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La liquidation, le 3 janvier, du général Soleimani et d’Abu Mahdi al-Muhandis, chef adjoint des Popular Mobilization Forces (alias PMF ou PMU), et responsable de la milice Kataeb Hezbollah soutenue par l’Iran, pose maintes questions sur ses causes et ses conséquences de plusieurs natures. Pour évaluer ces dernières, il est nécessaire, disposant à présent d’un peu de recul, de scruter d’abord les raisons encore mal éclaircies qui ont conduit à cette opération au vu des alibis avancés et des circonstances étranges qui l’entourent. Délaisser la poursuite de leur examen augmente le risque de contresens si nous voulons décrire le nouveau paysage qui en découle et les stratégies des acteurs en présence. N’oublions pas que depuis longtemps, un « contrat » pesait sur la tête du célèbre commandant de la Force al-Qods. Mais jusqu’ici, Américains et Israéliens, tout en suivant Soleimani à la trace, s’étaient abstenus de l’éliminer (1). Il s’agissait de ne pas franchir une ligne rouge pouvant mener à un affrontement direct avec Téhéran, d’éviter de ruiner toute possibilité de négociation avec l’Iran et de se priver d’un interlocuteur de poids. En octobre 2019, Hossein Taeb, chef des services de renseignements des Gardiens, avait prétendu qu’un attentat à la bombe contre un centre religieux fréquenté par le célèbre général dans la province de Kerman avait été déjoué (2) et l’avait qualifié de complot « hébreu-arabe ». Derrière ce qualificatif, on peut plutôt imaginer des terroristes sunnites islamistes venus d’Irak, dont ce n’est pas la première incursion en Iran. D’aucuns perçoivent des ‘avertissements’ déjà lancés contre le général (dont une lettre de Pompeo qu’il déclara n’avoir jamais vue ni lue) (3), et ignorés par lui, mais ces mises en garde valent-elles certitude de déclenchement d’opération létale contre lui s’il ne se ‘soumet’ pas ? Rien n’est moins sûr.
Michel Makinsky est Directeur Général d’Ageromys International, chercheur associé IPSE, collaborateur scientifique auprès de l’Université de Liège.
Deux éléments ont joué un rôle. Le 27 décembre, un ‘contractant’ (sous-traitant) américain est tué lors d’un tir de roquettes sur une base militaire près de Kirkouk (4). Le 29, en représailles, 3 frappes américaines tuent 25 éléments du Kataeb Hezbollah stationnés loin de Kirkouk. Ceci n’a apparemment pas soldé le dossier. Selon Washington, l’Iran porte une responsabilité. Le décès d’un américain, fait mineur pour Téhéran, est une vraie ligne rouge franchie aux yeux des Etats-Unis. Dès ce stade Trump, dans la plus grande discrétion, envisage avec un très petit groupe de collaborateurs de ‘punir’ Soleimani (5). Cependant, la journaliste du New York Times Rukmini Callimachi (6) indique, au terme d’une enquête auprès d’officiels américains, que plusieurs options ont été présentées à Trump, et que l’élimination de Soleimani ne figurait pas parmi celles retenues. (Ou alors peut-être pour mémoire ?). Celle consistant à frapper des bases de la milice Kataeb Hezbollah aurait alors été choisie par le locataire de la Maison-Blanche ; de fait elle a été appliquée. Il reste que, depuis plusieurs mois (7), les ‘durs’ de l’entourage présidentiel rêvent d’éliminer le gêneur (8). Le 31 décembre, un groupe de miliciens chiites irakiens tente d’envahir et d’incendier l’ambassade américaine. C’est le pas de trop. Le cauchemar de la prise d’otages de l’ambassade américaine à Téhéran en 1979 ne peut se reproduire. En vue des prochaines élections, Trump n’a pas d’autre choix que de réagir, sa crédibilité étant érodée au Moyen-Orient par sa faible réaction après l’attaque iranienne contre l’Arabie saoudite. Mais en ciblant le chef de la Force al-Qods, n’est-il pas aveugle sur les lourdes conséquences stratégiques d’un gain tactique limité ?
Plusieurs questions jusqu’ici quelque peu négligées subsistent : les miliciens qui assiégeaient ces locaux diplomatiques ont-ils agi de leur propre chef ou sur instructions iraniennes (9) ? Dans ce dernier cas, l’initiative était-elle locale ou prise au sommet de l’Etat ? L’appareil militaire iranien est connu pour ses chaînes de commandement médiocres et son manque de coordination. Le tir de missiles (10) qui a abattu le 8 janvier un Boeing ukrainien dont tous les passagers (notamment ukrainiens, canadiens binationaux et iraniens) ont péri en offre le témoignage spectaculaire : un cumul ahurissant d’erreurs humaines et de défaillances techniques assorti d’une communication désastreuse (notamment des dénis de responsabilité (11)) qui a soulevé l’indignation de la population qui s’est empressée de la manifester (12), et un énorme embarras dans tous les échelons du pouvoir. Devant le risque de séisme politique (13) suivant cet épisode où Rohani a menacé de démissionner, ayant découvert que les Gardiens de la Révolution (pour se protéger ?) ont sciemment dissimulé au président la réalité des faits pendant plusieurs jours (14), des promesses de sanctions contre les ‘coupables’ (15) ont été lancées après une tentative d’étouffement du scandale. Mais une cohorte de conservateurs est montée au créneau pour proclamer son absolue fidélité aux défenseurs du pays ‘prêts au martyre’. La réputation des Gardiens (16), et dans une certaine mesure celle du Guide (qui a défendu ces derniers), s’en sont trouvées entachées (17), l’émotion populaire pouvant fissurer le régime (18). Pour en revenir aux débordements de l’offensive contre l’ambassade américaine, le choix du diagnostic n’est pas anodin : ce dérapage n’a pas le même sens si le ‘coup’ a été décidé au sommet de la hiérarchie ou (hypothèse plausible) par des commandants subalternes, voire par les miliciens irakiens mal contrôlés (19). Nous ne disposons pas de réponse tranchée à cette série de questions. Un premier réflexe nous inciterait à penser que l’initiative est plutôt locale car elle apparaît comme une réponse aux frappes américaines qui ont touché le 29 décembre des dépôts d’armes, centres de commandement et de coordination de la milice Kataeb Hezbollah en Irak et en Syrie. De fait, ces tirs avaient suscité un large mouvement d’indignation en Irak : le grand Ayatollah Sistani proteste contre ce qu’il considère comme une violation de la sécurité irakienne et appelle le gouvernement « à veiller à ce que l’Irak ne devienne pas un champ où se règlent les conflits régionaux et internationaux » (20). Le bureau du Premier ministre irakien renchérit en qualifiant ces frappes « d’assaut vicieux » de nature à entraîner de « dangereuses conséquences », constituant « une grave relation des règles d’action des forces de la coalition » (21). Plus intéressant, Ader Abdul-Mahdi annonce plus tard que le gouvernement irakien entend « réviser les relations » (de la coalition) en sorte de « préserver la souveraineté et la sécurité du pays » (22). Cette formulation laisse apparaître clairement que dans son esprit, c’est la pérennité de la présence des troupes américaines qui est en cause. De leur côté, Kataeb Hezbollah et l’Iran s’étaient déclarés étrangers (23) aux tirs de missiles qui avaient entraîné le décès du ‘contractor’ américain le 27 décembre. On n’est pas obligé de les croire, une telle dénégation étant sans surprise. Mais le caractère imprévu de cette mort n’est pas exclu, ce qui est autre chose. Prioritairement, c’est l’enchaînement de séquences qui suivront que nous devons examiner plus avant dans le cadre de la présente discussion.
En effet, le jour critique des funérailles des victimes des frappes américaines, mardi 31 décembre, des centaines de miliciens de Kataeb Hezbollah qui assistaient à ces célébrations convergent dans la zone verte et s’attaquent à l’enceinte de l’ambassade américaine au milieu de slogans anti-américains. Ils tentent d’incendier les locaux d’accueil mais ne peuvent pénétrer dans les bâtiments principaux. Ceci appelle quelques remarques : ils couvrent les murs de slogans tels que « Ambassade US fermée sur ordre du peuple » (24), « Mort à l’Amérique et Israël », et d’autres à la gloire de Soleimani : « Qasem Soleimani est notre chef », « L’oncle était ici » (allusion transparente au général). On note la présence de plusieurs responsables du gouvernement d’Abdul-Mahdi liés aux milices PMF et des éléments de Kataeb Hezbollah. Abu Mahdi al-Muhandis (chef adjoint des PMF qui sera abattu avec Soleimani), le chef des PMU Faleh al-Fayadh, Qais al-Kjazali, Hadi al-Amiri, Hamed al-Jazaeri, sont présents comme quelques députés du Fatah PMF. Les milices Badr, Saraya al-Khorasani, Asaib Al-Haq, sont bien visibles avec leurs drapeaux. Les manifestants des PMF prétendent rester sur place jusqu’à la fermeture de l’ambassade et le départ des troupes américaines ; ils menacent d’encercler les bases américaines dans le pays jusqu’au départ des troupes. Pendant cette première journée, les forces de maintien de l’ordre sont restées passives, au grand mécontentement de Washington. Ce n’est que le lendemain, que les ministres de l’Intérieur et de la Défense Yasin al-Yasirt et Nijah al-Shemmery donnent l’ordre de dispersion sous peine d’incarcération et mobilisent les forces de l’ordre, tandis que les militaires américains retranchés veillent à ce que les protestataires ne pénètrent pas dans les locaux ; ils ont reçu ordre de tirer seulement en cas de véritable intrusion. Ce ne fut pas nécessaire. Après quoi, Abdul al Mahdi déclare que personne n’a le droit d’attaquer une ambassade et que le devoir du gouvernement est de protéger les locaux diplomatiques. Il promet de punir sévèrement les contrevenants. Le président Bahram Salih rassure les Américains. Il reste que la faible réaction du pouvoir face à une action annoncée depuis le 31 décembre au matin, la présence de Fayadh, conseiller pour la sécurité nationale, permettent de supposer que l’opération n’était pas vraiment une surprise, mais que Mahdi était dans l’impossibilité de l’empêcher.
Selon l’enquête précitée du New York Times, c’est à ce moment que Trump s’émeut (25) de ces développements et décide d’autoriser des ripostes plus dures. Il décide de dépêcher immédiatement un contingent de marines pour assurer la sécurité des locaux diplomatiques tout en menaçant l’Iran dans un tweet : « L’Iran sera tenu pour responsable des pertes humaines ou des dommages infligés à nos installations ». Il devra « payer un très GROS PRIX ! Ce n’est pas un avertissement, c’est une menace ! » (26). Il avait mobilisé de façon impromptue quelques membres du National Security Council (27) pour le retrouver à Mar-a-Lago, d’autres le rejoindront. Dès le 31 décembre, « un mémorandum signé de Robert O’Brien, son conseiller à la sécurité nationale commence à circuler », énumérant des cibles possibles, comme une infrastructure énergétique, un navire de commandement et de contrôle des Gardiens de la Révolution. Des cibles humaines seraient même envisagées, dont Soleimani (28), mais aussi Abdul Reza Shahlai, le plus haut responsable militaire iranien au Yémen. Ce dernier a fait, selon le Washington Post, l’objet d’une tentative de liquidation (qui a échoué) le même jour que celle de Soleimani (29). Considéré comme très dangereux, ce haut gradé de la Force Qods était soupçonné d’une tentative d’assassinat contre le ministre d’Etat des Affaires étrangères de Riyad, Adel al-Jubeir (qui ne cessera de vouer une haine tenace à l’égard de l’Iran). Shalai est la bête noire des Etats-Unis. Brian Hook avait annoncé que sa tête était mise à prix $15 millions par le Département d’Etat (30). Il semble donc que c’est en regardant à la télévision la tentative d’intrusion des manifestants saccageant les points d’accès de l’ambassade que Trump prend la décision d’éliminer le chef de la Force al-Qods, une option figurant sur la liste des ripostes possibles établies par le Pentagone au titre de l’exhaustivité, mais pas nécessairement privilégiée. Le président veut éviter la répétition de l’attaque du consulat américain de Benghazi en 2011 (4 victimes américaines) pour laquelle il avait blâmé la négligence d’Hillary Clinton (31). Il veut surtout exorciser le cauchemar de la prise d’otages de l’ambassade des Etats-Unis à Téhéran en 1979.
Au total, une certaine confusion persiste sur le déroulement précis de cette séquence fatale avec des signaux contradictoires de préparatifs et d’opportunités promptement saisies avec une urgence sanguine de réaction pour restaurer une crédibilité écornée dans une perspective électorale. Cet épisode illustre aussi la dérive institutionnelle de la Maison-Blanche : le National Security Council ne joue plus son rôle de préparation des décisions présidentielles avec le concours des différentes administrations, agences et experts. En lieu et place, un très petit noyau de ‘durs’ préempte les orientations à suivre, dont la radicalité ne cache même plus l’improvisation qui convient fort bien au chef de l’Etat.
Ces détails, qui ne sont pas qu’anecdotiques, nous donnent quelques éléments d’appréciation par rapport aux questions posées ci-dessus. Ils révèlent que ce déploiement de militants agités ne présentait pas un niveau de préparation logistique attestant une véritable planification de l’invasion de cette ambassade. On voit des manifestants électrisés se déchaîner mais ne pas mettre en œuvre tous les moyens nécessaires à l’invasion des locaux diplomatiques (32). La négligence des autorités irakiennes pour y mettre un terme rapide conforte cette intuition. On peut donc penser que nous sommes en présence d’une initiative locale qui a dérapé (33). Elle n’exclut pas un encouragement prodigué par des échelons locaux des pasdarans. Les slogans à la gloire du glorieux général pourraient en être un des symptômes. La revendication exigeant le départ des troupes américaines suffit-elle à indiquer que ce mouvement est organisé et piloté par Téhéran ? Ceci nous semble aller vite en besogne. Il n’y a pas de signe d’organisation résolue, mais plutôt d’une convergence : l’Iran, de façon de plus en plus affichée, veut obtenir le retrait américain d’Irak, ce qui serait une victoire considérable ; les milices encadrées par Soleimani et al-Qods ont le même objectif. Mais cette visée dépasse de loin les seuls alliés de la République islamique, elle est désormais présente aussi chez les chiites irakiens jusqu’ici hostiles à l’Iran (l’impétueux jeune religieux Sadr est de longue date viscéralement hostile aux Américains). Les Irakiens qui ont massivement manifesté en automne (34) contre la corruption et l’incapacité de toute la classe politique, contre la mainmise de l’Iran sur le pays, la dictature des segmentations religieuses, et réclamé un gouvernement démocratique, technocratique, avec le retour d’un sentiment national trans-religieux, trans-tribal, n’ont pas d’autre choix que de demander eux aussi le départ des Américains même s’ils enragent de voir les pro-Iraniens et leurs milices confisquer leur soulèvement.
A l’inverse, le choix de la cible hautement symbolique de l’ambassade américaine ne rend pas cette interprétation de l’initiative locale (sous ses deux variantes) totalement convaincante, mais ne l’exclut pas. Attribuer l’origine de cette tentative de saccage à une décision de la direction des Gardiens, voire au Guide lui-même (avec l’aval du Conseil Suprême de la Sécurité Nationale) ne peut être écarté mais ne repose pas sur des éléments probants. En revanche, deux types d’indices permettent d’imaginer une implication de l’Iran dont l’ampleur reste à démontrer et surtout le niveau dans l’appareil de décision du régime à établir. Au début du mois d’octobre, selon Radio Farda, le media ultra Kayhan, souvent considéré comme reflétant les positions du Guide, et dont Hossein Shariatmadari, son très ‘dur’ rédacteur en chef est le représentant de ce dernier dans ce support, publie à l’occasion des troubles qui se répandent en Irak un éditorial où il dénonce les ambassades américaines qui « sont partout le point focal des complots » (35) et invite la jeunesse iranienne « à mettre un terme à la présence de l’ambassade US à Bagdad ». Il ajoute : « la saisie de l’ambassade US à Téhéran a eu de multiples avantages pour l’Iran islamique. Pourquoi les jeunes révolutionnaires irakiens devraient-ils priver leur pays de tels avantages ? »
Rétrospectivement, cet appel clair prend une signification intéressante. Ceci veut-il dire que le Guide aurait décidé ou approuvé pareille opération ? Ce n’est pas certain. En effet, Shariatmadari avait déjà pris des positions plus extrémistes, expéditives, voire irresponsables qui ne sont pas celles de Khamenei, qui lui ont valu d’être ‘recadré’ car il faisait office de gêneur. S’il est donc loisible de songer à une impulsion venue d’Iran, elle peut venir d’autres acteurs du régime, comme certains chefs des Gardiens de la Révolution plus idéologisés que d’autres. On peut aussi songer à des agents appartenant aux bassiji ou à des services ‘parallèles’, comme certains nervis qu’on appelle ‘éléments incontrôlés’ dans le jargon habituel. On pense aussi à divers miliciens, ou à des éléments aux affiliations mal définies qui agissent pour le compte de quelques ultras, dont certains religieux qui disposent d’étudiants ‘musclés’ que l’on a déjà vu faire des ‘coups’.
Mais la question centrale est la mise en cause directe du général Soleimani par l’exécutif américain qui prétend que le chef de la Force al-Qods préparait personnellement et activement des attaques imminentes (cette qualification, comme on le verra, est au cœur des interrogations majeures d’une part sur la responsabilité de Soleimani mais aussi sur les raisons de son arrivée à Bagdad qui lui a coûté la vie) contre des cibles américaines en Irak, personnes physiques et objectifs matériels (dont des sites civils et militaires, en particulier l’ambassade dans la capitale irakienne, ce dernier objectif étant l’enjeu principal des débats à ce sujet). Il y a en effet une coïncidence troublante entre les injonctions de Shariatmadari dans son éditorial de Kayhan en octobre 2019 et les révélations d’origine américaine développées dans une analyse publiée par Reuters le 4 janvier (36). Selon cette source, à mi-octobre, une réunion se serait tenue à Bagdad sous la direction de Soleimani qui aurait enjoint à Abu Mahdi al-Muhandis et aux autres chefs de milices présents à cette rencontre, d’intensifier des attaques contre des cibles américaines dans le pays, en utilisant de nouvelles armes ‘sophistiquées’ fournies par l’Iran. Les mêmes analystes rapportent que 2 semaines avant ce conciliabule, Soleimani aurait demandé aux Gardiens de la Révolution d’acheminer des missiles Katiouchka et des missiles sol-air portatifs susceptibles d’abattre des hélicoptères et de frapper des bases américaines. Le général aurait demandé à Kataeb Hezbollah de préparer un plan de mise en place d’un groupe discret à cet effet. Reuters rapporte les propos de ‘responsables’ américains indiquant que les services de renseignement estimaient que Soleimani était impliqué dans des préparatifs avancés de frappes contre des Américains dans de multiples pays y compris l’Irak, la Syrie, le Liban. Kataeb Hezbollah aurait été retenu comme intervenant principal en raison de sa capacité à utiliser des drones (hors d’atteinte des radars américains) pour guider les missiles Katiouchka. De fait, depuis l’élimination de Soleimani, des tirs de Katiouchkas ont été opérés contre des objectifs américains à Bagdad.
