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Les ressources de la Région autonome du Kurdistan d’Irak : une économie dominée par l’or noir

Par Emile Bouvier
Publié le 17/10/2019 • modifié le 21/04/2020 • Durée de lecture : 8 minutes

I. Le Kurdistan d’Irak : le « prochain Dubaï ? »

En mai 2010, trois ans avant la montée en puissance brutale de l’Etat islamique, le journaliste américain Nicky Woolf écrivait dans The Guardian un article intitulé « Le Kurdistan est-il le prochain Dubaï ? » (4). Il y soulignait notamment la prospérité économique de la région, où « les minarets sont désormais surpassés en nombre à un contre deux par les grues ».

De fait, avant que ne se déclenche la guerre contre Daech (2013-2017 environ, jusqu’à la reprise de Hawija le 11 octobre 2017 en ce qui concerne les problématiques sécuritaires du Kurdistan irakien), la RAK était l’une des régions les plus prospères et promptes à se développer en Irak. L’héritage de cette époque est encore visible aujourd’hui : l’Indice de développement humain (IDH) de la province de Souleymaniyeh et Halabja par exemple, qui compose la moitié sud de la RAK, était de 0,710 en 2017, soit la deuxième région la plus développée d’Irak devant Bagdad (0,720), selon des chiffres de l’Institut de recherche en gestion de l’Université de Nimègue en date de 2018. Avec une croissance économique de 12% en 2012 et de 8% en 2018 (5), le GRK aurait caracolé en troisième position des pays ayant la plus forte croissance du PIB dans le monde en 2018 s’il avait été un Etat souverain.

Fort de cette croissance économique, la région du Kurdistan se caractérise également par le plus faible taux de pauvreté d’Irak : alors qu’en 2011, avant le conflit, les 20% des 27 millions d’Irakiens vivaient en-dessous du seuil de pauvreté, les 8 millions de Kurdes irakiens étaient, eux, 10% dans la province de Dohuk et 3% dans les provinces d’Erbil et Souleymaniyeh (6).

Ce « miracle économique » est dû, de façon écrasante, à l’exploitation des vastes gisements d’hydrocarbures que possède le Kurdistan irakien sur son sol : comme évoqué précédemment, l’or noir représentait en effet, en 2018, près de 80% des revenus de la RAK. Bien moins nombreux et éparpillés qu’en Syrie, les gisements de pétrole et de gaz dans la RAK sont bien souvent de grande taille et suivent les mouvements géologiques des montagnes Zagros et du Taurus dans lesquels ils se trouvent ; les champs sont ainsi souvent longilignes et orientés sur un axe nord-ouest/sud-est. En tout, les gisements pétroliers représentent près de 45 milliards de barils de pétrole ; ceux de gaz, environ 5,7 trillions de mètres cubes (7). La production actuelle permet d’extraire 451 000 barils de pétrole par jour, soit plus que la Libye par exemple (404 000), tandis que 1,88 milliards de mètres cubes de gaz sont produits quotidiennement (8).

Au grand dam du gouvernement fédéral de Bagdad, qui souhaiterait maîtriser l’usage des gisements du Kurdistan irakien, l’exploitation des hydrocarbures dans la RAK est opérée massivement par des entreprises étrangères depuis 2011 ; parmi ces exploitants étrangers figurent notamment ExxonMobil, Chevron, Gazprom ou encore Total.

Depuis mai 2018, date de signature d’un premier accord, le Kurdistan irakien a tissé des liens de plus en plus étroits avec la Russie et notamment le géant pétrolier russe Rosneft afin d’exploiter des gisements dans lesquels les entreprises occidentales se montraient de plus en plus réticentes à investir, au vu des multiples problématiques sécuritaires traversant le Kurdistan (résilience de Daech, différend territorial avec Bagdad, conflit entre le PKK et la Turquie dans les montagnes kurdes irakiennes).

Cet accord ne prévoit pas, fondamentalement, de grands contrats, mais représente une promesse d’investissements et d’intérêt de la part des Russes envers le Kurdistan irakien, dans un souci permanent de damer le pion aux Etats-Unis, ancien allié en perte de vitesse d’Erbil (9). Ainsi, dans le cadre de ce contrat, Rosneft a versé depuis mai près de 3,5 milliards de dollars à l’administration kurde, dont 400 millions dans le but de développer cinq blocs exploratoires (10) ; 1,8 milliards pour développer le contrôle du GRK sur les pipelines présents sur son sol ; un prêt de 1,2 milliard ayant permis aux Kurdes d’investir dans de nouvelles infrastructures pétrolières.

