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Dans la première moitié du XX eme siècle, les Etats-Unis restent à l’écart de la vie politique du monde arabe et mènent une politique isolationniste, laissant aux puissances traditionnelles, la France et la Grande-Bretagne, une position de force dans la région. L’industrie pétrolière va changer peu à peu la donne. Les Etats-Unis sont les premiers à exploiter l’énergie pétrolière au XIXe siècle, notamment à travers l’empire des Rockefeller et la Standard Oil, créée en 1870. Ils sont alors les principaux consommateurs et producteurs, essentiellement par l’exploitation des ressources de leur pays. Les Etats-Unis sont peu à peu concurrencés par l’arrivée sur le marché de jeunes compagnies européennes. Au lendemain de la Première Guerre mondiale, les Etats-Unis considèrent qu’il est dorénavant plus intéressant de préserver leurs réserves et d’importer le pétrole d’autres régions du globe. Ils commencent donc à s’intéresser au Moyen-Orient et se heurtent alors aux Britanniques qui étendent leur mainmise sur l’exploitation du pétrole dans cette région.
En effet, les compagnies britanniques ont obtenu des concessions sur une grande partie des gisements découverts dans la région. Elles ont pris conscience du potentiel de cette terre depuis la découverte de pétrole en Iran en 1908, par l’entrepreneur d’origine britannique William Knox d’Arcy (1849-1917) qui obtient du Shah une concession de 60 ans sur la quasi-totalité du territoire. Mais devant l’importance des coûts engendrés par son exploitation, il se lie au gouvernement britannique qui crée, en 1909, l’Anglo-Persian Oil Company.
Le précieux liquide est ensuite repéré à Kirkouk, dans le nord-est du territoire irakien. Les compagnies britanniques s’intéressent alors davantage à cette région prometteuse et arrivent, par l’intermédiaire de l’arménien Calouste Gulbenkian, à obtenir du sultan ottoman une concession exclusive dans l’ensemble de la région irakienne. La Turkish Oil Company est alors créée en associant l’Anglo-Persian à la Royal Dutch Shell et la Deutsche Bank. Avec la chute de l’Empire ottoman au lendemain de la Première Guerre mondiale, puis la mise en place d’un mandat britannique en Irak, la Grande-Bretagne jouit d’une situation privilégiée sur l’exploitation du pétrole au Moyen-Orient. Les Etats-Unis réclament alors leur part dans les exploitations en Irak et n’entendent pas laisser au Royaume-Uni la mainmise complète sur les richesses de la région. Le 31 juillet 1928, les deux principales compagnies américaines (la Standard Oil of New Jersey (Exxon) et Mobil) ainsi que la Compagnie française des pétroles entrent dans la Turkish Petroleum Company, qui devient alors l’Iraq Petroleum Company. Les Français et les Américains obtiennent ainsi chacun un quart de l’exploitation irakienne et les Anglais gardent le reste. De plus, dans cet esprit de régularisation de la concurrence, ces compagnies signent l’accord dit de la « ligne rouge » la même année acceptant de ne signer aucune concession sur les anciens territoires de l’Empire ottoman, à l’exception du Koweït, sans se consulter au préalable.
Le royaume d’Arabie saoudite naissant fait donc partie de la zone. Mais le roi Ibn Saoud ne se sent redevable envers aucune puissance occidentale et négocie les concessions à sa guise. Il se méfie beaucoup des Britanniques qui arment son grand ennemi et rival hachémite. De plus, il préfère s’allier à une puissance qui ne cherche pas, à travers l’exploitation du pétrole, à s’ingérer dans les affaires politiques du pays. Laisser les Etats-Unis prospecter sur ses terres lui semble plus avantageux, ces derniers offrant des propositions plus attrayantes. Ibn Saoud noue ainsi des contacts avec des compagnies américaines n’appartenant pas à l’accord de la « ligne rouge ». Quant à la Grande-Bretagne, elle ne croit pas en la richesse des sols saoudiens et ne montre pas un réel intérêt pour les projets d’exploration, considérant probablement comme suffisantes, du moins dans l’immédiat, les réserves iraniennes et irakiennes. Une prospection réalisée dans la région de Hasa en 1924, n’avait donné aucun résultat.
Les intérêts américains et saoudiens convergent donc dans les années 1930. En effet, Ibn Saoud, qui vient d’unifier et de créer le royaume d’Arabie saoudite en 1932, est à la recherche de fonds pour développer son pays et maintenir sa position. La loyauté des chefs des nombreuses tribus n’est possible qu’à travers de lourdes compensations financières. Ses revenus principaux venaient jusqu’à présent principalement des taxes du pèlerinage à La Mecque. Mais en cette période de crise financière, le nombre de pèlerins diminue fortement et les caisses du jeune Etat ne s’alimentent plus. Ibn Saoud se tourne alors vers les explorateurs américains qui cherchent des réserves de pétrole dans la région. Il espère, qu’en cas d’échec, ces forages lui permettront au moins de trouver de l’eau, nécessaire au développement du pays. Par ailleurs, les contacts se multiplient avec les compagnies américaines, encore plus intéressées par la péninsule arabique depuis que du pétrole a été découvert à Bahreïn en mai 1932. Le roi accorde finalement une concession sur toute la partie Est du pays à la Standard Oil of California (Socal) en 1933 pour 50 000 livres sterling-or. La Socal s’allie à la Texas Oil Company (Texaco) et prend plus d’importance. Une nappe de pétrole est finalement découverte le 4 mai 1938 à 1 441 mètres de profondeur à Dammam.
Pendant la Seconde Guerre mondiale, l’Arabie saoudite fournit aux Etats-Unis le pétrole nécessaire pour mener à bien les batailles du Moyen-Orient et de la Méditerranée. L’implantation américaine prend alors un autre visage : une base aérienne américaine est établie à Dharan dans l’Est du pays. A la suite de l’accord signé le 14 février 1945 par le président américain Roosevelt et le roi Ibn Saoud à bord du Quincy, le monopole d’exploitation de l’ensemble des gisements saoudiens est accordé aux Etats-Unis avec la création d’Aramco (Arabian American Oil Company) pour une période de 60 ans. Les Etats-Unis ont ainsi établi une base d’appui dans la région.
Bibliographie :
Agnès Chevallier, Le Pétrole, Paris, Editions La Découverte, 1986.
Rashid Khalidi, L’Empire aveuglé, Les Etats-Unis et le Moyen-Orient, Paris, Actes Sud, 2004.
Robert Lacey, Le Royaume, la grande aventure de l’Arabie Saoudite 1744-1982, Paris, Presses de la Renaissance, 1981.
Benoist Méchin, Le loup et le Léopard, Ibn Séoud ou la naissance d’un royaume, Paris, Editions Albin Michel, 1955.
David Rigoulet-Roze, Géopolitique de l’Arabie Saoudite, Paris, Armand Colin, 2005.
Lisa Romeo
Lisa Romeo est titulaire d’un Master 2 de l’université Paris IV-Sorbonne. Elle travaille sur la politique arabe française en 1956 vue par les pays arabes. Elle a vécu aux Emirats Arabes Unis.
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