Ce rapprochement est instructif mais n’apporte pas de preuve du pilotage personnel effectif par Soleimani d’une attaque imminente contre l’objectif spécifique hautement sensible qu’est l’ambassade américaine à Bagdad. Que le général iranien ait fortement encouragé et aidé des milices comme Kataeb Hezbollah à monter des frappes contre des bases militaires américaines pour exercer des pressions sur Washington comme sur le gouvernement irakien afin de les persuader d’un retrait des troupes américaines d’Irak est plus que probable. Une sorte de harcèlement pour faire ‘craquer’ Trump pour qu’il se dégage d’un bourbier qui ne contente pas ses électeurs. Mais ceci ne permet pas de valider le prétexte qui est avancé par Trump, Pompeo et divers milieux sécuritaires américains pour éliminer le chef d’al-Qods : la perspective d’une attaque imminente (un détail critique) contre l’ambassade américaine. Or, c’est ce refrain qui est utilisé ad nauseam dans les communications officielles comme ‘off’. Or, plus le temps avance, moins l’argument est convaincant. Non seulement journalistes, mais analystes, experts, et surtout membres du Congrès ne cachent pas leurs doutes sur ce qui apparaît de plus en plus comme un alibi.
Dès le 3 janvier, dans son communiqué triomphal, Trump annonce avoir ordonné la suppression du ‘terroriste numéro un dans le monde‘ à qui il reproche d’innombrables atrocités et victimes et justifie cet acte décisif « pour arrêter une guerre » et non pas pour en déclencher une et va jusqu’à prétendre que les Etats-Unis ne cherchent pas un changement de régime. Il avance comme motif de cette opération urgente :
« Soleimani était en train de comploter des attaques imminentes et sinistres contre des diplomates et du personnel militaire américains, mais nous l’avons pris sur le fait » (37). A cette occasion, il accuse Soleimani d’avoir dirigé ‘l’assaut’ contre l’ambassade américaine de Bagdad. Même s’il ne faut pas tirer de conclusions abusives du vocabulaire (fluctuant) des déclarations successives du locataire de la Maison-Blanche, nous remarquons que le cœur de l’argumentation repose sur les éléments suivants : 1) Soleimani dirige personnellement des préparatifs contre des personnes physiques comme contre des biens ou installations des Etats-Unis ; 2) et surtout des attaques étaient imminentes ; 3) dans cette déclaration, Trump identifie les diplomates et militaires comme cibles visées, mais ici ne dit pas expressément que l’ambassade elle-même était menacée à très court terme. C’est une nuance intéressante, car attaquer, voire tuer des diplomates, est plus simple que d’envahir une ambassade gardée par des militaires bien armés. L’essentiel de l’accusation est le caractère imminent d’une action violente pilotée par le chef d’al-Qods en personne. Ce ‘refrain’ va être brandi sans fin par le chef de l’Etat, et sera repris par son entourage et d’autres parties prenantes de l’exécutif.
D’un côté cette justification d’une attaque ‘imminente’ contre l’ambassade américaine est l’axe principal de la justification de l’élimination de Soleimani, mais de l’autre l’utilisation caricaturale de cet alibi et les contradictions rapidement affichées chez les supporteurs de cette option en ont considérablement altéré la crédibilité. Dans un communiqué daté du 2 janvier 2020, le Pentagone annonce que sous la direction du président, l’appareil militaire américain a décidé, pour « protéger les personnels américains à l’extérieur, de tuer Qasem Soleimani ». Tout en reprochant à ce dernier la responsabilité de centaines de morts américains, le communiqué indique que le général « était activement en train de développer des plans pour attaquer des diplomates et militaires américains en Irak et dans la région » (38). Cette rédaction est assez remarquablement vague aussi bien sur la proximité immédiate d’une action et sur la localisation et la nature de la cible. Elle ne désigne pas nommément l’ambassade des Etats-Unis à Bagdad. Or la gravité de l’opération justifiait largement que l’exécutif produise des justificatifs précis sur son déclenchement. Le contraste entre le caractère flou des déclarations du Pentagone (qui, comme nous l’indiquons plus loin, va prudemment se distancier subtilement de Trump et de Pompeo) et les allégations catégoriques de ces derniers est significatif. Bien plus, le communiqué d’Esper ne fait aucune allusion à l’implication directe de l’Iran ni de Soleimani dans le mouvement contre l’ambassade. Celui-ci a été lancé « à l’instigation de milices chiites », et le Secrétaire d’Etat dénonce l’implication de « milices chiites soutenues par l’Iran » car des dirigeants importants de ces dernières ont été repérés dans la foule, revêtus de leurs uniformes et portant les drapeaux de leurs milices » (39). On est très loin d’une quelconque opération organisée et pilotée par l’Iran et Soleimani en personne.
Le président américain se cramponne à sa ligne, alors qu’un scepticisme se répand tant dans la presse américaine que chez nombre d’élus au Congrès. Ces derniers s’inquiètent des conséquences possibles de ce coup violent porté à l’Iran, de nature à exposer l’Amérique, ses installations, ses militaires et diplomates à des représailles, au vu des déclarations des responsables civils et militaires iraniens. Ils (surtout les démocrates) s’irritent de ce que l’exécutif ne produise pas au cours des séances confidentielles des éléments probants de la part des services de renseignements attestant que Soleimani préparait une attaque imminente contre l’ambassade. Non seulement Trump n’en démord pas mais ajoute des détails qui paraissent vite imaginaires. Le 10 janvier, dans une interview par Laura Ingraham sur la chaîne Fox News, il répond à une question sur les cibles envisagées par le général Soleimani : « Nous vous dirons que probablement ce devait être l’ambassade à Bagdad », et aiguillonné par la journaliste, il assène : « Je peux révéler que je crois qu’il aurait été probablement question de quatre ambassades » (40). La veille, Trump avait été plus confus : les Etats-Unis ont éliminé Soleimani parce « qu’ils cherchaient à faire sauter notre ambassade ». Mike Pompeo est à l’unisson. Le 10 janvier, les journalistes le pressent de questions sur les motifs de l’opération et le challengent frontalement sur ce qu’il entend par ‘imminent’ quand il brandit le spectre de frappes ‘imminentes’. Contre toute vraisemblance, le secrétaire d’Etat ne se démonte pas et proclame d’un ton qu’il croit sans réplique : « Nous avions des informations spécifiques sur une menace imminente et ce faisceau de menaces incluait des attaques contre des ambassades américaines. Point. Point final » (41). A plusieurs reprises, Pompeo, assailli par des journalistes de plus en plus dubitatifs, se tient à son alibi, mais de façon de plus en plus maladroite : il tente de dire qu’il ne savait pas « à quelle minute » Soleimani passerait à l’action mais : « Soleimani lui-même était en train de comploter de vastes attaques, à large échelle contre des intérêts américains. Et ces attaques étaient imminentes ». Il en profite pour démentir que les ripostes iraniennes à l’élimination, qui ont frappé des installations américaines, n’étaient pas destinées à tuer des Américains. Nous reviendrons plus loin sur ce fort important détail. Le 7 janvier, Pompeo évite soigneusement d’utiliser le mot ‘imminent’.
Le 12 janvier, le secrétaire d’Etat à la Défense, Mark Esper, contredit le chef de l’exécutif dans une interview à CBS news : « Ce que le président disait, c’est qu’il pourrait probablement y avoir d’autres attaques contre les ambassades. Je partageais cet avis » (42). Il ajoute : « Le président n’a pas cité d’élément de preuve particulier ». Pressé de questions sur le point de savoir si des responsables de services de renseignements ont présenté un élément de preuve concret sur ce point, il concède candidement : « Je n’en ai pas vu concernant quatre ambassades ». Et sur CNN, il indique qu’il croyait que Soleimani était à « quelques jours » de lancer une attaque contre des installations américaines quand il a été tué par drone le 3 janvier.
Autrement dit, Esper croit à la possibilité d’attaques à délai peu éloigné (43), il affiche une incertitude sur les cibles, comme sur l’imminence. Il est inutile de dire combien ces contradictions et ce flou ont inquiété un certain nombre de congressmen, pas seulement démocrates, ces derniers s’élevant plus bruyamment contre ce dangereux brouillard. Esper prétend ensuite sur CNN avoir du « superbe renseignement » montrant qu’une vaste attaque contre de multiples ambassades était probable mais qu’il ne pourrait être partagé qu’avec le « Gang des Huit » (un petit groupe d’importants élus qui sont chapitrés sur des données sensibles auxquelles le reste du Congrès n’a pas accès). Dans la foulée, Robert O’Brien (selon Reuters) vante aussi ce « magnifique renseignement » attestant qu’une menace était ‘imminente’ mais se refuse d’élaborer sur les preuves du ciblage de quatre ambassades. Or, cette assurance n’est aucunement partagée par ces élus « privilégiés ». Le démocrate Adam Schiif, président de la commission du Renseignement de la Chambre, et membre du fameux « Gang des Huit », enfonce le clou et affirme que ledit groupe n’avait pas été informé de possibles attaques sur quatre ambassades. Le républicain Mike Lee, gêné (44), dit qu’il s’inquiète de l’intégrité des informations transmises au Congrès par le président et les conseillers en sécurité. Il dit croire les affirmations de ces derniers affirmant l’imminence d’une attaque mais regrette de n’avoir reçu que des indications générales (45). Selon CNN, le Département d’Etat avait envoyé une mise en garde générale avant l’opération qui a liquidé Soleimani mais elle ne visait pas d’ambassade en particulier, et ne prévenait pas d’une attaque imminente (46). Bill Barr, Procureur général, révèle pour sa part que le DOJ (Département de la Justice), avait été consulté sur la licéité de l’élimination de Soleimani, et y avait donné son accord si les attaques contre des Américains étaient imminentes. Le prétexte ayant été miné par le président lui-même, le procureur fonde désormais sa légalité en alléguant que Soleimani devait être supprimé pour dissuader d’autres, en vertu de l’AUMF 2002 (un texte qui a servi à la disparition de Saddam Hussein au motif de son prétendu arsenal d’armes de destructions massives) (47). C’est cette ligne que rejoint Pompeo dans un discours au Hoover Institute de l’Université Stanford en déclarant que l’exécutif a voulu prévenir des attaques ourdies par le général ; il va jusqu’à élargir la portée de l’action en la présentant comme reflétant une stratégie de « vraie dissuasion » contre l’Iran, vantant la position de force désormais affichée par l’Amérique. Cette posture n’est pas limitée à l’Iran mais vaut aussi à l’égard de la Russie (cf Ukraine) et de la Chine (exercices américains en mer de Chine du Sud) (48).
De son côté, Trump rétorque vertement aux critiques des journaux, des élus démocrates, et aux doutes de certains républicains dans un tweet rageur doté d’une coquille sur le mot imminent : « Les media Fausses Nouvelles et leurs partenaires Démocrates travaillent dur pour déterminer si la future attaque par le terroriste Soleimani était ‘éminente’ ou pas et si mon équipe était d’accord. La réponse est un OUI fort, mais ce n’est pas vraiment important en raison de son horrible passé ». Le nouvel alibi maladroitement avancé révèle sa faiblesse car à présent les victimes du général sont la justification de son élimination (49). L’exécutif ne peut plus cacher son inconfort car même chez les républicains, la solidarité politique n’est pas sans malaise parmi les plus avisés. Du coup, l’exécutif annule 4 auditions devant les élus : celles de Pompeo, Brian Hook, David Schenker et d’un officiel du Département d’Etat alors que le Pentagone et le FBI se décommandent pareillement devant d’autres commissions. La cacophonie a fait des dégâts (50).
Pourquoi Soleimani, se sachant menacé, a-t-il pris le risque de se rendre par avion de ligne en Irak et de partir en convoi à découvert (51) ? Selon Reuters, les Américains sont persuadés de ce que le général et les milices préparaient des attaques avec du matériel ‘sophistiqué’ (52) contre des cibles (hommes et installations) américaines, ce qui justifierait une intervention. Bien que ce scénario soit attesté par d’autres observateurs, certains experts restent dubitatifs quant à cet alibi et estiment que Trump a d’abord voulu rester crédible auprès de ses électeurs. Il est indispensable que la Maison- Blanche présente au Congrès impatient des preuves solides de ces préparatifs. L’enjeu est important : s’ils sont avérés, ceci signifie que Téhéran, fort du nouveau rapport de forces régional après les frappes sur l’Arabie saoudite, décide de défier directement l’Amérique. Une nouvelle escalade, au moins tactique. Peut-être une erreur de calcul ? Inversement, si rien de tel ne couvait, l’arrivée de Soleimani pourrait refléter un impératif urgent dont les contours ne sont pas clairs. On se souvient, lors des manifestations en Irak, de l’intervention rapide et musclée de la Force al-Qods sous la direction de Soleimani qui n’avait pas hésité à agir par-dessus la tête des responsables irakiens, ce qui a ajouté au sentiment anti-iranien croissant dans le pays (une erreur tactique). Des rumeurs laissaient entendre que des bureaux de milices soutenues par l’Iran étaient attaqués par des acteurs inconnus. Une situation très dangereuse, pour Soleimani. Lors de cet épisode, il était protégé par ses propres effectifs. Pourquoi est-il promptement revenu en Irak sans protection sérieuse (il s’y rend en avion de ligne, son cortège ne comporte pas de dispositif ‘lourd’ terrestre ni aérien) ? A-t-il été trahi par une dénonciation provenant d’adversaires (53) au sein même du régime iranien ? Y avait-il une urgence particulière au-delà de venir peser sur la désignation du successeur de l’actuel Premier ministre ? Croyait-il en sa baraka ? Pensait-il que personne ne tenterait de franchir une ligne rouge et n’oserait le neutraliser ?
Le Premier ministre irakien, le 5 janvier, a indiqué au Parlement, en présentant une motion demandant le retrait des forces américaines, que Soleimani était invité en Irak pour apporter une réponse iranienne à une proposition saoudienne de négocier une diminution des tensions (54) et que Trump avait même demandé à l’Irak son aide après l’attaque de l’ambassade (55). Si c’est exact, le général se serait cru à l’abri. Et en ce cas, son élimination est-elle une volte-face ou un piège du président américain (56) ? Tuer Soleimani dans ces circonstances paraît en effet paradoxal. Mais Trump n’est pas à une contradiction près et le caractère précipité de sa décision tend à privilégier l’hypothèse d’une absence de réflexion stratégique (57). Pompeo n’a pas hésité à ironiser sur cette pseudo-démarche diplomatique qu’il considère comme imaginaire et à contredire les Saoudiens sur ce point (58). Riyad (très inquiet) n’ayant pas été consulté avant cette neutralisation, lance un appel au calme (alors que les media et sites saoudiens exultent), et sonde précipitamment Washington (59). Si l’affirmation brutale de la force américaine contre l’Iran rassure un peu le royaume sur l’engagement des Etats-Unis, elle fragilise la timide esquisse de diminution des tensions initiée par la monarchie (60) qui se sait exposée en cas de ripostes iraniennes. Le locataire de la Maison-Blanche a-t-il voulu anéantir un compromis irano-saoudien ? Le 4 février, l’ambassadeur de Téhéran en Irak a rappelé la raison de la présence de Soleimani à Bagdad et réaffirmé la volonté de l’Iran de résoudre ses différends avec le royaume (61) et les Emirats arabes unis « aussi vite que possible » (62). Or, le 17 décembre une réunion secrète s’était tenue à la Maison-Blanche où des responsables américains, israéliens, émiratis ont discuté de la coordination de leur politique contre l’Iran et de la possibilité « d’un pacte de non-agression Emirats arabes unis-Israel » (63). De même, le refus d’Israël de donner suite à la proposition du défunt sultan Qabous d’organiser des conversations secrètes avec Tel-Aviv est significatif. La question de la place de ce mobile est donc posée mais la précipitation de l’opération létale reflète plutôt une opportunité dont les conséquences sont négligées.
Les réactions de la communauté internationale, au-delà de la sidération devant ce séisme spectaculaire dont chacun perçoit qu’il provoquera des bouleversements et répliques inquiétants et encore difficiles à anticiper, couvrent toute la palette des postures possibles. Entre ceux qui condamnent vertement ce qui est assimilé à un terrorisme d’Etat et ceux qui se réjouissent du départ de celui qu’ils considèrent comme un dangereux déstabilisateur au service d’ambitions hégémoniques, on retrouve toutes les attitudes intermédiaires (64). Moscou condamne très vigoureusement l’opération, Vladimir Poutine et Emmanuel Macron « regrettant qu’elle n’aggrave la situation dans la région ». Pour autant, le Kremlin évite prudemment de dire ce que la Russie va faire concrètement. On peut imaginer que celle-ci va accroître ses fournitures d’armes (65) (Moscou espère que l’accord nucléaire sera préservé a minima afin d’atteindre l’échéance de la fin de l’embargo sur les ventes d’armes en octobre 2020 et pareillement Rohani s’efforce de persuader le Guide et les Gardiens de la Révolution de faire de même (66) en dépit de leur envie de se retirer du JCPOA). Mais cette nouvelle situation embarrasse grandement Poutine (67) qui d’un côté apprécie de renforcer sa coopération et ses échanges avec l’Iran, mais de l’autre veut éviter de se trouver en quasi-conflit avec Trump. Il invite les parties au calme (68). Le caractère déstabilisant de l’initiative américaine dans un Moyen-Orient volatil encourage la Russie à dissuader les parties prenantes de réagir par la violence ou la force et à profiter de cette occasion pour proposer ses services de ‘partenaire’ fiable aux dirigeants de la région. D’ailleurs, plusieurs parlementaires irakiens ont confirmé que des conversations sont en cours (69) entre Moscou et Bagdad pour envisager l’acquisition de systèmes russes anti-missiles AS 400 (70). Cette lointaine et théorique éventualité qui se heurtera à une opposition radicale de Washington a surtout valeur de message.
La Chine a également condamné tout recours à la force, Pékin, soucieux de stabilité et de préserver ses approvisionnements énergétiques comme sa sécurité, évite de faire passer ses critiques de l’aventurisme américain pour un soutien inconditionnel à Téhéran, tout en affichant son intérêt pour les pôles régionaux de sécurité. Ainsi, par coïncidence, c’est le 31 décembre que s’est déroulé le premier exercice naval tripartite Chine, Russie, Iran que Téhéran a célébré comme un partenariat stratégique tandis que Pékin le décrit sobrement comme ‘coopération normale’ (71). Dans le même esprit, les Etats-Unis ont accusé ces deux contradicteurs d’avoir bloqué une déclaration du Conseil de Sécurité des Nations unies soulignant l’inviolabilité des locaux diplomatiques et consulaires ; les deux mis en cause ont répliqué que pareil communiqué aurait dû évoquer les éléments qui ont suivi (72) (= l’opération contre le général).
De son côté, le Pakistan inquiet (73) a renouvelé son offre de médiation entre Téhéran et Riyad, et les Etats-Unis. La Turquie voit son paysage stratégique changer et doit évaluer les conséquences de ce séisme (74) qui lui imposera des choix. Erdogan désapprouve la suppression du général mais ne veut pas se laisser attirer par l’Iran dans une « croisade » anti-Washington avec qui une très délicate partie est engagée sur le rapprochement turco-russe, avec en particulier les choix d’Ankara sur l’AS 400 et les gazoducs. La nouvelle situation va aussi peser sur le processus d’Astana, l’équilibre compliqué entre la Russie et l’Iran en Syrie et en Irak, la question kurde étant centrale.
