.

Publié le 15/10/2010


Anne-Lucie Chaigne-Oudin est la fondatrice et la directrice de la revue en ligne Les clés du Moyen-Orient, mise en ligne en juin 2010.
Y collaborent des experts du Moyen-Orient, selon la ligne éditoriale du site : analyser les événements du Moyen-Orient en les replaçant dans leur contexte historique.
Anne-Lucie Chaigne-Oudin, Docteur en histoire de l’université Paris-IV Sorbonne, a soutenu sa thèse sous la direction du professeur Dominique Chevallier.
Elle a publié en 2006 "La France et les rivalités occidentales au Levant, Syrie Liban, 1918-1939" et en 2009 "La France dans les jeux d’influences en Syrie et au Liban, 1940-1946" aux éditions L’Harmattan. Elle est également l’auteur de nombreux articles d’histoire et d’actualité, publiés sur le Site.


 


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