Comme le laisse présager la décision unilatérale d’inviter des sociétés étrangères exploiter le pétrole kurde irakien, les tensions entre Erbil et Bagdad sont particulièrement vives autour du pétrole. Ce différend remonte principalement à l’été 2014 où, profitant du chaos provoqué par Daech en Irak, le GRK s’est emparé de la ville de Kirkouk, désertée par l’armée irakienne, ainsi que ses gisements massifs en hydrocarbures. Les Kurdes ont en outre commencé à exporter par eux-mêmes le pétrole vers la Turquie, en s’affranchissant de l’autorité - et des taxes - du gouvernement fédéral irakien.

Un accord a été trouvé en 2015 sous l’égide du ministre irakien du Pétrole de l’époque, Adil Abdel Mahdi, actuellement Premier ministre, qui promettait aux Kurdes une redistribution équitable des revenus obtenus de l’exportation du pétrole s’ils acceptaient que le pétrole kurde irakien soit exporté via l’entreprise étatique irakienne State Oil Marketing Company (SOMO). Ce traité n’a toutefois jamais été appliqué, les deux parties s’accusant mutuellement de ne pas respecter l’accord.

En effet, le budget fédéral irakien de 2019 stipule que le GRK doit exporter 250 000 barils de pétrole par jour en passant par la SOMO et reverser à Bagdad les revenus tirés des autres exploitations d’hydrocarbures sur son territoire, en échange de quoi le gouvernement fédéral irakien reversera au GRK 12% de son budget, soit environ 8,2 milliards de dollars. Le budget stipule aussi que Bagdad paiera les salaires des fonctionnaires du GRK, quelle que soit l’attitude de ce dernier vis-à-vis de la proposition irakienne.

Toutefois, dès l’été 2019, les premiers problèmes sont apparus : bien que Bagdad ait payé les salaires des fonctionnaires, il n’a pas reversé sa part du budget au GRK, en l’accusant d’avoir continué à exporter directement à la Turquie près de 500 000 barils par jour de pétrole (le Kurdistan exporte à la fois « son » pétrole, les 451 000 barils par jour évoqués précédemment, mais aussi du pétrole issu du reste du territoire irakien et qui passe par l’un des pipelines installés sur le territoire de la RAK) (11).

Des négociations sont en cours pour régler ce différend, dont l’issue prochaine laisse les observateurs relativement sceptiques (12). En raison des difficultés que lui cause le secteur pétrolier, et malgré ses bénéfices considérables, le GRK cherche ainsi à diversifier son économie.

II. Promouvoir l’agriculture et le tourisme pour contrebalancer le monopole du pétrole sur l’économie kurde irakienne

Depuis la reprise des champs pétroliers et gaziers de Kirkouk par l’armée fédérale irakienne et les milices chiites en octobre 2017, le Gouvernement régional du Kurdistan a pris conscience de sa trop forte dépendance économique au pétrole (13) ; de nouvelles pistes sont ainsi explorées afin de contrecarrer son monopole sur l’économie kurde irakienne.

La principale piste est celle de l’agriculture. Les montagnes du Kurdistan sont, en effet, particulièrement propices à la culture, a contrario de la plaine irakienne, souvent désertique, ou parcourue de marécages, comme dans le sud du pays dans le gouvernorat de Bassorah. Le relief montagneux kurde présente de nombreux cours d’eau permettant d’irriguer les cultures, à l’instar des Grand et Petit Zab, du fleuve Diyâla et d’autres affluents plus discrets du Tigre.

Dans ce but, afin d’accroître la capacité d’irrigation de ces fleuves et d’en tirer une production énergétique qui ne soit pas issue du pétrole, plusieurs barrages hydroélectriques ont été installés. La RAK en compte quatre : le barrage de Dohuk, de Bekhme sur le Grand Zab, de Dukan à proximité de Koysandjak, et enfin de Darbandikhan, à proximité de Halabja, à l’embouchure du lac éponyme.

L’agriculture ne représentait, en 2017, que 10% de l’économie kurde irakienne (14) ; les autorités souhaitent accroître ce pourcentage et cherchent, dans un premier temps, à atteindre l’autosuffisance alimentaire - 600 000 tonnes de production agricole seraient nécessaires pour cela, selon une déclaration du Ministre de l’Agriculture et des Ressources aquatiques Abdulstar Majid, le 7 mai 2016. L’accent est mis, pour le moment, sur la culture de blé et d’orge, déjà particulièrement répandue au Kurdistan (15). Dans ce cadre, le GRK subventionne fortement le secteur agricole : en 2015, plus de 250 millions de dollars ont ainsi été versés sous forme d’aides aux agriculteurs ou futurs agriculteurs (16).

Concomitamment aux politiques volontaristes de développement du secteur agricole, le Kurdistan irakien cherche à accroître la part du tourisme dans ses revenus. Pour le moment cantonné à 4% (17), le secteur touristique fait partie du plan gouvernemental visant à affaiblir le monopole du pétrole dans les finances kurdes irakiennes.