L’Union européenne appelle à la retenue (75) ; on perçoit qu’il y a des différences entre les Européens. Certains affichent la volonté de ne pas désavouer Washington : Dominic Raab, ministre britannique des Affaires étrangères, invite « toutes les parties à la désescalade » mais se sent obligé de reconnaître « la menace agressive » que représente la Force Qods sous la direction de Soleimani. Bien plus, il affirme que le Royaume-Uni « comprend la position des Etats-Unis » de tuer Soleimani et que l’Amérique « a le droit de se défendre » (76). Selon les mêmes sources, Pompeo aurait contacté Raab pour lui exprimer sa gratitude pour la position ainsi adoptée par « nos alliés ». La proximité de Londres et Washington n’est pas étonnante. Plus curieusement, les 3 Européens signataires de l’accord nucléaire se bornent à critiquer le ‘rôle négatif’ de l’Iran, d’al-Qods et de Soleimani tout en affichant une préoccupation minimaliste pour l’autre ‘victime’, l’Irak. Le communiqué (77) des EU3 (Allemagne, France, Angleterre) dont la rédaction a dû être quelque peu laborieuse, laisse perplexe. En effet, il ne condamne aucunement, même de façon allusive, l’acte commis par Trump et met en garde l’Iran contre toute tentation d’escalade, d’action violente, et en profite pour inviter fermement Téhéran à annuler toutes les mesures jugées incompatibles avec le JCPOA. Cette rédaction présente l’apparence d’un alignement sur la position américaine et risque fort de priver la France (qui a dû jouer un rôle moteur (78)) et ses deux partenaires dans son élaboration du statut de ‘neutralité’ que ce trio pourrait rêver de jouer. Ce suivisme est trop évident pour qu’il ne suscite pas une défiance tant à l’égard de la France que de ses deux partenaires (79). On pourrait imaginer sans difficulté que la France et ces derniers ont peut-être tenté de faire passer de discrets et très officieux messages d’apaisement aux dirigeants iraniens pour leur expliquer qu’ils leur sont fidèles dans cette nouvelle épreuve et restent très attachés au JCPOA et n’hésitent pas dans les faits à de distancier de l’Amérique. Certes, mais dans les divers cercles et lieux de décision iraniens, la conviction est sans doute faite qu’en dépit des déclarations de bonne volonté, les Européens sont incapables d’assurer leur propre part de l’exécution de l’accord nucléaire et finalement n’oseront pas braver l’Amérique. Les dirigeants iraniens n’hésitent pas à considérer l’Europe comme à la traîne des Etats-Unis (80). Pareillement, l’absence de condamnation explicite de la mort de Soleimani risque de priver la France qui multipliait les démarches diplomatiques en direction de Bagdad, encourageait les entreprises à s’engager dans ce pays, du crédit dont elle dispose. Les grands groupes industriels français sont d’ailleurs restés prudents sur ce marché (à l’exception peut-être du secteur de l’armement ?) en raison du principal risque politique au-delà des problèmes sécuritaires : l’absence d’Etat (un système milicien a succédé à l’Etat irakien détruit par les Etats-Unis en même temps que l’appareil baasiste et sans réintégrer les tribus sunnites).
Evaluer les multiples conséquences de la suppression du ‘héro national’ iranien est malaisé. Celui-ci était bien plus que le patron des forces spéciales qui ne se souciait guère de hiérarchie, ne rendant compte qu’à Khamenei, ce qui causait quelques agacements. C’était un stratège, un diplomate (non conventionnel), un ‘faiseur’ de rois (ministres) en tout cas en Irak (82). Dès l’annonce du décès du général, le Guide lui nomme comme successeur Ismail Qaani, jusque-là adjoint du chef de la Force Qods. La célérité de cette désignation vise à convaincre que rien ne changera et que cette unité poursuivra ses missions comme auparavant (83). Qaani, qui ne jouit pas du même charisme ni du prestige que son prédécesseur, est un ‘dur’ qui n’hésite pas à se prononcer aussi sur la vie politique interne. Il contestera sans doute Rohani et la ligne gouvernementale avec peu de souplesse. Nous ignorons quels sont et seront ses rapports avec Ali Larijani (conservateur mais pragmatique), et encore moins avec Shamkhani. Celui-ci aura plus de difficulté à le tempérer. Par rapport à son prédécesseur, il pourra moins aisément adopter la posture ‘d’électron libre’ et ne s’écartera pas des consignes du Guide. Il est trop tôt pour supputer la qualité de ses rapports avec les autres éléments des Gardiens, et encore moins avec l’armée ‘classique’ artesh. Il ne paraît pas doté d’une vision stratégique d’ampleur, mais assurément d’une poigne de fer (84). On ne l’imagine pas endosser l’habit ‘diplomatique’ de Soleimani ; son atout est de bénéficier de la confiance du Guide. Cette nomination implique des changements de titulaires d’autres postes (85). Ainsi, le général Muhammad Hussein-Zada Hejazi, qui commandait la Force Qods au Liban, est nommé adjoint du général Qaani. Il avait précédemment réorganisé les bassiji en profondeur (86).
Si le principe de ripostes iraniennes ne fait aucun doute, elles seront soigneusement pesées en sorte d’en maximiser la portée et d’en minimiser les risques. Si Trump a déclaré ne pas vouloir de guerre avec l’Iran, tout en renforçant d’un contingent de 3.500 hommes les troupes présentes au Moyen-Orient pour protéger les installations et effectifs contre des représailles au prix d’une escalade, Téhéran n’en veut pas davantage, mais dit vouloir châtier les impudents « au bon moment » et au « bon endroit » (87). Cette position adoptée par le Conseil Suprême de la Sécurité Nationale, exceptionnellement présidé par le Guide, est intéressante. Les pressions des durs du régime, notamment chez les Gardiens de la Révolution, sont fortes pour exiger des actions punitives spectaculaires telles que l’élimination de très hauts responsables militaires et civils américains, ou d’attaques dévastatrices sur des cibles de l’armée ; mais il semble qu’après un temps de délibération, une vision plus stratégique et réaliste a prévalu. Visiblement, la République islamique perçoit que l’Iran a beaucoup à perdre d’une escalade incontrôlée. Probablement, le très avisé amiral Ali Shamkhani a convaincu les généraux les plus incandescents au sein du Conseil Suprême de la Sécurité Nationale, et surtout le Guide, de se doter de cartes plus efficaces et sophistiquées. Devant l’énorme indignation populaire (les obsèques du défunt ont donné lieu à des défilés massifs de plusieurs centaines de milliers de personnes (88)) qui traverse non seulement toutes les couches de la société, mais aussi l’ensemble de l’échiquier politique, les réformateurs (89), comme Rohani, sont obligés de faire chorus et de dénoncer l’élimination de Soleimani et promettre une revanche (90) au nom de l’unité et de la fierté nationale.
L’effervescence est telle que nos sources iraniennes personnelles étaient convaincues de ce que des représailles contre de cibles hautement symboliques telles que des personnalités américaines civiles ou militaires de très haut rang seront lancées à très bref délai. Une émotion unanimiste dont l’ampleur a peut-être été sous-estimée en Occident. Si des actions sont probables par des milices contrôlées par l’Iran, en Irak et dans la péninsule Arabique, sans oublier le Hezbollah libanais (91) qui pourrait avoir un rôle central de coordination (92) le cas échéant contre des personnels civils et militaires américains, elles seront finement dosées. Il s’agit de créer un sentiment d’insécurité par des opérations sur divers terrains, alimenté par une ‘guerre de messages’, un exercice, certes dangereux par ses risques d’erreurs de perception et de dérapages. Une figure emblématique de l’appel à la vengeance se dégage : Zeinab Soleimani, la fille du ‘martyr’ qui presse le Hezbollah d’agir (93). Le général Esmail Qaani qui aura la lourde tâche de préserver l’héritage stratégique régional du ‘héros martyr’, qui n’est pas exempt de ‘loupés’, et d’afficher une résolution convaincante pour la ‘vengeance’ promise (94), évoque (prudemment) dans une interview télévisée « certaines actions » (95). Hossein Dehghan, conseiller militaire de Khameneï (qui lui-même avait crié vengeance), prévient qu’il y aura certainement des ripostes contre des personnels et sites militaires, et que « l’Amérique recevra l’équivalent de la mort de Soleimani » (96) tout en répétant que le Guide ne veut pas la guerre. Le général Amir Ali Hajizadeh, commandant les forces aériennes des Gardiens, prévient : « la vengeance du martyr Soleimani ne prendra pas fin en lançant quatre missiles ou en ciblant une base militaire US ou même en tuant Trump ; aucune de ces représailles n’a la même valeur que le sang de ce martyr » (97). Il ajoute que la seule chose qui puisse compenser cette perte est « la complète disparition de l’Amérique dans la région ». Derrière les menaces qui se veulent d’autant plus redoutables qu’elles pourraient ne pas être prioritairement inscrites dans le court terme, apparaît le véritable objectif militaro-politique de l’Iran : pousser les Etats-Unis hors de la région. Une visée qui va devenir un leitmotiv, comme on le voit : le chef des pasdarans, le général Salami, brandit une « revanche stratégique » qui mettra un terme définitif à la présence américaine dans la région : « l’assassinat de Soleimani est le début de la fin de la présence US dans la région » (98). Le général Abuhamzeh évoque de possibles attaques de navires dans le Golfe et va plus loin : « 35 cibles américaines vitales ont été identifiées dans la région et Tel Aviv est à (notre) portée » (99). Il rappelle que « le détroit d’Ormuz est un passage (maritime) vital pour l’Occident et qu’un vaste nombre de destroyers et bâtiments de guerre américains traverse le détroit d’Ormuz, la mer d’Oman et le golfe Persique ».
Ces propos déclenchent une réaction apocalyptique de Trump qui menace : en cas d’attaque contre tout Américain, tout bien américain, il frappera très vite et très dur des cibles de haute importance pour l’Iran et sa culture, 52 objectifs potentiels « représentant les 52 otages américains » (100). Un symbole… électoral (101). Il ajoute que ce tweet remplit suffisamment l’obligation d’information du Congrès. Les démocrates s’indignent. L’émotion est forte en Iran (et ailleurs). Mohsen Rezayee, secrétaire du Conseil du Discernement, et officier pasdaran, fulmine : Téhéran rasera Tel Aviv et Haïfa en cas de riposte américaine (102). Il avait déjà soutenu qu’Israël avait fourni des renseignements sur le vol emprunté par Soleimani. Paradoxalement, le général Pourdastan, chef du centre d’études stratégiques des Gardiens, a prétendu que Washington aurait demandé à 16 pays de prier l’Iran de limiter raisonnablement sa riposte (103). Pompeo, de son côté, a répété que l’Amérique ne veut pas la guerre tout en justifiant l’élimination. Le 7 janvier, le Parlement iranien décide d’allouer d’ici la fin mars € 200 millions tirés du Fonds National du Développement à la Force al-Qods, et vote une loi désignant comme terroristes le Pentagone et les forces armées américaines devenues en bloc cibles potentielles (104). Le Conseil Suprême de la Sécurité Nationale a sélectionné plusieurs scénarios, mais c’est au Guide qu’appartient la décision. Chez certains officiers des Gardiens, la tentation de frapper ‘dur’ reste bien ancrée mais le Général Vahidi, président de l’Université Nationale de Défense, tempère (relativement) : l’Iran ne cherche pas la guerre mais se réserve le droit… de se venger (105). Le 6 janvier, le Pentagone envoie 6 bombardiers B-52 sur la base militaire de Diego Garcia au cas où une action militaire contre l’Iran serait décidée (106). Par précaution, la coalition aurait déplacé son centre de commandement d’Irak vers le Koweït (107).
Malgré tout, les marges de manœuvre du Guide connaissent des limites liées à la situation intérieure. Même si l’unité nationale impose de faire bloc autour des ‘valeureux défenseurs de la patrie‘, il ne faut pas oublier que le vif mécontentement populaire vise aussi, comme les manifestations passées l’ont illustré, à contester le poids des engagements militaires iraniens dans la région et les abus impunis des pasdarans dans le pays. L’épisode du boeing abattu a montré combien la vindicte populaire peut se réveiller contre eux. En sus, les Gardiens et leurs amis ont été amplement dénoncés par les protestataires pour leur corruption qui nourrit toute une oligarchie. Khamenei - qui a été fustigé comme ‘tyran’ au cours des manifestations qui ont débuté lors de l’hiver 2017-2018 et ne cesse d’être dénoncé régulièrement dans les rassemblements de protestataires, sauf dans la parenthèse des cortèges d’hommage à Soleimani - avait été obligé de donner des gages en encourageant le chef du judiciaire Ebrahim Raisi (candidat potentiel mais pas garanti à sa succession), à lancer une offensive contre les corrompus. Il est certain que les Gardiens sont prêts à tout (108) pour préserver leurs richesses, revenus, et si le vent tourne, ils n’hésiteront pas à sacrifier le Guide (et peut-être le velayat e-faqih : exercice du pouvoir par lui) ainsi que le clergé tout aussi corrompu. Ce dernier est en sérieuse perte de vitesse, critiqué dans les manifestations, ignoré dans des mosquées vides, et dont le poids électoral est historiquement bas (moins d’élus - 16 - que de femmes aux législatives de 2016). Les échéances électorales à venir (législatives en février 2020, présidentielles en 2021, renouvellement de l’Assemblée des Experts qui décideront la désignation du Guide) seront décisives.
Le défi est redoutable. Les dirigeants, en particulier le Guide, mais surtout Ali Shamkhani, l’indispensable animateur du Conseil Suprême de la Sécurité Nationale, doivent naviguer entre des objectifs contradictoires : d’une part infliger une « punition dévastatrice » à l’Amérique, sous peine de perdre toute crédibilité, tant à l’intérieur du régime que parmi les alliés régionaux (et le bénéfice du choc infligé à Riyad et à Washington avec les tirs sur les raffineries saoudiennes et la perte du drone ‘géant’ américain) ; et d’autre part éviter d’entraîner l’Iran dans un conflit frontal (espéré par Bolton et Pompeo) qui peut être fatal au pays (à défaut du régime…). C’est une voie stratégiquement subtile, que l’on peut en effet nommer ‘riposte graduée’ (retour en grâce d’un vieux concept), qui nous semble avoir été retenue par le Guide, au moins dans un premier temps, à la lumière des déclarations successives et des actions qui ont été menées au cours du mois de janvier 2020. C’est une posture évolutive, ajustable en fonction des événements. Très vite, des officiels iraniens et des membres de la Force al-Qods ont invité leurs alliés en Irak à s’abstenir de se lancer dans des actions de représailles contre les Américains et d’attendre que le Guide se soit prononcé (109).
Cette option de réaction dosée a été retenue au moins provisoirement à la suite d’un compromis sans doute difficile à atteindre, comme en témoigne un flottement évident dans les annonces consécutives. En effet, le 7 janvier (après quelques jours de silence), l’Agence Fars (contrôlée par les Gardiens) publie une déclaration d’Ali Shamkhani indiquant que « l’Iran a 13 scénarios pour riposter à l’Amérique en représailles pour le sang du chef martyr Qassem Soleimani, dont le plus bas sera un cauchemar historique pour l’Amérique » (110). La lecture de ce texte est instructive à plusieurs titres. Il indique ne pas vouloir détailler le contenu des scénarios présentés comme redoutables et révèle que les décisions prises ou à prendre sont le fruit d’un consensus. En particulier, qualifiées de ‘stratégiques’ (111), elles ne doivent pas être basées sur l’émotion, mais « il y a des centaines d’autres facteurs qui jouent un rôle ». Laissant percer que des cibles pour des actions à venir ont été sélectionnées, il ajoute que sur 19 bases américaines dans la région, 11 sont des bases de commandement et contrôle, et sont sous étroite surveillance iranienne. Curieusement, les agences Fars et Tasnim (également proche des pasdarans) retirent rapidement cette déclaration sans autre explication (112). L’amiral aurait-il été trop ‘bavard’ ? Ou bien les ‘durs’ sont-ils mécontents du compromis au point d’en effacer la trace ? Nul ne le sait.
La posture originale et habile adoptée par Téhéran, et qui sera bien comprise comme telle par Trump, va consister à attribuer une valeur ‘énorme’, celle de la réplique ‘dévastatrice’, à un coup très soigneusement calibré porté à l’Amérique, à vocation de message. Il s’agit de délivrer à Washington, et singulièrement au locataire de la Maison-Blanche, au Pentagone et à Pompeo, un avertissement qui soit à la fois suffisamment fort pour être crédible, mais limité dans les dégâts infligés qui doivent être matériellement spectaculaires (pour frapper les imaginations) mais sans perte humaine pour ne pas franchir une ligne rouge, celle constamment brandie par Trump.
A cet égard, le tir qui est intervenu dans la nuit du 7 au 8 janvier correspond bien à ce profil tactique. En dépit des contradictions (volontaires ou fortuites) qui infestent les déclarations et communiqués multiples de la part des divers protagonistes, un fil conducteur d’interprétation se dégage. Selon l’agence Fars (113), quinze missiles auraient détruit 20 ‘cibles’ américaines ‘sensibles’ sur la base militaire Ein Al-Al-Assad en Irak. Une autre base américaine située près de l’aéroport d’Erbil a également été touchée (114). Plusieurs supports ‘semi-officiels’ se référant à des sources des services de renseignement des Gardiens de la Révolution font état d’au moins 80 morts et 200 blessés parmi les personnels américains rapidement évacués de la base. Ces chiffres visiblement exagérés ont suscité d’abondantes railleries sur les réseaux sociaux iraniens. Tasnim et les autres agences ont corrigé ensuite leurs textes (115). Mais quoiqu’il en soit, les responsables militaires iraniens ont voulu clairement et immédiatement indiquer la portée de cette action. Selon Fars, la base aérienne servirait de support aux drones américains et ils indiquent que d’importants dégâts matériels ont été commis de par la violence des explosions. La même source déclare que les radars et systèmes de défense anti-missiles américains n’auraient pas fonctionné et que le système central de radar américain à Ein Al-Assad aurait été brouillé. Le général Hajizadeh, chef des forces aérospatiales des pasdarans, précise qu’ils ont lancé une cyber attaque contre les systèmes de surveillance américains et ont ainsi neutralisé les drones présents. Et surtout il précise expressément que l’Iran ne voulait pas causer de pertes humaines. Les Gardiens affichent de nouveau une supériorité technologique confirmée depuis les frappes précises de missiles de croisière et de drones sur les raffineries saoudiennes et le tir contre le drone américain abattu. Cette supériorité technologique tout comme la maîtrise du dosage de son emploi comme de la sélection limitative des cibles font partie intégrante du message d’avertissement ainsi délivré. Autre élément important : le fait que ces frappes ont été officiellement revendiquées (116).
