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Jamais l’Etat d’Israël n’a connu une vague de contestation sociale aussi importante que celle qui bouleverse le pays depuis maintenant plus d’un mois. En juin dernier, déjà, une certaine lassitude commençait à se faire sentir face à la montée générale des prix. Le succès de l’appel, lancé via Facebook, au boycottage du fromage blanc, utilisé couramment dans la cuisine israélienne, avait permis de contraindre les producteurs à réduire son coût. Mi-juillet, une jeune étudiante décide de planter sa tente sur l’avenue Rothschild, les « Champs-Elysées de Tel-Aviv », afin de protester contre la flambée des prix des loyers. Depuis, l’avenue s’est vite transformée en un vaste camping et des manifestations sont organisées tous les samedis. Dépassant les clivages religieux et politiques, médecins, professeurs, étudiants, femmes au foyer, chauffeurs de taxi, se retrouvent dans la rue pour manifester leur mécontentement et faire pression sur le gouvernement de droite de Benyamin Netanyahou pour plus de justice sociale.
Selon les sondages, près de 88 % de la population approuvent le mouvement qui mobilise surtout la classe moyenne. D’abord cantonné aux grandes villes, Tel-Aviv et Jérusalem notamment, le mouvement a gagné une douzaine de villes moyennes sur l’ensemble du territoire. Le 13 août, l’on comptait 100 000 personnes dans les cortèges sur l’ensemble du pays selon les organisateurs, et 75 000 selon les médias.
Ces « Indignés » israéliens remettent en question la politique de privatisation menée depuis plusieurs décennies par les différents gouvernements en place et appellent à de nombreuses réformes : revalorisation du salaire minimum, mise en place d’un système éducatif gratuit pour tous, meilleur accès aux soins, construction de logements sociaux… Ils demandent, par ailleurs, une baisse générale des prix des produits de base et de l’immobilier qui a augmenté de 55 % en 5 ans, alors que les salaires stagnent. Ils condamnent également la maitrise par quelques magnats de la finance de pans entiers de l’économie. Cette situation de quasi-monopole empêche, en effet, la libre concurrence et permet à quelques groupes d’imposer leurs prix. Ainsi les Israéliens réclament-ils la restauration d’un Etat providence et une réorientation de la politique économique néo-libérale prise par le gouvernement de M. Netanyahou.
A première vue, la situation économique du pays est pourtant loin d’être alarmante : le taux de chômage, de 5,7 % en mai dernier, est le plus faible depuis des années. L’Etat hébreu peut en outre se vanter d’avoir un taux de croissance d’environ 5 % et d’avoir su rester à l’écart de la crise financière de 2008-2009. Malgré ces chiffres encourageants, les inégalités sociales sont parmi les plus élevées de l’OCDE et un habitant sur cinq vit en-dessous du seuil de pauvreté en Israël.
Face à la pression de la rue, le Premier ministre Benyamin Netanyahou s’est d’abord montré assez hésitant et s’est contenté d’appeler à la prudence. Depuis mi-août, des promesses de changement se sont multipliées et une commission spéciale dirigée par l’économiste Manuel Trajtenberg a été chargée d’analyser les différentes options possibles pour satisfaire les revendications sociales. Ces propositions seront présentées au gouvernement en septembre. D’une manière plus générale, la rentrée sera déterminante pour le Premier ministre qui devra également préparer le pays à une possible reconnaissance d’un Etat palestinien suite à la requête qui sera remise à l’ONU le 20 septembre prochain.
Sources
Articles de presse : Le Monde, Le Figaro
Lisa Romeo
Lisa Romeo est titulaire d’un Master 2 de l’université Paris IV-Sorbonne. Elle travaille sur la politique arabe française en 1956 vue par les pays arabes. Elle a vécu aux Emirats Arabes Unis.
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