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Révolte arabe de 1936-1938

Par Lisa Romeo
Publié le 16/04/2011 • modifié le 02/03/2018 • Durée de lecture : 3 minutes

La montée des tensions entre Sionistes, Arabes et Britanniques

La Palestine est depuis 1922 sous mandat britannique. Si l’organisation sioniste s’est affirmée politiquement avec la création de l’Agence juive en 1929, chargée de représenter la communauté juive auprès de la Puissance mandataire, les Arabes palestiniens peinent à mettre en place une formation politique unique. En proie à des antagonismes claniques et familiaux, les mouvements nationalistes arabes sont divisés, au début des années 1930, en plusieurs formations rivales. Le parti de la défense nationale, créé en 1934, envisage une plus grande coopération avec la Grande-Bretagne et la Transjordanie. Sous la houlette de la famille des Nashabishi, ce parti s’oppose au parti arabe palestinien des Husseini, courant plus arabiste, islamiste et hostile à un éventuel rapprochement avec les autorités britanniques. Face à la dispersion des courants nationalistes, la jeunesse arabe palestinienne commence à se radicaliser et à critiquer l’incapacité à influer sur la politique britannique. La Grande-Bretagne est par ailleurs accusée de faciliter l’arrivée des Juifs dans le pays et le rachat des terres par les sionistes.

L’arrivée d’Hitler au pouvoir en Allemagne en 1933 entraine une nette accélération de l’immigration juive vers la Palestine. Environ 135 000 immigrants rejoignent la Terre sainte entre 1932 et 1935, multipliant par six le nombre de Juifs dans le pays. Cette arrivée massive de personnes et de capitaux juifs ainsi que l’annonce par le sioniste Ben Gourion (1886-1973) de leur volonté de former un Etat juif en Palestine, accentuent les craintes des Arabes palestiniens. En 1935, Izz al-Din Qassam, un prédicateur musulman d’origine syrienne mais vivant à Haïfa, prend les armes avec un groupe de partisans contre les Juifs et les Britanniques. Il est tué le 20 novembre par les Anglais. Son action et sa mort marquent fortement les Palestiniens qui le présenteront comme le premier martyr de la cause arabe palestinienne.

L’éclatement de la révolte

Le 15 avril 1936, dans ce contexte troublé, deux Juifs sont tués dans la région de Naplouse par des extrémistes arabes. Ce double assassinat pousse un groupe de Juifs radicaux à ôter la vie à deux Arabes. Trois jours plus tard, neuf Juifs sont abattus vers la ville de Jaffa. Les autorités britanniques décrètent immédiatement l’état d’urgence et imposent un couvre-feu. Cependant, les violences s’intensifient et une grève générale s’organise dans tout le pays. Les produits anglais et sionistes sont également boycottés. Le 25 avril, les différents partis nationalistes forment un comité suprême présidé par le Grand Mufti de Jérusalem, Amin al-Husseini (1895-1974).

D’origine urbaine, la révolte s’étend aux milieux ruraux à partir du mois de mai. Des combattants syriens viennent également lutter aux cotés des Palestiniens. Face à ce soulèvement, la Grande-Bretagne fait savoir qu’elle étudiera les revendications arabes, par l’intermédiaire d’une commission, à condition d’un arrêt complet des violences. L’Irak, la Transjordanie et l’Arabie Saoudite appellent leurs frères du comité arabe suprême à mettre un terme à la grève et aux violences. Le comité suprême accepte alors d’arrêter la grève en échange de leur soutien pour la cause palestinienne.

L’échec du plan Peel et la reprise de la contestation

Ainsi, après des mois d’investigations, la commission d’enquête dirigée par lord Peel fait connaître ses positions le 7 juillet 1937. Constatant que les Juifs et les Arabes ne peuvent vivre ensemble, la commission propose d’établir un plan de partage de la Palestine en deux Etats : la Galilée et la majeure partie du littoral formeraient un Etat juif et le reste, annexé à la Transjordanie, reviendrait aux Arabes. Jérusalem et les Lieux saints resteraient alors sous protection britannique. Ce plan est rejeté par les Arabes et par certains sionistes. Les nationalistes de tous les pays arabes réclament la formation immédiate d’un Etat arabe indépendant qui garantirait les droits des minorités juives. L’échec du plan Peel relance la contestation arabe. Les Arabes considérés comme trop proches de la Puissance mandataire tel, que les Druzes, sont également pris pour cible. En août 1937, le commandant Andrew, gouverneur britannique chargé de la Galilée, est assassiné. Les Britanniques décident alors de radicaliser leur politique et répriment les notables nationalistes, arrêtant systématiquement les fauteurs de troubles. Fin 1938, les principaux chefs de la Révolte ont été emprisonnés ou contraints à l’exil. Amin al-Husseini réussit à rejoindre Beyrouth. La révolte de 1935-1938 a couté la vie à au moins 5 000 Arabes et a fait 2 000 blessés.

A la veille de la Seconde Guerre mondiale, les Britanniques ont dû mobiliser d’importants contingents pour réussir à pacifier la région qu’ils ne considèrent pas prête à recevoir son indépendance. La Révolte de 1936-1938 a cependant favorisé la rédaction du Livre blanc de 1939 qui limite pour la première fois l’immigration juive en Palestine et réglemente le transfert des terres arabes aux Juifs, rassurant ainsi une partie de l’opinion arabe.

Bibliographie :
Olivier Carré, Proche-Orient, entre la guerre et la paix, Paris, Epi Editeurs, 1974.
Vincent Cloarec, Henry Laurens, Le Moyen-Orient au 20e siècle, Paris, Armand Colin, 2005.
Ilan Pappe, Une terre pour deux peuples, Histoire de la Palestine moderne, Paris, Fayard, 2004.
Dominique Perrin, Palestine, une terre pour deux peuples, Paris, Presses Universitaires du Septentrion, 2000.

Publié le 16/04/2011


Lisa Romeo est titulaire d’un Master 2 de l’université Paris IV-Sorbonne. Elle travaille sur la politique arabe française en 1956 vue par les pays arabes. Elle a vécu aux Emirats Arabes Unis.


 


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