Si les chiffres des victimes et blessés annoncés n’ont pas été pris au sérieux, en revanche, plusieurs éléments permettent de valider l’importance attribuée par l’Iran à cette riposte dénommée ‘Martyr Soleimani’, la première après le décès de ce dernier. Sa proximité par rapport à l’événement (elle intervient quelques heures avant les obsèques du général) veut crédibiliser la menace de vengeance. Cette rapidité ne contredit pas la tactique annoncée : une vengeance ‘au moment choisi’ et au ‘lieu voulu’ qui préfigure un chapelet d’actions, mais veut afficher immédiatement que l’Iran ne se veut pas ‘terrassé’. Le général Yadollah Javani, commandant adjoint des Gardiens de la Révolution pour les affaires politiques, déclare que ces frappes sont « ce que les Gardiens de la Révolution avaient promis à la Nation iranienne » et que les attaques de missiles iraniens « ont une importance stratégique en raison du rôle important de la base aérienne d’Ein al-Assad pour les opérations militaires régionales américaines » (117). La qualification de l’attaque est clairement affichée : en représailles pour le ‘martyre’ de Soleimani. C’est non moins clairement un avertissement : si les pertes humaines (décès) revendiquées paraissent largement imaginaires, comme nous l’avons dit plus haut, la violence des bombardements comme leur précision ont très probablement provoqué un choc. Et, selon les mêmes sources, les Gardiens menacent : « 104 positions sensibles américaines ont été identifiées » alors qu’aucun missile iranien n’a été intercepté et préviennent les Américains : abstenez-vous de riposter, sinon « ils subiront une réponse encore plus douloureuse et dévastatrice ». Les pasdarans n’oublient pas d’assortir leur satisfaction du message principal en invitant « la nation américaine » à « faire pression sur la Maison-Blanche de retirer ses troupes de la région pour éviter de plus amples dommages et ne pas permettre aux dirigeants des Etats-Unis de mettre en danger les vies de leurs soldats en augmentant la haine » (118). Le véritable objectif stratégique iranien est donc bien réaffirmé, avec une communication qui s’adresse tant à Trump… qu’à ses électeurs. Les stratèges iraniens savent que des vidéos sur les dégâts commis par les frappes vont tourner en boucle et que les blessures subies par les militaires opportunément sous abri (qui seront d’abord cachées, comme on le verra plus loin) atteindront … l’opinion publique en période électorale.
L’absence de pertes humaines apparaît donc de façon évidente comme un élément-clé de la valorisation codifiée de la riposte graduée dont nous décrivons la mise en place. Téhéran a manifestement compris que la perte d’une seule vie américaine est une ligne rouge pour Donald Trump qui a utilisé la mort (probablement imprévue) d’un ‘contractor’ américain pour songer sérieusement à une riposte forte contre des cibles iraniennes, dont Soleimani faisait partie. La leçon a porté. Aussi l’Iran a pris des précautions pour éviter un faux-pas qui pourrait susciter de très graves représailles. Washington aurait, selon le New York Times du 8 janvier, délivré par l’intermédiaire de la Suisse (qui représente les intérêts américains en Iran) des messages confidentiels adjurant l’Iran à faire preuve de modération dans ses réactions pour ne pas provoquer le président américain. L’administration américaine, selon le Wall Street Journal du même jour, aurait envoyé aux Iraniens peu après l’élimination de Soleimani un fax demandant de ne pas provoquer d’escalade. L’Iran aurait répondu, après les tirs de missiles, qu’il n’y aurait pas d’autre riposte (119). Pour éviter des pertes en vies humaines, Téhéran, comme le bureau d’Adel Abdel Mahdi, le Premier ministre irakien l’a reconnu le 8 janvier, a prévenu celui-ci par un « message verbal officiel » de l’imminence d’une frappe contre deux bases militaires américaines, sans en préciser la localisation. Un avertissement identique lui aurait été pareillement communiqué par les Etats-Unis. Le bureau aurait alors « immédiatement averti les commandants militaires irakiens de prendre les précautions nécessaires » ; il aurait d’ailleurs protesté contre ces tirs : « l’Irak rejette toute violation de sa souveraineté et les attaques contre son territoire » (120). L’analyste Elijah J. Magnier précise que le Premier ministre irakien aurait (ce qui va de soi) informé les Américains de cette opération imminente et les « Etats-Unis ont déclaré l’état d’urgence sur toutes les bases américaines en Irak (121) et dans la région avant l’attaque ». E. Magnier observe que « l’Iran a copié le mode utilisé par les Américains pour communiquer leur décision. Le 30 décembre 2019, le Secrétaire américain à la Défense, Mark Esper, a contacté le Premier ministre irakien Abdel Mahdi et l’a informé - sans lui en demander la permission - de l’intention des Etats-Unis de bombarder des Forces irakiennes (les Forces de Mobilisation Populaire- PMF) » (122) ; selon notre auteur, 5 bases des milices à la frontière irako-syrienne ont été détruites, « tuant et blessant 79 officiers des PMF, de la police fédérale, et de l’armée irakienne ». Les pertes humaines irakiennes montrent que Washington n’a pas usé de la même réserve que Téhéran… La volonté de l’Iran d’assurer une efficacité à sa communication à cette occasion se remarque par ailleurs : selon Dina Esfandiary, « chaque vague de frappes a été largement rendue publique - dans un cas, même avant que les frappes soient effectuées. En outre, pendant le week-end, des rumeurs sont apparues que l’Iran était en train de mobiliser certaines de ses forces de missiles. Déplacer des missiles est visible et suggère que l’Iran entendait envoyer un message que quelque chose était en cours, donnant à Washington une chance de se préparer » (123).
Cette codification de la valeur des représailles se confirme dans les énonciations des deux parties sur leur portée et leur bilan. Dans un tweet du 7 janvier, Javad Zarif déclare : « l’Iran a pris et achevé des mesures proportionnées d’auto-défense en vertu de l’Article 51 de la Charte de l’ONU, visant une base d’où des attaques armées lâches ont été lancées contre nos citoyens et de hauts responsables. Nous ne cherchons pas une escalade ou une guerre, mais nous nous défendrons contre toute agression » (124). Le message est clair : il définit la portée et les limites de l’opération, d’ailleurs abritée par une justification juridique internationale. Le vice-président iranien Es’haq Jahangiri proclame sur tweeter que « les attaques de missiles par les forces aérospatiales des Gardiens de la Révolution contre la base d’Ain al-Assad en Irak étaient une (opération) dévastatrice et également dissuasive » (125). On voit donc qu’une frappe, certes percutante, mais limitée et précisément circonscrite, est qualifiée de « dévastatrice » (donc d’une valeur de ‘point’ élevée) et simultanément présentée comme un avertissement explicitement dissuasif. Mais le Guide, pilote du dosage iranien, dissipe rapidement toute illusion : cette étape ne signifie en rien un ‘quitus’ ni un arrêt des hostilités. La riposte stratégique, rappelée plus haut par le général Salami, comprend un chapelet de mesures. Khamenei prévient : « pour le moment, les Américains ont reçu une claque, la revanche est une autre affaire » (126). Il poursuit en martelant son objectif essentiel : « les opérations militaires comme celle-ci ne sont pas suffisantes. La présence américaine propagatrice de corruption doit prendre fin ». Hamir Hatami, ministre iranien de la Défense, après avoir qualifié l’élimination de Soleimani d’erreur de calcul par Washington, confirme la ‘règle du jeu’ : « les mesures ultérieures de la République islamique seront proportionnelles à celles des Américains » (127) et lui aussi ‘enfonce le clou’ : Téhéran veut absolument pousser les forces américaines hors de la région. Cette mission sera répartie entre l’Iran et « les forces de résistance » « qui poursuivront certainement la tâche » (128). Le vice-président Es’haq Jahangiri martèle : « le départ des Américains de la région serait la vraie revanche sur leurs actes criminels » (129), en particulier l’assassinat de Soleimani. Ali Shamkhani estime que cet objectif prioritaire ne pourra se réaliser que « par l’unité des nations et gouvernements régionaux » (130). En élargissant à d’autres acteurs la responsabilité de cet objectif qui a priori concerne Téhéran au premier chef, Jahangiri prend un pari risqué, car il risque de ne pas être massivement suivi, pas même par la Turquie ni la Russie (131).
Tout va bien (All is Well) ! Dans un tweet surréaliste, Donald Trump, le 8 janvier, pavoise : « Tout va bien ! Des missiles lancés d’Iran sur deux bases militaires situées en Irak. L’évaluation des pertes et des dommages est en cours. Jusqu’ici tout va bien ! Nous avons l’armée la plus puissante et mieux équipée du monde, de loin ! » (132). Il explique plus tard, entouré de Mike Pence, Mark Esper et Mike Pompeo : « Nous n’avons subi aucune perte, tous nos soldats sont saufs, et seuls des dégâts minimes ont été infligés à nos bases militaires ». Plus significatif, il déclare : « l’Iran paraît baisser la garde, ce qui est une bonne chose pour toutes les parties concernées et très bonne chose pour le monde » (133). Il s’avance jusqu’à paraître tendre la main : « les Etats-Unis sont prêts à adopter la paix avec tous ceux qui la désirent ». Est-ce une pause très provisoire ou l’esquisse d’un armistice non-dit ? Il est très présomptueux et prématuré de répondre à cette question.
Au-delà des vantardises, ces propos indiquent que le locataire de la Maison-Blanche a désormais compris la codification de la riposte iranienne dont il admet implicitement les valeurs assignées aux actions. Chaque partie connaît dès lors les ‘règles du jeu’ (134) dans cette partie de bras de fer, y compris les lignes rouges. En revanche, les deux protagonistes n’ont pas le même niveau de maitrise de ces règles. Trump est pressé de présenter comme une victoire de la puissance américaine ce qui est en réalité une humiliation subie par la puissante Amérique via un coup vigoureusement asséné par un Iran d’autant plus déterminé qu’il a été lui-même frappé au cœur par la perte d’un pilier du régime. Dès lors, le président américain va voir sa posture (tout va bien) écornée sur deux terrains dangereux : l’impact psychologique et matériel des tirs de missiles iraniens, et les traumatismes subis par les militaires américains choqués bien qu’abrités ; en second lieu, un réflexe de rejet de la présence américaine dans la population irakienne comme dans le personnel politique et religieux dans un réflexe de souveraineté nationale offensée. Nous aborderons plus loin ce second aspect qui pose plusieurs questions complexes.
Quand Trump proclame très vite (trop vite) le 8 janvier que les frappes n’ont pas fait de victimes, n’ont causé que des dégâts mineurs et que les soldats sont saufs, résultat dont il s’attribue les mérites (« le peuple devrait être très reconnaissant et heureux ») à des fins électorales visibles, il commet un impair. En effet, si le bilan humain n’atteint pas le niveau invraisemblable brandi par les agences iraniennes proches des pasdarans, le personnel militaire américain n’est pas sorti indemne de l’épreuve qui s’est avérée sévère. En tentant de cacher cette réalité contrainte d’être dévoilée par reculades successives, Trump et ses conseillers, mais aussi les responsables du Pentagone, ont choqué quelques élus mais aussi une part de l’opinion publique. Le 16 janvier, le capitaine Bill Urban, un porte-parole des forces armées, concède que s’il n’y a pas eu de mort, 11 soldats ont du être soignés « pour des symptômes de commotion cérébrale consécutifs à des chocs explosifs (blasts) et subissent des examens » (135). Le 24 janvier, le Pentagone avoue que 34 militaires sont soignés pour des traumatismes cérébraux infligés par les explosions des missiles. Or le 22 janvier, à Davos, Trump minimise ces blessures : « j’ai entendu dire qu’ils ont eu des maux de tête » et « je ne les considère pas comme étant très sérieux en comparaison avec d’autres blessures que j’ai vues » (136). Ces propos ont suscité l’indignation de plusieurs élus et d’associations de vétérans qui exigent que les autorités prennent au sérieux ces traumatismes crâniens et présentent des excuses. Le décompte n’est pas fini : le 28 janvier, un porte-parole du Pentagone reconnaît 50 blessés, les premiers chiffres n’étant que des estimations susceptibles de varier (137) et de fait, le 30 janvier, le bilan (provisoire) s’élève à 64 blessés (138) mais l’administration promet de faire preuve de… transparence.
Derrière ce panorama évolutif (on parle désormais de plus de 109 ‘traumatisés’ de gravité inégale) se cachent des enjeux qui dépassent de loin une querelle (anecdotique) de chiffres. Le premier est que la volonté de minorer ces impacts humains repose sur un impératif majeur : Trump veut conserver au bilan de l’attaque iranienne le niveau, la valeur en quelque sorte communément perçue (139) dans le cadre de la ‘codification’ de la riposte graduée. En second lieu, il importe de minorer les effets de ces frappes au fur et à mesure qu’apparaissent les faiblesses de la défense des bases militaires américaines. De fait, avec le recul, il apparaît que d’une part les dégâts infligés aux installations par la violence des tirs de missiles Fateh-313 sont plus sévères que ce qui est annoncé, et que le bilan humain aurait pu comporter des victimes. Bien plus, la vulnérabilité de la défense américaine est patente (140), même si certains experts militaires s’emploient à dénigrer la portée des avertissements au préalable communiqués par l’Iran pour vanter l’efficacité des systèmes d’alerte (early warning) américains (141). Le vrai malaise est là (142). Donald Trump est aussi extrêmement soucieux de tout ce qui pourrait ternir son bilan et son image aux yeux du corps électoral. Une Amérique impuissante, défiée est ce qui peut arriver de pire.
Le locataire de la Maison-Blanche est du coup obligé de cultiver deux cartes tactiques simultanées : l’une est celle de la fermeté, l’autre celle de la possibilité d’un ‘deal’ avec l’Iran (cf supra : ‘Les Etats-Unis sont prêts à adopter la paix’…). Mark Esper l’a répété : le président veut discuter et négocier avec l’Iran sans pré-condition (143). Mais en réalité, ce à quoi Trump veut aboutir, c’est à la réécriture d’un ‘nouveau JCPOA’ inacceptable pour Téhéran, une idée soutenue par Boris Johnson, qui embarrasse la diplomatie britannique qui tente de rester sur la ligne de survie de l’accord nucléaire (144). En réalité, les conditions posées de façon inavouée (la réécriture d’un ‘bon’ accord) rendent irréaliste toute perspective d’accord. Sans aucune surprise, Téhéran a rejeté ce que l’Iran voit comme pseudo-ouvertures assimilées à une demande de capitulation. Majid Takht-Ravanchi, ambassadeur d’Iran aux Nations unies, a indiqué qu’il ne pouvait croire (145) aux prétentions américaines de volonté de ‘coopérer’ avec l’Iran au vu des actions américaines conduites contre son pays. Néanmoins, dans une interview au Der Spiegel, Zarif n’avait pas fermé la porte à une coopération avec l’Amérique (146). Trump avait rageusement tweeté que Zarif demandait la levée des sanctions comme condition pour négocier, ce à quoi il opposait un sonnant « NON MERCI » (147), ce qui lui vaut une réplique du ministre iranien lui précisant que la position iranienne n’est pas celle-là mais un retour au JCPOA (148). Or, celui-ci avait pourtant déclaré dans l’interview précitée : « l’administration Trump peut corriger son passé, lever les sanctions et revenir à la table de négociations ». Le ministre iranien peut d’autant moins laisser prospérer cette maladroite contradiction que ses propos lui ont valu une très violente mise en cause par les conservateurs qui ont non seulement manifesté devant son ministère en réclamant sa démission (149) (comment oser négocier avec les assassins du général ‘martyr’ Soleimani ?) et ont lancé une motion au Parlement pour obtenir qu’il soit traduit en justice. Il n’est pas certain que le Guide laisse prospérer cette procédure jusqu’à son terme, ce qui créerait un précédent déstabilisateur (150).
Pompeo, malmené le 24 janvier dans une interview sans complaisance par Mary-Louise Kelly, soutient que les voies diplomatiques sont poursuivies avec l’Iran mais les moyens de ‘progresser’ qu’il promeut sont : la mise en place d’une coalition et les « pressions maximales ». A la journaliste qui lui oppose que cette recette n’a produit aucun résultat, le secrétaire d’Etat aussi embarrassé que péremptoire essaie de soutenir le contraire devant toute évidence. Poussé dans ses derniers retranchements sur les moyens d’empêcher l’Iran de se doter de l’arme nucléaire, il tranche : « nous les arrêterons » et à la question « Comment ? Par des sanctions ? », il se contente de répéter : « Nous les bloquerons » (151). Incapable de répondre à la question de savoir si un nouvel accord nucléaire pourrait être élaboré, il énonce que les décideurs iraniens devront adopter une décision sur leur conduite à tenir. Cet étrange discours révèle (chez Pompeo) une absence de véritable réflexion sur le contenu de la ‘négociation’ qui n’avait pas été écartée par Trump.
Dans la panoplie des outils iraniens de riposte graduée, il faut très certainement inclure des cyber attaques (152). Le DHS (Department of Homeland Security) a indiqué dans son bulletin du 4 janvier ne pas disposer « d’information indiquant une menace spécifique, crédible » mais n’excluant pas un tel risque (153). Le 4 janvier, des hackers (154) apparemment liés à l’Iran ont piraté un site des archives américaines, mais cette action d’impact limité a plutôt valeur d’avertissement sans que l’on sache si elle émane de structures officielles iraniennes (155). Au-delà de ces ‘messages’, il est difficile d’évaluer à quel niveau de dommages les spécialistes de l’unité cyber des Gardiens ou des sous-traitants (pour éviter une prise de responsabilité) sont décidés (et techniquement capables) à parvenir. Il est permis de supposer que le recours à l’arme cyber suivra en gros le même mode de fonctionnement que les autres moyens, un dosage ‘proportionné’ décidé (en cas de sélection de cibles importantes) au niveau du Conseil Suprême de la Sécurité Nationale. Les sous-traitants, qui peuvent être soit des ‘patriotes’ (à la chinoise ou à la russe) plus ou moins hors-contrôle, ou des alliés extérieurs agiront sur des cibles en principe plus mineures (faute de moyens techniques lourds), mais risquent de créer des dérapages potentiellement dangereux. Outre les Etats-Unis, il n’est pas interdit de penser que les Etats qui afficheraient un alignement sur les positions de l’hôte de la Maison-Blanche pourraient s’exposer à des ‘mesures’ désagréables (qui ne se limitent pas au seul domaine cyber).
Dans les développements qui précèdent, nous avons montré que l’objectif stratégique prioritaire de Téhéran est le retrait des troupes américaines d’Irak. Martelé ad nauseam, il est clairement désigné comme la véritable ‘vengeance’ iranienne. Les dirigeants de la République islamique connaissent les limites des dommages militaires, certes bien réels, douloureux, humiliants, qu’ils peuvent infliger aux forces américaines dans la région. Surtout, ils mesurent qu’un conflit armé frontal avec les Etats-Unis (que Trump, pour des raisons électorales, souhaite éviter) serait dévastateur pour l’Iran. Aussi Téhéran s’emploie à surfer sur le boom de l’anti-américanisme en Irak, avec un rapprochement des deux blocs chiites sur ce terrain sur fond de souveraineté bafouée. Malgré de discrètes pressions de l’administration américaine (156), le Parlement irakien a voté le 5 janvier une résolution (non-contraignante) demandant au gouvernement d’annuler la demande d’aide militaire de 2014 aux forces de la coalition, tout en ne révoquant pas le State of Forces Agreement (accord bilatéral de coopération militaire SOFA) (157), d’organiser le départ de toutes les troupes étrangères (y compris américaines) et de porter plainte à l’Onu. Quelques députés kurdes (ce qui suscite une vive rancune au sein de la Force al-Qods qui était venue au secours du leader kurde Barzani alors menacé par Daech) et sunnites absents veulent contester ce texte alors que le leader chiite anti iranien Moqtada Al-Sadr le trouve trop mou (158). Selon le Los Angeles Times, Abdul Mahdi avait tenté de persuader les députés de décider un départ rapide des troupes américaines en recourant à des procédures d’urgence « en dépit des complications prévisibles ».