Ainsi, l’ex-ministère de la Ville s’est transformé, en 2018, en ministère de la Ville et du Tourisme, et vise dans un premier temps à promouvoir l’image d’une région au potentiel touristique réel mais grevé par l’instabilité sécuritaire et les conflits internes ou voisins. De fait, après que la dernière poche de Daech à proximité du Kurdistan ait été reconquise à Hawija le 11 octobre 2017, le directeur de l’Office général du tourisme au Kurdistan irakien, Mawlawi Jabar, annonçait que les chiffres liés aux activités touristiques avaient battu des records : durant le premier semestre 2018, plus de 1 310 000 touristes se seraient rendus au Kurdistan, rapportant près de 118 000 000 dollars de revenus à la RAK (18).

Le succès touristique du Kurdistan tiendrait en sa situation géographique : selon le chercheur Stan MacGahey (19), une grande partie des touristes viendrait du Moyen-Orient et notamment de l’Irak, où elle chercherait à fuir les 50°C que peut atteindre la plaine irakienne en plein été par exemple : les montages du Kurdistan offriraient en effet des températures plus clémentes, ainsi qu’un cadre davantage verdoyant (20).

Le pétrole apparaît ainsi quasi omniprésent, voire quasi omnipotent, dans l’économie kurde irakienne : les ressources en hydrocarbures de la région autonome sont incontestablement une force majeure pour le GRK mais aussi un talon d’Achille, dont les autorités ont pris la mesure à l’occasion de la reprise de Kirkouk en octobre 2017. Les politiques de diversification des sources de revenus battent donc leur plein. L’arrivée au pouvoir d’un nouveau Président et d’un nouveau cabinet gouvernemental, qui ont fait des réformes leur leitmotiv, devrait accélérer ce processus et, avec lui, la mutation des ressources des Kurdes irakiens.

Notes :
(1) Masrour Barzani, ancienne chef du Conseil de sécurité de la région du Kurdistan (CSRK), appareil sécuritaire et de renseignement du GRK, a prêté serment le 10 juillet dernier, après que son cousin Nechirvan Barzani ait été élu Président de la Région autonome du Kurdistan (RAK) le 10 juin 2019.
(2) https://www.rudaw.net/turkish/kurdistan/170720195
(3) https://www.total.com/sites/default/files/atoms/files/total_in_iraq_en_ara.pdf
(4) https://www.theguardian.com/commentisfree/2010/may/05/kurdistan-next-dubai-iraq
(5) Selon des chiffres de la Banque mondiale en date de 2018 : http://documents.worldbank.org/curated/en/771451524124058858/pdf/125406-WP-PUBLIC-P163016-Iraq-Economic-Monitor-text-Spring-2018-4-18-18web.pdf
(6) http://www.thenewhumanitarian.org/news/2009/05/24/over-20-percent-iraqis-live-below-poverty-line
(7) https://www.reuters.com/article/kurdistan-oil-idINL5E8KIS9E20120918
(8) https://www.pipelineoilandgasnews.com/regionalinternational-news/regional-news/kurdish-oil-production-averaged-451-000-bpd-in-july/
(9) Les Kurdes irakiens gardent la rancœur de l’absence totale de soutien américain lors du référendum sur l’indépendance en septembre 2017 ; alors que l’Union européenne, les Etats-Unis et la Turquie condamnaient la tenue de ce référendum, la Russie était restée, elle, opportunément silencieuse.
(10) L’exploration pétrolière passe par la définition de « blocs », qui divise le territoire potentiellement pétrolifère de façon à affiner les recherches.
(11) https://www.rudaw.net/english/middleeast/iraq/280920192
(12) A l’instar d’Arif Qurbany, auteur et analyste irakien : https://www.rudaw.net/english/opinion/19082019
(13) https://www.reuters.com/article/us-iraq-oil-explainer/explainer-why-are-iraqs-kirkuk-oilfields-so-important-idUSKCN1NG0AM
(14) Yann Walliser, « L’agriculture du Kurdistan irakien », Études rurales, 186|2010, 133-148.
(15) Ibid.
(16) https://investingroup.org/review/240/restoring-the-bread-basket-agriculture-kurdistan/
(17) PALANI, Soraya, SOHRABI, Seima, et al. Consumer attitudes and behavior when selecting a holiday destination : introducing Kurdistan to the Finnish traveler. 2013.
(18) https://www.kurdistan24.net/en/culture/c81ac661-e354-4abe-b880-31f3dbe6de9a
(19) MCGAHEY, Stan. Tourism development in Iraq : the need for support from international academia. International Journal of Tourism Research, 2006, vol. 8, no 3, p. 235-239.
(20) Une étude du Journal of Tourism and Hospitaly Management publiée en 2017 montrait en effet que 44,4% des touristes au Kurdistan irakiens s’y rendaient en raison des atouts naturels de la région.
Cf. ALTAEE Hatem Hatef Abdulkhadim, « Promoting the Tourism Industry of Kurdistan Region of Iraq (Halabja Province as a Case Study », Journal of Tourism and Hospitality Management, Juin 2017, Vol. 5, No.1, pp. 103-111.

