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Docteur en sciences politiques, chercheur Moyen-Orient relations euro-arabes/ terrorisme et radicalisation, enseignant en relations internationales, collaborateur scientifique du REPI (Université Libre de Bruxelles) et de l’OMAN (UQAM Montréal).
Il y a régulièrement des accords de réconciliation entre le Fatah et le Hamas, deux frères ennemis. La division est historique entre les deux parties, et ce depuis des années, pour des motifs fondamentaux liés à leur raison même d’être. La rupture s’est accentuée après la prise de Gaza par Ismaël Haniyeh (juin 2007), l’ancien Premier ministre déchu, et le Hamas. Depuis, Gaza a vécu plusieurs guerres menées par Israël (2008/2009, 2012, 2014) pour affaiblir le mouvement. Le blocus israélo-égyptien du petit territoire retranché a aggravé la situation des Palestiniens, pendant que l’Autorité palestinienne continuait elle sa collaboration active en matière de "sécurité" en Cisjordanie. Régulièrement, il y a eu des rapprochements entre les deux, surtout lorsque le Hamas ne pouvait plus payer les fonctionnaires chargés d’assurer la sécurité. Ce qui était un outil de pression sur l’Autorité palestinienne. Plusieurs fois, Benjamin Netanyahou a tenté de se rapprocher du Hamas pour affaiblir l’Autorité, et vice versa. Quelle continuité de la politique israélienne ? Complexe à déterminer. Les préalables à la réconciliation et au financement du Hamas (qui a perdu depuis la chute du président égyptien Morsi un soutien financier de poids et a dû se retourner), étaient avant tout la remise des clés des ministères, mais aussi des points d’entrée de Gaza (en priorité Rafah) de la part du mouvement islamiste. Du côté du Hamas, le préalable était la tenue d’élections. Ce qui traîne depuis des mois. Du côté de Mahmoud Abbas, il devrait relâcher les restrictions financières contre le Hamas. Depuis quelques jours, on a assisté à l’ouverture du point de Rafah, ouvrant sur l’Egypte. Celui d’Erez donnant sur Israël est bien sûr une autre question plus que problématique.
Il fallait trouver un échéancier à toutes ces mesures. On est parti sur une base de deux mois. Les transferts de pouvoir de Gaza à l’Autorité palestinienne devraient se faire le 1er décembre mais on n’est pas à l’abri de vives tensions. Il est également prévu une visite de Mahmoud Abbas à Gaza, ce qui n’était pas arrivé depuis dix ans. Le Hamas a accepté que 3 000 policiers de l’Autorité soient déployés également sur son territoire. Tout n’était pas encore fixé dans le cadre de l’accord comme l’avenir de plus de 20 000 soldats armés du Fatah, et le processus de transfert de la sécurité de Gaza à l’Autorité dans un contexte où la pression d’Israël est déjà un casse-tête.
C’est un événement majeur et inédit depuis dix ans. L’objectif est toujours dans une perspective future d’envisager un Etat palestinien regroupant les deux territoires séparés par Israël. Il y a aussi à terme une vraie réflexion politique à mener sur la justice transitionnelle, après les crimes de guerre notamment commis par le Hamas à Gaza et la liquidation pendant les guerres, ni vu ni connu, d’un certain nombre de cadres de l’Autorité palestinienne. Tout cela se pensera par la suite, l’objectif premier étant l’apaisement et de faire croire au monde, que cette fois ci, les deux frères ennemis ne sont plus fâchés. Ce qui est une autre affaire….
L’Egypte a pour allié numéro un Israël, depuis 1978, avec des périodes de refroidissement, notamment lors de la victoire de Mohamed Morsi après la révolution, et la victoire des Frères musulmans. Si le Hamas respecte son engagement, abandonne toute volonté de déstabiliser et de tirer sur le sud d’Israël, si les deux parties parviennent à canaliser les autres mouvements islamistes plus radicaux et violents, l’Egypte pourrait décider avec l’accord, et uniquement avec l’accord de Tel Aviv, de relâcher le blocus, voire de le supprimer, afin de permettre aux deux millions de Gazaouis de revivre une vie normale, hors de la défiance, de l’économie de la débrouille, et de la volonté de vengeance.
Mathilde Rouxel
Suite à des études en philosophie et en histoire de l’art et archéologie, Mathilde Rouxel a obtenu un master en études cinématographiques, qu’elle a suivi à l’ENS de Lyon et à l’Université Saint-Joseph de Beyrouth, Liban.
Aujourd’hui doctorante en études cinématographiques à l’Université Paris 3 – Sorbonne Nouvelle sur le thème : « Femmes, identité et révoltes politiques : créer l’image (Liban, Egypte, Tunisie, 1953-2012) », elle s’intéresse aux enjeux politiques qui lient ces trois pays et à leur position face aux révoltes des peuples qui les entourent.
Mathilde Rouxel a été et est engagée dans plusieurs actions culturelles au Liban, parmi lesquelles le Festival International du Film de la Résistance Culturelle (CRIFFL), sous la direction de Jocelyne Saab. Elle est également l’une des premières à avoir travaillé en profondeur l’œuvre de Jocelyne Saab dans sa globalité.
Sébastien Boussois
Docteur en sciences politiques, chercheur Moyen-Orient relations euro-arabes/ terrorisme et radicalisation, enseignant en relations internationales, collaborateur scientifique du CECID (Université Libre de Bruxelles), de l’OMAN (UQAM Montréal), et de SAVE BELGIUM.
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