Le faible exécutif irakien est en position inconfortable. Le départ des troupes américaines n’est pas encore acquis. Trump a aussitôt menacé l’Irak de sanctions (159) « comme ils n’en ont jamais eu » au cas où le départ des forces américaines ne se déroulerait pas de façon amicale, et prévenu que les troupes ne quitteront pas l’Irak tant que ce pays n’aura pas payé pour la base aérienne ‘extraordinairement coûteuse’ (160). Ce faisant, il montre que ce retrait imprévu bousculerait sérieusement ses plans. Ces propos vifs ne manquent pas d’inquiéter les dirigeant irakiens tout en exacerbant l’anti-américanisme d’une partie de la classe politique comme de la population. Si le départ (si possible rapide) des forces américaines représenterait une énorme victoire pour Téhéran, le vote de la résolution du Parlement, salué en Iran par Ali Shamkhani, secrétaire du Conseil Suprême de la Sécurité Nationale, comme une « claque » sur la figure de Trump (161), est loin de suffire pour parvenir à ce résultat. Les avertissements percutants lancés par Trump ont inévitablement contraint Mahdi à réfléchir. Il sait que le départ de ces forces est une opération complexe et qu’en cas de retrait massif, l’Irak se retrouverait démuni face à Daech, qui est loin d’être éradiqué. Mohammad al-Halbousi, le président sunnite du Parlement, sans doute à l’écoute des ‘conseils’ américains, avait vigoureusement prévenu les députés qu’ils seraient responsables de l’effondrement de l’économie qui suivrait l’expulsion des militaires américains (162). Bien plus, il semblerait qu’au cours d’échanges privés tendus au Parlement entre Halbousi et Mahdi, ce dernier aurait révélé à son interlocuteur qu’il avait fait l’objet de pressions de la part de Trump pour que le Premier ministre irakien annule un récent accord conclu avec la Chine intervenu après un refus de ce dernier d’accorder 50% des recettes du pétrole irakien en échange de la reconstruction d’infrastructures irakiennes. Selon les propos attribués à Mahdi (source invérifiable), des pressions extrêmes auraient été exercées par Trump sur ce dernier. Il y a tout lieu de penser qu’elles se sont poursuivies à l’occasion de l’injonction de retirer les troupes américaines (163).
L’administration américaine n’a pas hésité à contester la validité du vote du Parlement irakien, au mépris de sa souveraineté. Le secrétaire d’Etat à la Défense, Mark Esper, prétend que les votes ont été manipulés par les intimidations de chiites appartenant à des milices soutenues par Téhéran et ne reflète pas l’opinion du peuple (164). Selon les mêmes sources, certains parlementaires qui n’ont pas pris part au vote, estiment aussi que le Premier ministre n’a pas le pouvoir d’expulser les troupes américaines. D’un autre côté, l’administration américaine sait qu’elle ne pourrait pas imposer de force son maintien sur place dans des conditions acceptables, en présence d’une hostilité générale d’une population qui se sentirait occupée. Face à cette impasse, Washington, selon Amberin Zaman (165), pourrait envisager un redéploiement partiel de ses moyens vers la région du Kurdistan irakien (166). Cette option théorique pourrait séduire les Kurdes s’ils demandent en échange la reconnaissance de leur indépendance et une garantie de sécurité par l’Amérique. Ces conditions paraissent cependant irréalistes, car les Kurdes s’exposeraient à passer aux yeux de toute la région comme alliés des Américains. En plus, ils se brouilleraient avec Bagdad et risqueraient une très violente réaction de Téhéran qui avait dans le passé (une intervention vigoureuse de Soleimani) forcé Barzani à faire marche arrière après avoir organisé un référendum pour l’indépendance. En revanche, des réflexions sont en cours chez les sunnites et les Kurdes sur le principe de création de régions autonomes (167) dans le cadre de l’Etat irakien. Ceci n’empêche pas Trump d’avoir rencontré Barzani le 22 janvier lors du forum de Davos où le président américain a rappelé qu’il était resté en Syrie… à cause du pétrole (168).
Les péripéties qui ont suivi le vote tendu du Parlement irakien laissent apparaître une grande confusion au sein de l’exécutif américain. Nous avons évoqué la réaction sanguine de Trump et les contestations sur la validité de la résolution adoptée le 5 janvier. Le 6 janvier, alors que le Premier ministre (ad interim) irakien a demandé à Matthiew Tueller, l’ambassadeur américain en Irak de le rencontrer avec un calendrier de retrait des troupes américaines (selon al-Monitor, il n’en existe pas), un mémorandum (non signé) émanant du général Seely, commandant des forces américaines en Irak, informe les autorités irakiennes « qu’à la demande du Parlement irakien et du Premier ministre », la coalition va repositionner les forces dans les jours et semaines à venir. Cette diffusion a causé un trouble général avec une cascade de démentis et de propos contradictoires. Ils attestent que les Etats-Unis n’avaient visiblement pas anticipé pareille situation. La propagation de ce texte est rocambolesque, certains évoquant une fuite par des éléments en désaccord avec cette décision (169). Le patron du Pentagone, Mark Esper, dément illico que les troupes américaines se retirent d’Irak bien que le document soit authentique (170), et le général Mark Milley, chef d’état-major général, prétend que le texte est un simple draft qui « n’aurait pas dû être envoyé », et qu’il s’agissait d’une « erreur de bonne-foi » (171) sur une lettre qui (selon des sources de la coalition) porterait sur un retrait de la zone verte et non un retrait général (une affirmation pour sauver la face ?). Quant à Trump, il n’hésite pas à parler de canular (hoax) le 7 janvier dans une conférence de presse conjointe avec le Premier ministre grec Mitsotakis. En fait, le locataire de la Maison-Blanche est embarrassé : son électorat favorise un retrait des ‘boys’, une abstention d’aventures militaires, mais simultanément n’acceptera pas que la puissante Amérique soit humiliée : « d’un certain point de vue, nous voulons partir. Mais ce n’est pas le bon point » déclare-t-il ce même jour. Il ajoute : « je pense que c’est la pire chose qui pourrait arriver à l’Irak si nous partons ». Le 9 janvier, Adel Abdel Mahdi a demandé par téléphone à Pompeo que des « délégués soient envoyés en Irak pour mettre en place les mécanismes destinés à appliquer la décision du Parlement pour le retrait sécurisé des forces (étrangères) d’Irak » (172). Le secrétaire d’Etat affirme brutalement le lendemain par un communiqué du Département d’Etat qu’il n’est pas question de retrait, et que les troupes américaines resteront en Irak pour continuer leur tâche. Il insiste : « à l’heure actuelle, toute délégation envoyée en Irak devrait travailler à renouveler notre engagement au partenariat stratégique - pas à discuter d’un retrait de troupes, mais de la bonne, adéquate posture de (nos) forces au Moyen-Orient » (173). Morgan Ortagus, la porte-parole, indique que c’est l’ensemble des relations, notamment économiques, avec l’Irak, qui doit être discuté. On devine que le levier économique est un des moyens de pression américain sur Bagdad. Elle poursuit en disant que les forces américaines sont présentes pour le bien de l’Irak. Or le Premier ministre irakien avait dénoncé les atteintes à la souveraineté de l’Etat : « les forces américaines sont entrées en Irak et des drones survolent son espace aérien sans autorisation des autorités irakiennes, et ceci était une violation de l’accord bilatéral ». Mahdi, symétriquement, condamne les violations de sa souveraineté commises par les tirs de missiles iraniens visant les troupes américaines en Irak (174).
La tension est palpable entre Washington, décidé à user de tous les moyens de pression pour résister à la demande de retrait, et les dirigeants irakiens (175) aux prises avec une montée en puissance de l’anti-américanisme partagé par les deux courants chiites concurrents, unis sur le thème de la défense de la souveraineté. Lors d’une interview sur Fox News, le 10 janvier, Trump, pressé par la journaliste Laura Ingraham, alterne confusément menaces de ‘punitions’ financières, et reconnaissance de ce qu’il n’est pas vraiment opposé à un retrait ; après avoir rétorqué qu’en public, les autorités irakiennes demandent le départ des troupes mais qu’en privé elles ne disent pas la même chose (ce qui n’est sans doute pas totalement faux), à la question « pourquoi ne pas partir ? » (176), il répond : « je ne suis pas si mal avec ça ». Plus intéressant, il révèle que l’Arabie saoudite (177) participerait au financement des troupes supplémentaires : « ils ont déjà déposé $ 1 milliard à la banque », ce qu’il justifie ainsi : « nous allons les aider, mais ces pays riches doivent payer pour cela. La Corée du Sud nous a donné $ 500 millions ». Il déclare aussi que l’Irak doit aussi payer et à la question « comment allez-vous récupérer (l’argent) ? », il avance clairement qu’il a un levier : « nous avons $35 milliards de leur argent, précisément maintenant dans un compte. Et je pense qu’ils consentiront à payer… Sinon nous resterons là-bas ». Ce dialogue surréaliste est instructif. Il montre que le président américain, face à son électorat, doit se présenter à la fois comme voulant se désengager et comme un exemple de fermeté, également soucieux de l’argent du contribuable, en brandissant les ‘sacrifices financiers’ consentis pour l’Irak : « nous avons payé l’une des plus chères installations aéroportuaires du monde », et : « les Etats-Unis ont payé à l’Irak des milliards de dollars par an, pendant de nombreuses années ». Plusieurs sources font état de menaces de Washington d’interdire aux autorités irakiennes l’accès au compte de leur Banque Centrale hébergée à la Federal Bank of New York si l’Irak persiste à exiger l’expulsion du contingent américain (178). Si des sanctions financières devaient être prononcées, plusieurs secteurs économiques pourraient être gravement touchés ; l’industrie pharmaceutique irakienne dit redouter des ruptures d’approvisionnement (179). En sus, les autorités financières irakiennes se sont inquiétées du non-renouvellement possible (180) du waiver consenti par Washington afin de pouvoir payer l’achat de gaz iranien destiné à produire la très vitale énergie électrique en Irak. Un tel arrêt serait catastrophique (181) pour le pays mais la Trade Bank of Iraq (TBI) a prévenu qu’en pareil cas, elle serait contrainte de suspendre le paiement de ces importations (182). L’Amérique, ayant besoin de la stabilité de l’Irak, est contrainte de préserver son avenir surtout si des groupes américains veulent préserver leurs intérêts dans ce pays. Washington aurait posé comme condition au renouvellement l’exigence que Bagdad présente un plan d’arrêt d’importation de gaz iranien (183), ce qui suppose des réorganisations non négligeables. De fait, le State Department a annoncé le 12 février qu’un waiver de 45 jours est accordé à l’Irak pour continuer d’importer du gaz et de l’électricité d’Iran. Cette brève exemption (renouvelable ?) est soumise à la condition que l’Irak établisse des plans de production de gaz pour se substituer rapidement aux importations iraniennes. Ce petit ballon d’oxygène est une grosse pression sur Bagdad et on devine que Washington souhaite que le gouvernement irakien finalise des contrats (déjà discutés) avec des groupes américains. Ceci place le fragile Premier ministre Allawi dans une position peu confortable dans ce bref répit. On ignore quelle sera l’attitude de l’Iran dont Trump poursuit ainsi l’étranglement. Le sort du pétrole iranien ‘irakisé’ qui est exporté en Irak est aussi en suspens. Les marges de manœuvre iraniennes sont assez modestes. D’un côté, Téhéran tentera de pousser l’Irak à résister aux diktats américains, mais le faible exécutif irakien n’a guère d’atouts pour s’y opposer même en cherchant des accords avec Pékin et Moscou. De l’autre, la République islamique cherchera des alternatives au débouché irakien, mais ceci est malaisé. Peut-on craindre que les Iraniens impuissants déclenchent des représailles en puisant dans les 13 scénarios étudiés par le Conseil Suprême de la Sécurité Nationale ?
Chaque partie ou ‘camp’ alterne désormais, voire brandit simultanément des postures de fermeté et de mesure, pour marquer des points en vue de négocier en position de force, ou, selon les cas, de moindre faiblesse. C’est la poursuite des ripostes graduées, qui présente toujours un risque élevé de dérapage vers des spirales violentes moins contrôlées. Dans la nuit du 20 janvier, 3 roquettes Katiouchkas (ce type de missile dont la livraison à la milice Kataeb Hezbollah avait été apparemment prévue lors de la réunion de coordination avec Soleimani en octobre 2019) s’abattent dans la zone verte qui abrite notamment l’ambassade américaine. Le Premier ministre Abdul Mahdi proteste : « cibler l’ambassade des Etats-Unis est un crime contre les missions diplomatiques sur le territoire irakien » et promet une enquête… Le 26 janvier, 5 autres Katiouchkas s’écrasent au bord d’une rivière près de l’ambassade sans causer de dommages significatifs, mais un projectile tombe à l’intérieur de l’enceinte du bâtiment. Mahdi réitère l’engagement (guère crédible) de l’Irak à « protéger toutes les missions diplomatiques » et dénonce « des actes qui entraînent l’Irak à devenir un champ de bataille » (184) tandis que le Département d’Etat américain « enjoint le gouvernement irakien de remplir ses engagements ». Selon Reuters, le bilan serait de 3 blessés. A l’évidence, il s’agit d’une tactique de harcèlement, une guerre des nerfs, pratiquée par la milice Kataeb Hezbollah en vue de susciter le départ des troupes américaines.
Simultanément, les acteurs s’activent autant sur un autre terrain, celui de la désescalade et de la négociation. Les conversations entre le président irakien Barham Salih et Donald Trump à Davos le 22 janvier marquent une tentative de renouer un dialogue moins tendu. Les deux hommes cherchent à trouver un terrain d’entente, en particulier sur l’importance des effectifs américains en Irak. Trump déclare : « nous avons eu une excellente relation. Et nous avons décru à un très petit nombre. Nous sommes tombés à 5.000 ». Il ajoute : « et nous verrons ce qui arrivera » (185). Selon les mêmes sources, le délicat sujet de l’importance de « respecter les demandes du peuple irakien et de préserver la souveraineté du pays » a été abordé et le chef de l’Etat irakien a déclaré dans un ton apaisé : « nous avons beaucoup d’intérêts communs, le combat contre l’extrémisme, la stabilité dans le voisinage, et un Irak souverain qui soit stable et en amitié avec les voisins et amis des Etats-Unis ». Salih a confirmé que le contexte actuel est explosif : « c’est une période très dangereuse… Le Moyen-Orient n’a pas besoin d’un autre conflit ». Salih indique qu’il a eu avec son interlocuteur « une conversation très franche sur la nécessité essentielle de faire preuve de retenue, de calmer les choses » (186). Ce langage diplomatique ne doit pas être interprété comme reflétant un accord sur les divers sujets qui fâchent, mais le sentiment que le réalisme doit prévaloir d’abord en diminuant la tension bilatérale. Salih comprend que le rapport de forces n’est pas en sa faveur et Trump réalise sans doute que ses troupes seront en passe inconfortable si elles sont harcelées et rejetées massivement par la population.
Mais Trump s’est bien gardé de paraître concéder quoi que ce soit aux Irakiens. Sur les sanctions contre les Irakiens, il reste évasif selon Laura Rozen : « nous verrons ce qu’il adviendra », et n’hésite pas à rappeler les intérêts américains : « et nous sommes aussi impliqués avec eux dans leur secteur pétrolier, et ça a toujours été très important de leur point de vue et du nôtre ». Abbas Kadhim, expert de l’Atlantic Council (cité par L. Rozen), souligne très justement que « l’administration Trump semble voir tout retrait en ce moment des forces des Etats-Unis en Irak comme donnant l’image d’une victoire de l’Iran ». Il distingue ceux qui veulent l’expulsion complète des militaires américains (187), et de l’autre un Donald Trump pour qui un départ même partiel signifie une victoire de l’Iran ; entre les deux, selon Kadhim, se situent ceux qui souhaitent un retrait partiel des soldats qui combattent Daech, mais le maintien de personnels pour entraîner les Irakiens à l’emploi de l’important matériel fourni par les Etats-Unis, plus « quelques éléments pour protéger l’ambassade ». Le gouvernement serait selon le même analyste hostile au départ des troupes américaines, tant pour des raisons de sécurité que pour fournir des infrastructures aux forces armées irakiennes. On observe des tendances contradictoires chez les responsables militaires et civils irakiens sur le futur de la coopération militaire bilatérale. Le gouvernement inciterait l’armée à prendre de la distance avec les Américains, ne pas rechercher leur assistance systématique (188). Il reste que la négociation sera ardue ; de toute façon, le général Kenneth McKenzie, chef du commandement central (CENTCOM), réaffirme le 23 janvier que la présence de troupes sera renforcée dans la région, aux fins de dissuasion, tout en répétant ne pas vouloir une guerre avec l’Iran et une baisse de la tension (189).
Parmi les exigences prioritaires de Washington figure en bonne place une demande instante d’installer des batteries de Patriot pour protéger les bases américaines qui sont, comme on l’a vu, très exposées. Ceci suppose d’obtenir l’autorisation du gouvernement irakien mais aussi de régler des problèmes logistiques pour acheminer ce matériel. Le général Mark Milley, chef d’état-major général interarmes, concède qu’à l’égard des frappes de missiles iraniens déjà intervenues, il ne peut pas être « certain » que si des batteries de Patriot avaient été déployées, les dits missiles auraient été détruits, bien que ce soit l’usage prévu (190)… C’est dans ce contexte que la visite du général McKenzie est un signal important. Il a rencontré le 4 février le Premier ministre intérimaire Abdul Mahdi, le chef de l’Etat Bahram Salih, le président du Parlement Salim al-Jabouri, mais pas le nouveau Premier ministre Mohammed Allawi. A l’issue de ces entretiens, il s’est dit ‘encouragé’ et a déclaré : « je pense que nous serons capables d’aller de l’avant » tout en avouant qu’il ne sait si les conversations pourront déboucher, en particulier car le gouvernement irakien est de transition (191). James Jeffrey, l’envoyé spécial des Etats-Unis pour la Syrie, indique que la portée des discussions avec l’Irak est vaste, ne se limite pas à l’évaluation comptable des effectifs : « nous entendons nous asseoir (NDLR : à la table des négociations) et avoir une ample discussion avec le gouvernement irakien sur la totalité du schéma stratégique de nos relations dans l’avenir proche » (192).