A lire sur Les clés du Moyen-Orient :
 Tensions entre l’Irak et le Kurdistan irakien autour des hydrocarbures : quels enjeux ?
 Compte rendu de lecture : « Agriculture et politique : des champs d’insécurité », Confluences Méditerranée – printemps 2019
 Entretien avec Matthieu Brun - Géopolitique de l’agriculture et de l’alimentation au Moyen-Orient (1/2)
 Entretien avec Matthieu Brun - Géopolitique de l’agriculture et de l’alimentation au Moyen-Orient (2/2)
 La crise de l’eau en Irak : contexte et perspectives (2/2). L’Etat islamique, nouvelle menace hydrique pour l’Irak

Bibliographie :
 BLANC Pierre, Proche-Orient, Le pouvoir, la terre et l’eau (Monde et sociétés, Les Presses de Sciences Po, 2012
 BRADBURY, Jennie et PROUDFOOT, Philip. Agriculture in the Fertile Crescent, from the deep past to the modern conflict. British Academy Review, 2018, vol. 33, p. 35
 GALBRAITH, Peter. Kurdistan in a federal Iraq. The future of Kurdistan in Iraq, 2005, p. 268-81.
 MCGAHEY, Stan. Tourism development in Iraq : the need for support from international academia. International Journal of Tourism Research, 2006, vol. 8, no 3, p. 235-239.
 PALANI, Soraya, SOHRABI, Seima, et al. Consumer attitudes and behavior when selecting a holiday destination : introducing Kurdistan to the Finnish traveler. 2013.
 UNEGBU, Angus O. et OKANLAWON, Augustine. Direct Foreign Investment in Kurdistan Region of Middle-East : Non-Oil Sector Analysis. arXiv preprint arXiv:1502.00218, 2015.
 EKLUND, Lina, PERSSON, Andreas, et PILESJÖ, Petter. Cropland changes in times of conflict, reconstruction, and economic development in Iraqi Kurdistan. Ambio, 2016, vol. 45, no 1, p. 78-88.
 BURINGH, Pieter. Soils and soil conditions in Iraq. Ministry of agriculture
 ALNASRAWI, Abbas. The economy of Iraq : Oil, wars, destruction of development and prospects, 1950-2010. ABC-CLIO, 1994.

Sitographie :
 Over 1.3 million tourists travel to Kurdistan Region in six months, Kurdistan24, 09/10/2018
https://www.kurdistan24.net/en/culture/c81ac661-e354-4abe-b880-31f3dbe6de9a
 Is Kurdistan the next Dubai ?
https://www.theguardian.com/commentisfree/2010/may/05/kurdistan-next-dubai-- iraq
 KRG Economy Needs to Be Diversified Away from Oil : PM, BasNews, 17/07/2019
http://www.basnews.com/index.php/en/news/kurdistan/534210
 Rosneft’s Iraqi Kurdistan oil and gas play angers Baghdad, Financial times, 30/10/2018
https://www.ft.com/content/ace52dd2-4f0c-11e8-ac41-759eee1efb74
 The Kurdish opening, The Economist, 03/11/2012
https://www.economist.com/middle-east-and-africa/2012/11/03/the-kurdish-opening
 Update : Kurdistan and the Battle Over Oil, New York Times, 08/10/2018
https://www.nytimes.com/2018/10/08/business/update-kurdistan-and-the-battle-over-oil.html
 Au Kurdistan, le « oui » au référendum d’indépendance triomphe, Bagdad fulmine, 27/09/2017
https://www.lemonde.fr/moyen-orient-irak/article/2017/09/27/referendum-d-independance-du-kurdistan-le-oui-l-emporte-a-92-selon-des-resultats-officiels_5192407_1667109.html

Publié le 17/10/2019


Emile Bouvier est chercheur indépendant spécialisé sur le Moyen-Orient et plus spécifiquement sur la Turquie et le monde kurde. Diplômé en Histoire et en Géopolitique de l’Université Paris 1 - Panthéon-Sorbonne, il a connu de nombreuses expériences sécuritaires et diplomatiques au sein de divers ministères français, tant en France qu’au Moyen-Orient. Sa passion pour la région l’amène à y voyager régulièrement et à en apprendre certaines langues, notamment le turc.


 


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