La place et l’avenir de l’implication de l’Otan sont une dimension du problème de la présence des troupes étrangères en Irak. L’Organisation n’avait pas été prévenue de l’opération d’élimination de Soleimani et a dû rapidement adopter des mesures d’urgence visant en priorité à protéger les personnels. Plusieurs membres ont suspendu leurs missions d’entraînement. Le 6 janvier, le Secrétaire Général de l’Otan a pris quelque distance devant l’initiative américaine, appelant à la prudence et désescalade, « un nouveau conflit ne serait de l’intérêt de personne ». L’Otan se tient toutefois prête à reprendre et poursuivre des missions d’entraînement (193). La demande irakienne de départ des troupes étrangères lui pose un défi compliqué auquel l’Otan n’est pas préparé. Un tel scénario n’avait pas été anticipé (194). Dans sa déclaration du 8 janvier où il vante l’absence de dégâts (sic) et de victimes après la frappe de missiles iraniens, Trump demande à l’Otan « d’être plus impliquée dans le processus du Moyen-Orient ». Vantant les succès de l’économie américaine dont il s’attribue les mérites, Trump proclame que les Etats-Unis ont atteint l’indépendance énergétique. Il en conclut que ces réussites « ont changé nos priorités stratégiques ». Du coup, il énonce que « toutes les options au Moyen-Orient sont devenues ouvertes ». Enhardi, il proclame que les Etats-Unis sont « le producteur numéro un de pétrole et de gaz du monde entier », et dans la foulée, lance : « nous sommes indépendants, et nous n’avons pas besoin du pétrole du Moyen-Orient ». Nous ne discuterons pas ici cette dernière affirmation. Il reste que cette supériorité qu’il étend à tout l’arsenal militaire américain sert de socle contextuel que Trump brandit pour justifier sa promotion de l’Otan ; la justification de cette dernière ne serait-elle pas plutôt une volonté de signaler à ses électeurs qu’il souhaite se désengager du Moyen-Orient coûteux et… inutile ? Dans cette perspective, l’Otan serait ‘invitée‘ à jouer le supplétif de l’Amérique dans une démarche de ‘burden-sharing’ que le président américain a déjà testée sur la défense de l’Europe. Selon l’analyste Elijah Magnier, les acteurs de la région ont interprété la demande de Trump à l’Otan comme « révélatrice d’un sérieux déclin de l’hégémonie américaine. » Il interprète cette posture comme reflétant une incapacité ou une absence de volonté de traiter les dossiers du Moyen-Orient. Le même auteur voit dans cette posture le reflet de « l’incompétence de ses conseillers » ou « une décision stratégique par les Etats-Unis de renoncer à son influence » (195). Florence Parly, ministre française des Armées, a « laissé entendre que le maintien des soldats français au titre de l’opération Chammal se ferait sans doute dans le cadre d’une mission de l’Otan » (196). Cette implication de l’Otan semble faire son chemin. Selon les mêmes sources, un responsable de l’Otan, John Mansa, « a rencontré Karim Aboualgus, le vice-ministre irakien des Affaires étrangères. Et les deux hommes se sont mis d’accord pour dire qu’une ‘coopération étroite entre la République d’Irak et l’Otan serait mutuellement avantageuse’ ». Du côté irakien, on devine que la présence de troupes étrangères serait plus « vendable » politiquement sous un drapeau international que sous la bannière américaine. Le rôle de l’Otan pourrait se concentrer sur des missions d’entraînement avec un redéploiement des effectifs (197).
Mais tout scénario sur le maintien, le remplacement des troupes étrangères est tributaire du rapport de forces entre les deux grands blocs chiites qui ne se déterminent pas que sur le seul enjeu des troupes étrangères mais sur le contrôle du pouvoir, et singulièrement du gouvernement. La lutte acharnée que l’on a observée entre le bloc du bouillant jeune religieux Sadr qui affichait à la fois une distance avec l’Iran et un combat pour la « chasse aux corrompus » (une vertu qu’on peine à lui attribuer ainsi qu’à ses milices et alliés) s’est déplacée selon des lignes de plus en plus mouvantes et fracturantes. Une des « répliques » du ‘séisme’ Soleimani est à l’évidence la fracturation des milices chiites concurrentes (198). Téhéran veut se servir du choc de la perte du général pour fédérer (forcer) les énergies à se focaliser dans un combat pour la restauration de la souveraineté nationale avec un anti-américanisme forcené pour effacer les revendications populaires de lutte contre la corruption et contre l’influence hégémonique iranienne. Muqtada al-Sadr, chef de la puissante coalition au pouvoir, saisit l’opportunité de sortir le ‘sabre de l’expulsion’ en exigeant que l’accord bilatéral de défense entre l’Irak et les Etats-Unis soit « immédiatement annulé, l’ambassade américaine soit fermée, et les troupes des USA soient expulsées de façon humiliante » (199). Le thème de l’expulsion va devenir le thème fédérateur. Du côté des pro-iraniens, Qais Al Khazali menace : « nous vous le disons encore, vous les Américains, pour votre refus de vous retirer d’Irak, attendez-vous à une réponse séismique » (200).
Dans un premier temps, alors que l’opinion est encore sous le choc de la disparition de Soleimani, Sadr va jouer la carte de l’unité avec les protestataires des milices chiites concurrentes (PMF/PMU) sur le thème de l’expulsion des troupes américaines (201). Une importante rencontre à Qom avait réuni en septembre 2019 Soleimani, le Guide, Sadr et plusieurs de ses rivaux pro-iraniens sur la tactique à adopter pour expulser les troupes américaines. Le bureau du Guide avait publié cette photo en clamant que les divergences entre factions avaient été résolues (202). Or, les rivalités sont réapparues peu après le décès de Soleimani quand Sadr appela les milices à ne pas attaquer les bases américaines en représailles. Le 13 janvier, une nouvelle réunion se tient avec Sadr à Qom pour préparer une grosse manifestation contre la présence américaine qui se tiendra le 24. Téhéran s’intéresse de nouveau à Sadr car le thème de l’expulsion est fédérateur. Aussi, vers le 15 janvier, les chefs de milices se rencontrent à Bagdad à la recherche d’un consensus alors que les fractures n’ont cessé de se creuser entre pro et anti gouvernement. Le 16 janvier, Sadr avait décommandé une manifestation contre la présence américaine décidée après une visite en Iran ; lors de la manifestation contre le gouvernement (203) (et tous les corrompus y compris les alliés de l’Iran), Sadr fait savoir qu’il ne veut pas s’y associer (il ne veut cibler que la présence américaine) et donne ordre à ses fidèles (venus moins nombreux qu’espéré) de se retirer, notamment ses militants qui protègent les manifestants, tandis que les forces de l’ordre dispersent violemment ces derniers. En fait, lui qui avait lutté contre la classe corrompue, se désolidarise du grand mouvement populaire pour se focaliser sur un objectif favorisé par… l’Iran (204). L’attitude de Sadr lui vaut des menaces : un drone a attaqué son bureau de Najaf (205). Le media iranien Javan, proche des Gardiens de la Révolution, constate que le réalignement de Sadr sur l’Iran est intervenu après cet incident (206). D’un autre côté, des tireurs ont ciblé des manifestants dans le centre de Bagdad. Alors qu’en fin janvier, des manifestations anti gouvernementales se multiplient, notamment chez les étudiants, des militants (‘casquettes bleues’) de son mouvement se heurtent à ces derniers (207). Depuis le début février, on assiste à une escalade de la violence, les supporteurs de Sadr n’hésitant plus à tirer sur les manifestants pour les disperser (208), comme à Kerbala le 6 février (209). Or, son camp subit des ripostes ciblées : au même moment, deux commandants de son mouvement, Sheikh Hazim al-Hitti et Abu-Muqada al-Azirjawi, sont tués par des tireurs. Le commanditaire peut être irakien ou étranger (210). Le nouveau Premier ministre Mohammed Allawi a la tâche difficile depuis le 1er février de trouver un consensus. Il a reçu des représentants des manifestants anti gouvernement et leur a donné des assurances qu’ils seraient écoutés (211) ; mais parviendra-t-il à trouver un vrai support politique tant au Parlement que dans la population ? Sa survie et sa crédibilité dépendront aussi de l’attitude américaine, notamment au regard de la souveraineté iranienne (212).
La ‘terrible’ vengeance escomptée par Téhéran pour venger véritablement Soleimani est-elle à portée de mains ? Sous la forme initiale rêvée, ce n’est pas certain. S’agissant du retrait hypothétique des Etats-Unis d’Irak, on ne voit pas de divorce poindre à l’horizon, mais des relations à redéfinir. D’autant que les milices chiites, au-delà des rodomontades, seront peut-être plus prudentes qu’elles ne l’avouent (213). On ne peut exclure un désengagement partiel avec redéfinition des missions américaines, avec peut-être un rôle spécifique alloué à l’Otan, mais le contenu de ce scénario reste à définir. On peut penser que par conséquent l’Iran va devoir lancer d’autres ripostes, d’autres types (214), sur d’autres terrains (215), à partir des « 13 scénarios » concoctés au Conseil Suprême de Sécurité Nationale. Mais d’autres préoccupations prioritaires occupent désormais l’Iran : le lancement par les 3 Européens de la procédure de manquement au JCPOA pouvant théoriquement mener si elle va jusqu’à son terme au rétablissement des sanctions de l’ONU ; elle est vivement contestée par Téhéran, Moscou également, la Chine étant réservée. L’Europe a accepté de consentir un délai supplémentaire, Téhéran ayant présenté des contestations juridiques et laissant planer la menace d’un retrait du TNP. Josep Borell, chef de la diplomatie européenne, a déclaré le 3 février à Téhéran que le processus de constatation en manquement de l’accord nucléaire (JCPOA) ne serait pas assorti de calendrier de transmission au Conseil de Sécurité des Nations unies, le but étant de préserver le JCPOA et non pas d’y mettre un terme. Autre souci, la combinaison de cascades de sanctions américaines, notamment sur le secteur de la production, et la perspective d’un nouvel examen de passage difficile devant le Gafi car l’Iran n’a pas voté tous les textes de lois convenus avec lui.
Enfin, les modérés de Rohani, les réformateurs marginalisés, risquent de faire face à une défaite aux prochaines législatives de février 2020 (216), qui devraient profiter aux conservateurs durs, aux Gardiens, sans que l’on puisse prévoir le sort réservé aux conservateurs pragmatiques. Téhéran va encourager les Européens à faire quelques transactions symboliques via Instex tandis que Washington a lancé un canal de paiement avec une banque suisse pour permettre la vente de médicaments américains et quelques médicaments suisses, une façon de compléter sous forme de concurrence déloyale la mise à l’écart des entreprises européennes.
Les 3 Européens se sont décrédibilisés aux yeux de l’Iran en n’affichant pas une réserve minimale sur l’élimination de Soleimani. En saluant ‘les efforts’ de Trump pour son ‘plan de paix’ (la strangulation des Palestiniens), le maigre crédit du trio ne s’est pas amélioré. Si Instex prend vie et que d’autres pays européens affichent une volonté politique plus résolue, ce crédit pourra reprendre vigueur.
Soleimani est mort, une page se tourne. Il est encore très prématuré d’en évaluer toutes les conséquences, mais soyons certains que de nouvelles péripéties surviendront.
Notes :
(1) L’entourage du prince Mohammed ben Salman avait sondé en mars 2017 des personnages dont les noms seront prononcés dans des affaires suivies par le procureur Muller (George Nader et Joël Zamel, un citoyen israélien) sur la possibilité de confier à des ‘privés’ la tâche de supprimer Soleimani. Il n’y eut pas de suite : Saudis Close to Crown Prince Discussed Killing Other Enemies a Year Before Kashoggi’s Death, The New York Times, 11 novembre 2018.
(2) Iran claims to have foiled terror plot against Qassem Soleimani, al-Monitor, 3 octobre 2019.
(3) Qasim Soleimani and an important letter he does not read, Iran Wire (traduit du persan), 3 janvier 2020.
(4) Il semblerait que ce décès n’avait pas été prévu par les auteurs de cette frappe. Voir la remarquable enquête (une des meilleures synthèses sur ce sujet) du New-York Times sur l’ensemble de la séquence aboutissant à l’élimination de Soleimani : Seven Days in January : How the U.S. and Iran Approached the Brink of War, nytimes.com, 11 janvier 2020. Nos propres réflexions visent à compléter ces données par d’autres précisions et considérations, puis à esquisser une analyse stratégique de la situation créée.
(5) How Trump Planned the Drone Strike With a Tight Circle of Aides, Business Standard, 5 janvier 2020.
(6) Tweet @rcallimachi, 4 janvier 2020.
(7) Selon Gareth Porter, John Bolton et M.Pompeo ont commencé dès septembre 2018 à échafauder des scénarios pour la suppression de Soleimani pour permettre le déclenchement d’une guerre avec l’Iran. Tout incident impliquant l’Iran ou ses proxies doit être exploité même au prix de grossières manipulations : Pompeo’s Gulf of Tonkin Incident, The American Conservative, 9 janvier 2020.
(8) Dès mai 2019, des memos de David Wurmser, conseiller de John Bolton, prônent des plans d’élimination du général, non seulement pour sa dangerosité, mais aussi pour favoriser l’effondrement du régime iranien, vieille ambition de celui qui sera limogé par Trump qui refuse en juin de passer à l’action. En juin, le plan est prêt mais Trump attend pour le déclencher : Eli Lake, Trump’s Latest Plan for Iran : Regime Disruption, Bloomberg, 14 janvier 2020 ; Trump authorized Soleimani’s killing 7 months ago, with conditions, CNBC, 13 janvier 2020.
(9) La nature et le mode de relations entre milices appuyées par l’Iran et les Gardiens de la Révolution sont une question très difficile à trancher, sachant que certains groupes ont leur propre calendrier tout en se coordonnant avec les pasdarans, avec des degrés variables d’intégration dans l’appareil militaire iranien. Une ambigüité cultivée par Téhéran : The Possible Legal Repercussions of an Iranian Commander’s Photo, Iran Wire, 10 janvier 2020.
(10) Iran plane crash : Tor-M1 missiles fired at Ukraine Jet, BBC news, 21 janvier 2020.
(11) Le déroulement précis de cet épisode comme celui des acteurs impliqués restent encore confus, les réticences iraniennes à communiquer les boîtes noires de l’avion nourrissant trouble et spéculations : What is Known and Unknown About The Ukrainian Plane Crash In Iran, RFERL, 10 janvier 2020 ; Philip Giraldi, Who Targeted Ukraine Airlines Flight 752 ? Iran Shot It Down but There May Be More to the Story, Global Research, 16 janvier 2020.
(12) Protests breack out in Iran after admission of accidental plane downing, Al-Monitor,12 janvier 2020.
(13) De nombreux manifestants ont vilipendé le Guide, le gouvernement, les militaires, et une joute politique virulente se déploie (dans le contexte des prochaines législatives) entre eux et Rohani qui met les Gardiens de la Révolution en cause pour avoir ‘caché’ la vérité, et les pasdarans qui accusent le président de négligence, Khameneï prenant leur défense : ’Our enemy is here’ : Iran protesters demand that leaders quit after plane downed, Reuters, 12 janvier 2020 ; Iran’s Rohani Calls For National Unity After Officials ’Lied’ About Plane Downing, RFERL,15 janvier 2020 ; Iran Daily : Rouhani v. Military Over Downing of Ukraine Passenger Jet, EA Worldview, 16 janvier 2020 ; Iran’s Khamenei Defends Military Amid Anger Over Downed Plane, RFERL, 17 janvier 2020.
(14) Rouhani threatened to quit if Iran did not admit to downing Ukrainian jet, The Jerusalem Post, 26 janvier 2020. Sur la séquence des événements, voir : Anatomy of a Lie : How Iran Covered Up the Downing of an Airliner, The New-York Times, 26 janvier 2020.
(15) Iran makes arrests in plane crash probe amid public fury, RFERL,14 janvier 2020.
(16) Le général, comme les principaux responsables des Gardiens, est un pilier de la pérennité du régime qui les protège : Murad Weiss, Why did Hajizadeh neither resign nor resign, Radio Farda, traduit du persan, 4 février 2020.
(17) Shireen Hunter, The Shooting of a Passenger Jet Could Change Iranian Politics, Responsible Statecraft, 14 janvier 2020.
(18) Lors d’une visite surprise à Téhéran le 12 janvier, l’émir du Qatar a offert $ 3milliards à l’Iran en compensation des victimes du crash, au motif que « le Qatar n’oubliera pas la position de l’Iran sur les sanctions imposées à Doha ».Le soutien de l’Iran face au blocus saoudien lui vaut reconnaissance : Qatari Emir to compensate Iran for Ukrainian plane crash in visit, The Arab Weekly, 12 janvier 2020. Ce geste aurait suscité un désaccord entre l’Emir et son premier ministre Sheikh Abdullah bin Nasser bin Khalifa al-Thani qui aurait été remplacé le 28 janvier par Sheikh Khalid bin Khalifa bin Abdulaziz al-Thani, précédemment chef de la cour : Former Qatari prime minister resigned after clashing with emir, The Arab Weekly, 2 février 2020. Les Gardiens de la Révolution ont démenti les allégations d’Hassan Abbasi (ancien haut-gradé pasdarn) concernant un quelconque versement par le Qatar : IRGC Spokesman rejects Claim Iran Took Ransom From US and Qatar, Radio Farda, 26 janvier 2020.
(19) Les milices irakiennes pro-iraniennes correspondent à la typologie des « acteurs hybrides » décrits par Thanassis Cambanis, Dina Esfandiary, Sima Ghaddar, Michael Walid Hanna, Aron Lund, Renad Mansour : Hybrid Actors, Armed Groups and State Fragmentation in the Middle East, The Century Foundation (book), 2019.
(20) Top cleric condemns US strikes on PMU bases, urges respect for Iraq sovereignty, PressTV, 30 décembre 2019.
(21) Iraq slams US airstrikes, warns of consequences, Deutsche Welle, 30 décembre 2019.
(22) Kataib Hezbollah : Iraq condemns US attacks on Iran-backed militia, BBC news, 30 décembre 2019.
(23) Des responsables militaires et du renseignement irakiens prétendent avoir des doutes sur la responsabilité de Kataeb Hezbollah dans ces tirs et se plaignent de ce que les américains n’aient pas partagé les preuves matérielles qui justifient la mise en cause de cette milice ; Iraqi Question U.S. Claim That Iran-Backed Militia Attacked Base, The New York Times, 6 février 2020. Est-ce une sorte de prise de distance par rapport à Kataeb Hezbollah ?
(24) Pro-Iranian militias behind US Embassy attack in Baghdad, al-Monitor, 31 décembre 2019.
(25) Emily Blunt voit dans la décision soudaine de Trump de liquider Soleimani un réflexe ‘émotionnel’ lié à la fois au souvenir traumatisant de la prise d’otages de 1979 et au refus de subir plus d’humiliations : Trump Killed Soleimani Because He Doesn’t Want to End Up Like Jimmy Carter, Responsable Statecraft, 15 janvier 2020.
(26) US embassy attack:Trump threatens Iran over violent protest in Iraq, BBC news, 1er janvier 2020.
(27) How Trump made the decision to kill Suleimani, Los Angeles Times, 3 janvier 2020.
(28) Seven Days in January, loc cit.
(29) US tried to kill two Iranian chefs in one day : report, Anadolu Agency,10 janvier 2020 ; la simultanéité des deux opérations ajoute aux interrogations sur leurs vrais mobiles : US failed to kill second Iran leader on same day of Qassem Soleimani Strike, New-York Post, 10 janvier 2020.
(30) Soleimani’s man : Abdul Reza Shahlai, Iran’s most senior commander in Yemen, AL ARABIYA, 13 janvier 2020 ; voir aussi : Morad Veisi, The IRGC’s Mysterious $15 Million Man, Radio Farda, 4 février 2020.
(31) Selon la journaliste Hélène Cooper, The Daily (audio du New York Times) 4 & 7 janvier 2020. Le 31 décembre Trump tweete : « The Anti-Benghazi ! », Iran’s top ayatollah stokes Twitter war with President Trump, The Boston Herald, 1er janvier 2020.
(32) Les soldats américains présents se sont contentés de tirs de gaz lacrymogènes : US troops fire tear gas at pro-PMF protesters in Baghdad, Al Jazeera, 1er janvier 2020.
(33) Notons que cet épisode violent n’est pas une action de masse,(quelques centaines d’individus) et a été dénoncé par divers groupes qui avaient manifesté contre l’emprise iranienne en Irak et la corruption gouvernementale. Outre des sunnites et des kurdes, le mouvement d’Ammar al-Hakim et celui de Sadr ont condamné ces actes : US Embassy attack backfires on Iran-Backed militias in Iraq, al-Monitor, 2 janvier 2020. Pour une synthèse évolutive de l’attaque contre l’ambassade, voir https://en.wikipedia.org/wiki/Attack_on_the_United_States_embassy_in_Baghdad
(34) Pour une chronique des manifestations en Irak, voir https://en.wikipedia.org/wiki/Iraqi_protests_(2019%E2%80%93present)
(35) Khamenei-Linked Newspaper In Iran Suggests Seizure Of U.S. Embassy in Baghdad, Radio Farda, 15 octobre 2019.
(36) Inside the plot by Iran’s Soleimani to attack U.S. forces in Iraq, Reuters, 4 janvier 2020.
(37) Remarks by President Trump on the Killing of Qasem Soleimani, White House Briefings, Mar-a-Lago, 3 janvier 2020.
(38) Statement by the Secretary of Defense Dr.Mark T. Espers as prepared, 2 janvier 2020.
(39) Ibidem.
(40) Trump tells Fox News ‘Laura Ingraham ‘ four embassies’ were targeted in imminent threat from Iran, Fox News, 10 janvier 2020.
(41) Press Briefing by Secretary of State Mike Pompeo and Secretary of the Treasury Stephen Mnuchin on Iran Sanctions, White House Briefings,10 janvier 2020.
(42) Pentagon chief says no specific evidence Iran was plotting to attack four U.S.embassies, Reuters, 12 janvier 2020.
(43) Le 6 février, Esper réitère son approbation : tuer Soleimani fut une « décision facile » car « Il préparait activement l’attaque suivante », Middle East Eye, 6 février 2020.
(44) Chez les républicains, comme chez les démocrates, un malaise est perceptible : O’Brien avoids identifying embassies that were under ‘imminent threat from Iran’, NBC news, 12 janvier 2020.
(45) Reuters, loc.cit.
(46) State Department was reportedly unaware of an ‘imminent threat’ to 4 US Embassies, blowing a hole through Trump’s claims, Business Insider, 13 janvier 2020.
(47) Une manipulation grossière des faits dénoncée par cet ancien juge de la Superior Court de New York : Andrew P. Napolitano, Shifting justification for the killing of Soleimani persists, The Washington Times, 15 janvier 2020.
(48) Pompeo says killing of Suleimani is part of ‘bigger strategy’ to deter US foes, The Guardian, 14 janvier 2020.
(49) US president Trump defends decision to kill Iran’s Soleimani, AL ARABIYA, 13 janvier 2020.
Dans le document transmis obligatoirement par l’exécutif au Congrès, « imminent » est volontairement absent : un aveu ! : https://www.justsecurity.org/68594/white-house-1264-notice-and-novel-legal-claims-for-military-action-against-iran/
(50) Intel : Why the Trump administration keeps dodging Iran briefings on Capitol Hill, al-Monitor, 16 janvier 2020.
(51) Des échos concordants laissent apparaître un niveau inégalé de surveillance rapprochée comme électronique de Soleimani, un dispositif que l’on peut considérer comme à la fois permanent (le général est un acteur stratégique et une cible prioritaire) et conjoncturel dans la mesure où tout doit être prêt si un ordre d’élimination est donné : Americans fired three missiles ; first two missiles did not hit Sardar Suleimani’s car, but a third hit him + Details of alleged last hours of Sardar Suleimani’s life, ENTEKHAB.IR (traduit du persan), 9 janvier 2020. Une surveillance exercée tant par les Américains que les Israéliens : Israel intel helped US carry out strike that killed Iran’s Soleimani - report, The Times of Israel, 8 janvier 2020. Une surveillance israélienne étendue à des responsables du Hezbollah a favorisé le repérage de la cible : Tracking information that killed Qassem Soleimani, Radio Farda,(persian), 6 janvier 2020. Il semble que des agents épiaient la cible au sein de l’aéroport de Bagdad : Tracked, targeted, killed : Qassem Soleimani final hours, Middle East Eye, 4 janvier 2020 ; Informants in Iraq and Syria helped the US to kill Iranian general Soleimani, Reuters, 9 janvier 2020. Georges Malbrunot, Bagdad traque la taupe qui aurait livré Soleimani, Le Figaro, 24 janvier 2020. Selon Fox News (information à prendre avec précaution), un commando de forces spéciales américaines suivait le convoi conduisant Soleimani ; Fox News, 11 janvier 2020.
(52) Inside the plot by Iran’s Soleimani to attack U.S. forces… loc. cit, Reuters, 4 janvier 2020.
(53) L’action de Soleimani en Irak était très sévèrement contestée par les services du ministère des Renseignements (MOI).De façon générale, le MOI et les services spéciaux des Gardiens sont en concurrence acharnée : Portrait of A General : Secret Iranian Spy Cables Show How Qassim Suleimani Wielded His Enormous Power in Iraq, The Intercept, 5 janvier 2020.
(54) Saudi Arabia gave Iraq green light to arrange meeting with Iran : Iraqi official, PressTV, 2 octobre 2019.
(55) The Reason Qassem Soleimani was in Baghdad shows how complex the Iran crisis is, The Independant, 6 janvier 2020.
(56) Joyce Nelson, Trump Administration had set a Trap for Soleimani, Global Research, 10 janvier 2020.
(57) Une incohérence propice à tous les fantasmes : la Bulgarie a démenti des rumeurs qualifiant l’élimination de Soleimani de punition pour l’attentat à la bombe qui tua 5 touristes israéliens en 2012 ; Sofia Cautious On Reports Tying Soleimani To 2012 Bulgaria Bombing, RFERL, 17 janvier 2020.
(58) Laura Rozen : Pompeo mocks claim Soleimani was part of Iraq-brockered Iran-Saudi indirect talks, al-Monitor, 8 janvier 2020. Ce démenti sec concerne aussi par ricochet les Irakiens. Ceci veut-il dire que Pompeo veut torpiller tout rapprochement entre Téhéran et Riyad ?
(59) Saudi Arabia Calls for Restraint after Soleimani’s Killing, Asharq Al-Awsat, 3 janvier 2020 ; AFP : Saudi Arabia ‘Not Consulted’ Over US Strike to Kill Iran General, VOA News, 5 janvier 2020.
(60) Yasmine Farouk, Commentary : What Does the U.S. Killing of Soleimani Mean for Saudi Arabia ? Carnegie Endowment For International Peace, 7 janvier 2020. Saeid Jafari : How Soleimani’s slaying could affect Iran-Saudi ties, al-Monitor, 22 janvier 2020.
(61) Renewed Talk Of ‘Soleimani Peace Message’ Amid Iraq’s Ongoing Crisis, Radio Farda, 7 février 2020. Kamal Kharrazi, l’influent président du Conseil Stratégique Iranien pour les relations internationales, a réaffirmé que Téhéran a toujours été prêt à converser avec Riyad, mais que les décideurs sont ‘ailleurs’ dès que les intérêts américains sont concernés : Iran has always been ready for talks with Saudis : Kharrazi, Tehran Times, 5 février 2020.
(62) Iran wants to resolve issues with Saudi, UAE quickly - Iranian official, Reuters, 4 février 2020.
(63) US, Israel, UAE officials secretely met on Iran : report, Anadolu Agency, citant le site Axios, 4 février 2020.
(64) Pour un panorama d’ensemble selon les différentes typologies, voir l’étude de Mehrnusch Ansari & Benjamin NuBberger, Compilation of States’Reactions to U.S. and Iranian Uses of Force in Iraq in January 2020, Just Security, 22 janvier 2020.
(65) Moscou évalue prudemment la possibilité de fournir des systèmes anti-missiles AS300, une option qui pose des difficultés de divers ordres pas encore surmontées : Anton Mardasov, Will Russia provide missiles to ‘close the entire sky over Iran ?, al- Monitor, 24 janvier 2020.
(66) Rouhani Touts Arms Sales As Benefit If Iran Sticks To 2015 Nuclear Deal, Radio Farda 11 novembre 2019.
(67) Poutine est de plus engagé dans un exercice d’équilibre pour peser dans la région en renforçant les convergences russes avec Israël pour qui Moscou devient un partenaire de plus en plus important : Russia’s difficult balancing act between Iran and Israel, Al Jazeera, 1er février 2020.
(68) Mark N.Katz, Russia reacts to the killing of Soleimani, The Atlantic Council, 4 janvier 2020 ; Jeffrey Mankoff, How Will Russia React to the Killing of Soleimani ? CSIS analysis, 6 janvier 2020 ; Anna Borshevskaya, Russia Reactions to the U.S. Strike on Soleimani, Policy Alert, The Washington Institute for Near East Policy, 7 janvier 2020.
(69) Elles s’amplifient et ne portent pas que sur les seuls AS400 : Iraq, Russia Discuss Heightened Military Cooperation Amid U.S. Strains, RFERL, 7 février 2020.
(70) We Need to Get These Missiles’ : Iraq Considers Purchasing Russian S-400 Systems, MP Says, Sputnik news, 12 janvier 2020. Selon une revue ‘bulgare’ puisant à des sources russes, les conversations se seraient accélérées : Iraq buys S-400 anti-aircraft missile System, the Parliament said, BULGARIAN MILITARY.COM, 3 février 2020. Il convient de rester prudent devant ces ‘messages’, une concrétisation est encore loin.
(71) Jonathan Fulton, China’s response to the Soleimani killing, Atlantic Council, 6 janvier 2020.
(72) U.S. accuses Russia, China of blocking U.N. statement on Baghdad embassy attack, Reuters, 8 janvier 2020.
(73) Pakistan Stress Neutrality, Big Rally Protests Killing of Soleimani, VOA, 5 janvier 2020 ; Pakistan Renews Mediation Efforts Between Iran, US and Saudi Arabia, Radio Farda, 9 janvier 2020. L’Inde, soucieuse de préserver ses voies d’approvisionnement en pétrole et gaz, et de ne pas vulnérabiliser son implication dans le port iranien de Chahbahar, fait part de la préoccupation générale devant les tensions : India’s reaction to the killing of Iranian commander Qassem Soleimani, Brookings, Order from Chaos, 3 janvier 2020.
(74) Ankara souhaite une désescalade qui peut lui donner un rôle et bien que membre de l’Otan ne soutiendrait pas une opération militaire américaine contre Téhéran que la Turquie encourage à la retenue. Voir l’analyse : Taha Ozhan, Does Turkey stand to gain after Soleimani’s assassination ? Al Jazeera, 3 février 2020.
(75) Europeans call for calm after US strike kills Iran general, Politico, 3 janvier 2020.
(76) U.S. Killing Of Iranian Commander Sparks Global Concern, RFERL, 3 janvier 2020.
(77) https://www.gov.uk/government/news/joint-statement-from-president-macron- chancellor-merkel-and-prime-minister-johnson-on-the-situation-in-iraq.
(78) On peut voir dans le suivisme de la ligne américaine par Paris le poids persistant de clans influents au sein de l’appareil diplomatique français décrits notamment par V. Jauvert, La face cachée du Quai d’Orsay, Robert Laffont, 2016, et par Guillaume Beaud, La France et le nucléaire iranien, Politique Etrangère, n°4, 2019.
(79) Le chargé d’affaires allemand à Téhéran a été convoqué par les autorités iraniennes qui ont protesté contre des commentaires de la porte-parole du gouvernement de Berlin approuvant l’élimination de Soleimani vue comme une riposte aux provocations militaires iraniennes : U.S. Killing of Iranian Commander…, loc. cit.
(80) Interview with iranian Foreign Minister Zarif, « It’s a Disaster for Europe To Be So Subversient to the U.S », Der Spiegel, 24 janvier 2020.
(81) Heureuse expression utilisée par Thierry Coville, France Télévision 8 janvier 2020.
(82) Pour une bonne description : Dexter Filkins, The Shadow Commander, The New Yorker, 30 septembre 2013 ; et surtout Ali Soufan, Qassem Soleimani and Iran’s Unique Regional Strategy, CTC Sentinel, vol.11, n°10, novembre 2018.
(83) Hesam Ghanatir, Who is Ismail Qaani, the New Commander of the Revolutionary Guards’Quds Force ? Iran Wire, 3 janvier 2020.
(84) Il s’est illustré en Afghanistan : Iran’s New Quds Force Leader Has A Long, Shadowy History With Afghanistan, RFERL, 15 janvier 2020.
(85) Morad Veisi, From Ahmad Vahidi to Ismail Qaani ; Three decades with the power of Quds, Radio Farda, 3 janvier 2020, traduit du persan. Les nouveaux promus s’inscrivent dans la ligne de durcissement répressif face aux craintes de troubles internes, qui avait présidé aux nominations décidées par Ali Khamenei en mai 2019 : Morad Veisi, The Appointment Of New IRGC Commanders Shows The Concerns Of Iran’s Ruling Clerics, Radio Farda, 18 mai 2019.
(86) Ali Alfoneh, Who Is Mohammad Hossein-Zadeh Hejazi, the New Deputy Commander of Iran Qods Force ? Policy Watch n° 3245, The Washington Institute for Near East Policy, 22 janvier 2020 ; Matthew Levitt, The New Iranian General to Watch, Politico, 23 janvier 2020.
(87) Communiqué du Conseil Suprême de la Sécurité Nationale, 3 janvier 2020, diffusé sur le site du ministère iranien des Affaires étrangères.
(88) Key Takeaways From Qasem Soleimani’s Massive Funeral Procession, RFERL, 7 janvier 2020.
(89) Even Iran reformists and moderates criticise Trump attack that killed top general, The Independant, 3 janvier 2020.
(90) Pour un panorama de déclarations, voir : Part 2 : Iran Pledges Retaliation, Iran Primer, 6 janvier 2020.
(91) Le Hezbollah cherche à constituer de nouvelles cellules dormantes à l’étranger, Le Figaro, 24 janvier 2020.
(92) Exclusive : Iran tasked Nasrallah with uniting Iraqi proxies after Soleimani’s death, Middle East Eye, 14 janvier 2020.Un défi compliqué pour le Hezbollah qui doit au-delà des menaces de vengeance d’abord conforter sa posture : Hanin Ghaddar, Hezbollah’s Moment of Truth, The Washington Institute for Near East Policy, 8 janvier 2020 ; Nasrallah :’Blood’ to Show Americans World Not Safer Post Soleimani, Naharnet, 12 janvier 2020 ; Nozahan Etezadosaltaneh, Should Nasrallah be Worried after Soleimani Assassination ?, International Policy Digest, 29 janvier 2020.
(93) Ali Reza Assadzadeh, Who is Zeinab Soleimani ? , The Levant news, 5 février 2020.Voir aussi : Soleimani’s Daughter Says Millions Like Him Ready To March The White House,Radio Farda, 10 janvier 2020 ; Zeinab Soleimani rencontre Hassan Nasrallah, L’Orient Le Jour, 8 février 2020. Elle le presse de lancer les mouvements régionaux de la ‘résistance’ dans le combat.
(94) Iran’s ’Crushing Revenge’ May Prove Formidable Challenge for Soleimani’s Successor, Haaretz, 3 janvier 2020.
(95) Suleimani successor Esmail Qaani threatens retaliation for his death, The National, 6 janvier 2020.
(96) Interview exclusive avec CNN : Supreme Leader’s military adviser says Iran’s response will be ‘against military sites’, CNN, 5 janvier 2020.
(97) Commander : General Soleimani’s Revenge Not to End by Shooting Few Missiles, Fars News, 6 janvier 220.
(98) IRGC : Strategic revenge to end US presence in region, PressTV, 4 janvier 2020.
(99) Vital American Targets in Region Within Reach : Iranian Commander,Tasnim News (agence de presse proche des Gardiens), 4 janvier 2020.
(100) https://twitter.com/realdonaldtrump/status/1213593975732527112
(101) Prudemment le Pentagone fait marche arrière : https://www.nytimes.com/2020/01/06/us/politics/trump-esper-iran-cultural-sites.html
(102) Iran Vows to Raze Israel In Case of US Response to Gen. Soleimani’s Vengeance, Fars News, 6 janvier 2020.
(103) Military Official : 16 Countries Contacted by US for Mediation to Dissuade Iran from Retaliation, Fars News, 5 janvier 2020. Pepe Escobar prétend que l’Emir du Qatar aurait transmis un message de Trump assurant que les sanctions seraient levées si l’Iran s’abstient de riposter et qu’il y aurait désescalade si Téhéran réagissait de façon ‘proportionnée’. Cet écho est invérifiable même si on peut penser que divers canaux ont prêché la modération : Trump wants out, is bound to de-escalate, AsiaTimes Online, 8 janvier 2020.
(104) Parliament designates Pentagon, all its affiliates as terrorists, Iran Press News, 7 janvier 2020.
(105) Tehran Times, 6 janvier 2020.
(106) Pentagon sends six B-52 strategic bombers to military base on Diego Garcia that is beyond the range of Iran’s ballistic missiles to prepare to hit Tehran if given the order, Mail Online, 8 janvier 2020.Voir aussi, Indian Ocean Naval Base Diego Garcia : The Launchpad to Attack Iran, The Great Game India, 7 janvier 2020.
(107) US-led Coalition Relocates Headquarters from Iraq to Kuwait as Iran Vows ‘Severe Revenge’ for Gen. Soleimani Assassination, Fars News, 7 janvier 2020.
(108) Christian Oliver, Weakness at home limits Khamenei’s options for revenge, Politico, 3 janvier 2020.
(109) Iran Urges Restraint Among Iraqi Allies, Iran Wire, 6 janvier 2020.
(110) Shamkhani : We have 13 response scenarios, Al-Manar, (source Fars) 7 janvier 2020, traduit de l’arabe.
(111) Shahir Shahidsaless, For Iran, retaliation is more than a matter of saving face, Middle East Eye, 8 Janvier 2020, reprenant les 5 caractéristiques des ripostes stratégiques présentée par le général Salami dans un texte diffusé peu avant par Tasnim (en persan) : What would be the « strategic revenge » feature of the US/ Haj Qassem Soleimani’s vengeance ? Ce sont : pas de limites aux pertes humaines ; vaste champ géographique : la région, zone de ‘résistance’, Asie de l’ouest, lieux d’intérêts américains vulnérables ; revanche stratégique, pas tactique : porter de multiples coups sévères aux positions américaines en vue de conséquences stratégiques ; revanche transnationale pouvant être déléguée à d’autres groupes ; responsabilité directement assumée ou pas.
(112) Iran Denies Statement by Admiral of « Thirteen Scenarios » For Revenge, Radio Farda, 7 janvier 2020.
(113) US Army Sustains Heavy Casualities in Iran Missile Attacks, Fars News, 8 janvier 2020.
(114) Selon Gien Carrey, citant des sources militaires américaines, 10 missiles ont été tirés sur Ayn al-Assad et sur une base près d’Erbil ; un autre aurait touché la base aérienne de Taji près de Bagdad, 4 autres auraient été perdus : Iran Retaliates With Missile Strike on U.S.- Iraqi Bases, Bloomberg, 8 janvier 2020.
(115) Iranians Mock Semi-Official News Agency Reports On Missile Attack, Radio Farda, 8 janvier 2020.
(116) Ian Williams, When Iran Attacks, Critical Questions, Center for Strategic and International Studies, 9 janvier 2020.
(117) IRGC Targeted Base of Prime Strategic Importance to US, Fars News, 8 janvier 2020.
(118) Ibidem.
(119) The US reportedly sent secret messages to Iran via Swiss intermediaries, urging not to retaliate too strongly and further provoke Trump, Business Insider, 12 janvier 2020.
(120) Iraq says Iran informed it of imminent missile attack on US forces, AFP, 8 janvier 2020.
(121) Le Pentagone a reconnu dans un communiqué du 7 janvier que les bases américaines avaient été mises en état d’alerte « en raison d’indications que le régime iranien se préparait à attaquer nos forces et intérêts dans la région » : DOD Statement on Iranian Ballistic Missile Attacks in Iraq, 7 janvier 2020.
(122) Elijah J. Magnier, Iranian Messages Behind Attacking US Bases In Iraq, And The Consequences, ejmagnier.com/2020/08iranian-messages-behind-at…,8 janvier 2020, consulté le 29/01/2020.
(123) Iran Lets Trump Avoid a War But that doesn’t mean we should expect peace, The New York Times, 8 janvier 2020.
(124) https://twitter.com/JZarif/status/1214736614217469953. L’Iran a adressé le 8 janvier au secrétaire général de l’Onu et au président du Conseil de Sécurité une lettre revendiquant le droit à se défendre en vertu de l’article 51 de la Charte : https://securityaffairs.co/wordpress/97067/apt/apt34-westat-survey.html le même jour, l’ambassadrice Kelly Craft avait adressé un courrier justifiant l’élimination de Soleimani selon le même article 51 : https://assets.documentcloud.org/documents/6609717/Art-51-Letter.pdf
(125) Tehran Times, 8 janvier 2020.
(126) Leader : Military Reprisal Not Enough, US Should Leave the Region, Fars News, 8 janvier 2020.
(127) Iran’s defense chief vows ‘proportional response to any US action, Tehran Times, 8 janvier 2020.
(128) Iranian DM Warns of Appropriate Response to Any US Reaction to Missile Attacks, Fars News, 8 janvier 2020.
(129) ABNA news, 13 janvier 2020.
(130) ABNA news, 13 janvier 2020.
(131) Saeid Jafari, Can Iran mobilize allies to end US Mideast presence ?, al-Monitor, 14 janvier 2020.
(132) https://twitter.com/realdonaldtrump/status/1214739853025394693
(133) Zachary Stieber, Trump : No Americans Harmed by Iranian Missile Strikes, The Epoch Times, 8 janvier 2020.
(134) Même si les acteurs semblent respecter ou au moins comprendre le ‘code’ de rispostes mutuelles graduées, cette situation est instable et reste exposée à des erreurs d’interprétation et à des changements d’attitudes : A strategy for the Mideast That Has Even Trump’s Allies Scratching Their Heads, The New-York Times, 7 janvier 2020 ; Daniel Byman, Is Deterrence restored with Iran ? Brookings, 16 janvier 2020.
(135) RFERL, 17 janvier 2020.
(136) 34 Troops Have Brain Injuries From Iranian Missile Strike, Pentagon Says, The New York Times, 24 janvier 2020.
(137) Pentagon Now Says 50 U.S ; Troops Sustained Brain Injuries in Iran Strikes, The New York Times, 28 janvier 2020.
(138) US Raises Toll In Iraq Attack For Fourth Time, Now Says 64 Hurt, RFERL, 31 janvier 2020.
(139) L’ancien ministre de la Défense Ahmad Vahidi ne résiste pas à la tentation de brandir à nouveau un bilan sanglant destiné à frapper (toutes) les imaginations : At Least 70 Americans Killed In Iran Miss, Senior General, Iran Front Page News (reprise de media iraniens), 25 janvier 2020.
(140) Une vulnérabilité qui ne se limite pas qu’au seul théâtre irakien : Rebeccah L. Heinrichs, Real Clear Defense, 7 février 2020.
Pour une évaluation israélienne des frappes iraniennes, voir :
https://besacenter.org/mideast-security-and-policy-studies/iran-soleimani-revenge/
(141) Ian Williams, Uncomfortable Lessons : Reassessing Iran’s Missile Attack, Missile Threat, CSIS, 6 février 2020.
(142) Le chef d’Etat-major des armées, le général Mark Milley, prétend, contrairement à l’évidence, que les frappes iraniennes avaient pour but de causer des pertes humaines (ce qui est une forme de refus de la codification implicitement acceptée) alors que le Secrétaire d’Etat Mark Esper considère comme mineurs les dégâts infligés. Ceci révèle l’ampleur du choc causé au Pentagone : Iran intended to kill U.S. personnel in missile attack : U.S. General, Reuters, 8 janvier 2020 ; Joint Chiefs Chairman : Iran Intended to kill American troops in missile attacks, Politico, 8 janvier 2020.
(143) https://www.cbsnews.com/news/transcript-mark-esper-on-face-the-nation-january-12- 2019/
(144) Nucléaire iranien : Johnson prêt à remplacer l’accord par un autre négocié par Trump, L’Orient-le Jour, 14 janvier 2020 ; UK PM Says ‘Trump Deal’ Could Replace Iran Nuclear Pact, AFP, 14 janvier 2020.
(145) Iran UN Envoy ‘Cannot Believe’ Trump’s Offer Of Cooperation On ‘Shared Priorities’, Radio Farda, 9 janvier 2020.
(146) Voir la fin de son interview dans le Der Spiegel : Interview with iranian Foreign Minister Zarif… loc. cit.
(147) https://twitter.com/realDonaldTrump/status/1221225245220265985, 26 janvier 2020.
(148) Iran’s Zarif Says Trump Misunderstood Comment About Sanctions ,Radio Farda, 26 janvier 2020 et : Zarif Again Rejects Bilateral Talks With Washington, Radio Farda, 27 janvier 2020.
(149) Iran’s Zarif under fire for saying he’d negociate with US, al-Monitor, 27 janvier 2020.
(150) Faramarz Davar, Iran’s Parliament Vs Zarif, Iran Wire, 31 janvier 2020.
(151) Transcript : NPR’s Full Interview With Secretary Of State Mike Pompeo, NPR, 24 janvier 2020.
(152) Chris Meseraole, Iran spent years building a cyber arsenal. Will it unleash that arsenal now ? Brookings, 6 janvier 2020.
(153) https://www.dhs.gov/sites/default/files/ntas/alerts/20_0104_ntas_bulletin.pdf
(154) Le ‘groupe’ APT 34 lié à l’Iran a de nouveau attaqué une société de services
https://securityaffairs.co/wordpress/97067/apt/apt34- westat-survey.html
(155) This is the Beginning : Hackers Claiming to Be from Iran Take Over U.S. Governement Website, PJ Media, 5 janvier 2020.
(156) Jonathan Swan, Scoop : Trump officials tried to stop Iraqi expulsion vote, AXIOS, 6 janvier 2020.
(157) Précisions utiles par Katherine Lawlor, Iraq’s Parliament Votes to End U.S. Troops Presence in Iraq, Institute for the Study of War, 5 janvier 2020.
(158) Iraq’s Parliament votes to expel U.S. military from the country, Los Angeles Times, 5 janvier 2020.
(159) Selon le Washington Post, l’administration américaine aurait commencé à travailler sur ces sanctions : US begins drafting Iraq sanctions, Middle East Monitor, 7 janvier 2020.
(160) Trump Threatens Iraq with sanction if US troops are expelled, BBC News, 6 janvier 2020.
(161) SNSC : Iraqi Parliament Decision Slap on Trump’s Face, Fars News, 6 janvier 2020.
(162) Despite U.S.-Iraq Feud, Iraqi Prime Minister Privately Mulls Delay of U.S. Troop Departure, Time, 7 janvier 2020.
(163) Musa Abbas, Iraqi Prime Minister reveals the hidden in the Iraqi parliament session 5/01/2020, Illuminations, 6 janvier 2020 (traduit de l’arabe).
(164) US questions whether Iraq can boot American troops, al-Monitor, 7 janvier 2020.
(165) Iraq’s Kurds weight opportunities, risks in the wake of Soleimani killing, al-Monitor, 7 janvier 2020.
(166) Eric Bordenkircher, Pivoting to the KRG : Restructuring the U.S. Military Presence in Iraq, The Washington Institute for Near East Policy, 3 février 2020.
(167) Iraq’s sidelined Sunnis weight options amid US-Iran conflict, al-Monitor, 20 janvier 2020 ; Will Iraq’s Sunnis form semi-autonomous region if US troops leave ? al-Monitor, 21 janvier 2020 ; Reviving the ‘Sunni region’ project raises questions about timing, opportunity, The Arab Weekly, 26 janvier 2020.
(168) Kurdish President Nechivan Barzani Meets Donald Trump in Davos, Kurdistan 24, 22 janvier 2020.
(169) US denies military pullout from Iraq, letter was an ‘honest mistake’, Middle East Monitor, 7 janvier 2020, avec copie du memo en pj.
(170) Le service de l’US Army Recruiting Command a diffusé une mise en garde contre ces « faux (fake) messages » et dément l’existence d’un tel draft : US Army Warning : Texts Being Sent Out About Military Draft Are Fake, The Epoch Times, 8 janvier 2020.
(171) Il attribue la ‘faute’ au général Franck McKenzie, tout en réaffirmant qu’il n’y a pas eu de décision quelconque de retrait : US military send Iraq withdrawal letter by ‘mistake’, Deutsche Welle, 6 janvier 2020.
(172) Iraq asks US for team to prepare troop pullout, al-Monitor, 10 janvier 2020.
(173) Us Department of State, Statement by Morgan Ortagus, Spokeperson, 10 janvier 2020.
(174) US is not willing to withdraw troops from Iraq, says Pompeo, The Guardian, 10 janvier 2020.
(175) Qui ont reçu un appui inattendu de l’Egypte : Egypt advises Iraq to expel US , other forces in bid for stability, al-Monitor, 26 janvier 2020.
(176) Why Not Use This Opportunity To Say We’re Done ? - Laura Ingraham Presses Trump On Leaving Iraq For Good, Daily Caller, 10 janvier 2020.
(177) Saudi Arabia supports US troops’ presence in Iraq, Anadolu Agency, 28 janvier 2020.
(178) US Reporteldy Warns Iraq it Will Shut Down its Fed Reserve Bank Account If US Troops Are Booted Out, Sputnik (citant le Wall Street Journal), 12 janvier 2020, et Iraq Could Risk Dollar Access, Oil Marketing if U.S. Troops Out, Bloomberg, 12 janvier 2020.
(179) Iraq could face supply disruption as US sanctions threat casts cloud, The National, 5 février 2020.
(180) US Plans To Renew Sanctions Waiver Allowing Iraq to Import Energy From Iran, Urdu Point, 7 février 2020, citant le Wall Street Journal.
(181) Ceci illustre la dépendance excessive de l’Irak aux importations de gaz iranien, et la nécessité de développer rapidement la production nationale. La période actuelle troublée et l’absence d’Etat gênent considérablement tout progrès : US-Iran Tensions and the Waiver Renewal for Iranian Gas Exports to Iraq, Kapsarc, 21 janvier 2020. Voir aussi : Simon Watkins, Iraq Is On The Brink Of An Energy Crisis, Oil Price, 5 février 2020.
(182) Iraq bank to ‘stop’ Iran gas payment transfers if US waiver ends : chairman, al-Monitor, 22 janvier 2020. Il est clair que cette suspension pénaliserait aussi l’Iran significativement. Voir : Omid Shokri Khalehsar, The Future of Iran Energy Exports to Iraq, United World, 5 février 2020.
(183) Iraqi officials : US will grant vital Iran sanctions waiver, AP, 10 février 2020.
(184) Rockets Hit Us embassy in Baghdad amid protests, Reuters, 27 janvier 2020.
(185) Salih, Trump discuss American troop drawdown from Iraq, PressTV, 22 janvier 2020.
(186) Laura Rozen, Iraq president calls for restraint after meeting Trump in Davos, al-Monitor, 23 janvier 2020.
(187) Sadr a soutenu la démarche de Salih à Davos,le grand Ayatollah Sistani aussi, le leader sunnite ancien vice-président Osama al-Nujaifi également ; en revanche, Abu Ali al-Askari, un responsable de Kataeb Hezbollah, s’y est vivement opposé : « Nous insistons sur la nécessité pour Bahram Salih de ne pas rencontrer Trump et sa foule vicieuse ». D’autres supporteurs de l’Iran comme Hassan Salem, Mohammed al-Ghabban, Ahmed al-Yasiri, ont aussi dénoncé ces contacts : As Iraq’s protests continue, is political solution on the horizon ? al- Monitor, 24 janvier 2020.
(188) Iraqi officials say Baghdad wants to minimize reliance on US military fight against Islamic State, AP, 5 février 2020.
(189) CENTCOM : les troupes américaines resteront dans la région, PressTV, 24 janvier 2020. Ce propos à caractère général ne désigne pas spécifiquement l’Irak.
(190) Pentagon seeking Iraqi permission to deploy missile defenses, AP, 30 janvier 2020.
(191) US general slips into for talks to salvage relations, AP, 4 février 2020.
(192) U.S. Hopes to Discuss ‘Entire Strategic Framework’ With Iraq Soon, Reuters, 29 janvier 2020.
(193) Nato suspends Iraq mission, yields to Trump’s call to be more involved in the Middle East, The Arab Weekly, 12 janvier 2020.
(194) Nato to review Iraq mission after Soleimani killing, al-Jazeera, 6 janvier 2020.
(195) Elijah J. Magnier, A New Middle East « Made In Iran » Is About To Be Born, 9 janvier 2020 @ejmalrai ; http://ejmagnier.com/2020/01/09/a-new-middle-east-made-in....
(196) Zone militaire opex360.com, 30 janvier 2020.
(197) Foreign troops’ future in Iraq uncertain as clashes continue, al-Monitor, 14 janvier 2020.
(198) Iraqi militias feud after Suleimani departs scene, The National, 9 janvier 2020.
(199) Muqtada Sadr : Iraq will turn into new Vietnam for US if its forces stay, PressTv repris par ABNA news, 7 janvier 2020.
(200) Iraqi militia leader warns US of « earth shaking » response after not withdrawing from country », the National, 9 janvier 2020.
(201) Muqtaba Al-Sadr joins meeting of Iraqi Popular Forces’ Leader on expulsion of US troops, ABNA, 13 janvier 2020.
(202) Iraqi Militias meet in Iran as splits appear, The National, 14 janvier 2020.
(203) Sadr aurait passé un accord pour cesser les manifestations contre le gouvernement, pour assurer la nomination du premier ministre Allawi : Revealed : The deal made in Iran that brought Iraq’ new PM to power, Middle East Eye, 5 février 2020. De fait les supporteurs ont attaqué les manifestants anti-gouvernementaux, The National, 2 février 2020.
(204) Katherine Lawlor et Brandon Wallace, Sadr Withdraws Support for Iraq’s Popular Protest Movement, Institute for The Study of War and Peace, 29 janvier 2020.
(205) Suspected UAV attack on Moqtada Sadr office, Javan on line, (media proche des pasdarans), traduit du persan, 28 janvier 2020. Selon des sources iraniennes (Fars) proches des pasdarans il serait l’objet d’un complot israélien visant à l’assassiner, Muqtada Al-Sadr escapes US assassination plot, ABNA, 6 février 2020 (un écho à prendre avec prudence).
(206) Iran Forming New Alliances In Iraq Aq Al-Sadr Realigns His Policy Towards Tehran, Radio Farda, 25 janvier 2020.
(207) Moqtada Al Sadr’s link with anti-government protesters comes crashing down, The National, 4 février 2020.
(208) Le grand ayatollah Sistani condamne ces violences et blâme les services de sécurité pour ne pas avoir assuré la protection des manifestants, et adjure le nouveau Premier ministre de constituer un gouvernement vraiment représentatif, Iraqi clerix scolds security forces after protesters die in new tensions, Reuters, 7 février 2020.
(209) Al-Sadr Supporters Shoot Fire to Disperse Karbala Protesters, Middle East Monitor, 6 février 2020.
(210) Two top Sadrist commanders killed in 24 hours in Irak, PressTV, 7 février 2020.
(211) Sadr est très irrité par l’attention portée par Allawi dans la formation du gouvernement. Ira-t-il jusqu’à lâcher le Premier ministre ? Shafaaq News, 8 février 2020.
(212) Can Iraq’s new prime minister nominee navigate Baghdad’s political chaos ? New Atlanticist, by Atlantic Council, 3 février 2020.
(213) Iraq’s Shiite factions avoid direct engagement with Washington, al-Monitor, 6 février 2020.
(214) Sur la stratégie « zone grise » (= asymétrique) de l’Iran, voir l’analyse : Michael Eisenstadt, Operating in the Gray Zone, Policy Focus 162, Washington Institute for Near East Policy, Janvier 2020.
(215) D’autant que l’incident du boeing ukrainien a révélé les faiblesses de l’appareil de défense aérienne iranien : Can Kasapoglu, ANALYSIS - Iran real military capacity in context, Anadolu Agency, 7 février 2020.
(216) Sauf en cas de sursaut lié à l’exaspération devant les manœuvres pour écarter les modérés, How Iranian hard-liners helped Reformists ahead of elections, al-Monitor, 6 février 2020.
Michel Makinsky
Outre une carrière juridique de 30 ans dans l’industrie, Michel Makinsky est chercheur associé à l’Institut de Prospective et de Sécurité en Europe (IPSE), et à l’Institut d’Etudes de Géopolitique Appliquée (IEGA), collaborateur scientifique auprès de l’université de Liège (Belgique) et directeur général de la société AGEROMYS international (société de conseils sur l’Iran et le Moyen-Orient). Il conduit depuis plus de 20 ans des recherches sur l’Iran (politique, économie, stratégie) et sa région, après avoir étudié pendant 10 ans la stratégie soviétique. Il a publié de nombreux articles et études dans des revues françaises et étrangères. Il a dirigé deux ouvrages collectifs : « L’Iran et les Grands Acteurs Régionaux et Globaux », (L’Harmattan, 2012) et « L’Economie réelle de l’Iran » (L’Harmattan, 2014) et a rédigé des chapitres d’ouvrages collectifs sur l’Iran, la rente pétrolière, la politique française à l’égard de l’Iran, les entreprises et les sanctions. Membre du groupe d’experts sur le Moyen-Orient Gulf 2000 (Université de Columbia), il est consulté par les entreprises comme par les administrations françaises sur l’Iran et son environnement régional, les sanctions, les mécanismes d’échanges commerciaux et financiers avec l’Iran et sa région. Il intervient régulièrement dans les media écrits et audio visuels (L’Opinion, Le Figaro, la Tribune, France 24….).
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