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Fin décembre 2018, Benyamin Netanyahou a dissout le Parlement israélien, entraînant l’organisation d’élections anticipées pour la mi-avril. Officiellement, le Premier ministre a pris cette décision « quand il a été clairement établi que la coalition au pouvoir ne pourrait pas faire adopter la loi pour inclure les Juifs ultra orthodoxes dans le service militaire » (1), mais officieusement, Benyamin Netanyahou, cerné par les affaires de corruption, souhaiterait renouveler son mandat comme chef du gouvernement et profiter d’un immunité politique, à l’heure ou la police israélienne a demandé son inculpation (2).
A l’approche des élections israéliennes, organisées le 9 avril prochain, les partis avaient jusqu’au jeudi 21 février pour s’enregistrer. Les alliances politiques passées à la dernière minute pourraient être déterminantes pour le cours des élections.
A quelques heures de la fermeture de la Knesset (Parlement israélien) aux représentants des partis politiques, le Likoud a scellé une nouvelle coalition. En tête des intentions de vote, le parti de Benyamin Netanyahou pourrait de nouveau l’emporter grâce à une alliance passée avec l’extrême droite et les partis religieux.
Point très controversé de cette coalition : la présence du parti Otzma Yehudit (Force juive). Cette formation politique aux propositions radicales, pourrait donc faire son entrée au Parlement (3). Le Premier ministre Netanyahou a en effet promis deux portefeuilles ministériels (Éducation et Logement) au parti Habayit Hayehudi (Foyer juif) s’il acceptait de s’allier avec Force juive. Dans un communiqué, le Foyer juif, qui décrit cet accord comme uniquement technique, a annoncé avoir accepté cette condition pour « empêcher la formation d’un gouvernement de gauche » (4) en Israël.
L’alliance avec ce parti majoritairement considéré comme raciste est très critiqué à gauche (5), mais aussi par une partie de la droite israélienne. Force juive comprend des disciples de Meir Kahane, un rabbin et homme politique israélo-américain prônant le déplacement forcé des Arabes israéliens et des Palestiniens vers les pays arabes voisins et l’annexion des Territoires palestiniens. Assassiné à New York en 1990 par un nationaliste égyptien, il avait mené son parti, Kach, jusqu’au Parlement israélien en 1984, avant que celui ne soit interdit en 1988 en raison de ses positions xénophobes. Parmi les propositions de loi qu’il avait formulées à la Knesset, on retrouve l’expulsion des non-juifs de Jérusalem et l’interdiction des contacts entre juifs et Arabes (6). En 1994, l’un de ses disciples avait tué 29 Palestiniens à Hébron (7). A l’heure actuelle, Force juive comprend dans ses rangs le controversé Baruch Marzel, habitant de la colonie d’Hébron et ancien assistant de Meir Kahane (8).
Jusqu’à ce mercredi, Benyamin Netanyahou restait en tête des sondages. Cependant, l’alliance passée à la dernière minute entre son grand rival, Benny Gantz, et le leader centriste Yair Lapid pourrait changer la donne.
Après plusieurs jours de tractations difficiles, le leader de Hosen L’Yisrael (Fr : « La résilience d’Israël »), Benny Gantz, et le chef de Yesh Atid (Fr : « Il y a un futur »), Yair Lapid, ont trouvé un accord en vue des élections d’avril, en se réunissant autour de la formation politique nommée « Bleu et blanc ».
L’accord, qui fait suite à une véritable bataille des égos entre les deux hommes politiques, prévoit que Benny Gantz serait Premier ministre pendant les deux premières années et demi, et Yair Lapid le deviendrait après cette période, s’ils forment de nouveau un gouvernement (9). Les deux leaders politiques ont également réussit à intégrer Gabi Ashkenazi, ancien chef d’état major de l’armée israélienne (2007-2011), dans la formation politique, ainsi que Moshe Ya’alon, ancien Ministre de la Défense dans le gouvernement Netanyahou (2013-2016). Ce dernier avait annoncé la création d’un parti au début de la campagne, mais avait finalement rejoint Benny Gantz.
Durant le mandat de Benny Gantz comme Premier ministre, Yair Lapid obtiendrait les portefeuilles de Ministre des Affaires étrangères et de Ministre de la Défense.
Cette alliance met en jeu le maintien de Benyamin Netanyahou comme Premier ministre. D’autant plus qu’elle comprend d’anciens hauts gradés de l’armée israélienne, un atout indéniable pour attirer les votes des Israéliens. Dans les récents sondages publiés en février, le Likoud obtiendrait 30 sièges, au coude à coude avec l’alliance « bleu et blanc », car Hosen L’Yisrael obtiendrait 18 sièges et Yesh Atid 12.
Suite à l’annonce de la nouvelle alliance au centre et centre-gauche, le leader du Likoud a annulé son voyage en Russie. Il devait y rencontrer le Président Vladimir Poutine, principalement pour discuter de la présence de l’Iran et du Hezbollah dans la Syrie voisine.
Le Premier ministre craint en effet que Benny Gantz et Yair Lapid n’attirent les électeurs du centre-droit. Le dernier communiqué du Likoud montre que le Premier ministre souhaite identifier la formation « Bleu et blanc » comme une coalition de gauche, afin de stopper une éventuelle fuite de ses électeurs : « Le choix est clair, c’est soit un gouvernement de gauche mené par Lapid et Gantz, et soutenu par le bloc des partis arabes, soit un gouvernement de droite mené par Netanyahou » (10).
Plus à gauche, le Parti travailliste, qui constitue pourtant historiquement l’un des deux grands partis d’Israël avec le Likoud, continue sa descente dans les sondages. Ce jeudi 21 février, son leader, Avi Gabbay, a annoncé qu’aucune alliance avec le parti d’extrême-gauche Meretz n’aurait lieu. Un peu plus tôt, la chef du parti Meretz, Tamar Zandberg, avait appelé les Travaillistes à créer une coalition de gauche après l’annonce de l’alliance Gantz-Lapid, et pour faire barrage à la coalition « kahaniste » de Benyamin Netanyahou (11). Un appel qui n’a pas reçu de réponse favorable du côté travailliste.
Jeudi 21 février, le parti judéo-arabe Hadash (communiste) a trouvé un compromis avec la liste arabe unie-Ta’al de Ahmad Tibi (Porte-Parole de la Knesset et Ancien conseiller de Yasser Arafat), quelques heures avant la fermeture des enregistrements des partis à la Knesset.
En janvier, Ahmed Tibi avait mis un point d’arrêt à la coalition de la Liste unifiée, une liste réunissant des partis arabes israéliens, en affirmant que son parti (Ta’al) allait se lancer seul dans les élections. La Liste unifiée s’était formée dans le cadre des élections de 2015, elle avait obtenu 13 sièges sur 120 au Parlement israélien (12).
Ra’am (parti arabe nationaliste et islamiste) et Balad (parti nationaliste arabe), de leur côté, sont parvenus à un accord pour former une autre alliance.
La coalition Hadash-Ta’al pourrait remporter 10 sièges, devenant ainsi la troisième formation politique d’Israël, alors que la formation Ra’am-Balad en emporterait 4, selon les derniers sondages.
Notes :
Ines Gil
Ines Gil est Journaliste freelance basée à Beyrouth, Liban.
Elle a auparavant travaillé comme Journaliste pendant deux ans en Israël et dans les territoires palestiniens.
Diplômée d’un Master 2 Journalisme et enjeux internationaux, à Sciences Po Aix et à l’EJCAM, elle a effectué 6 mois de stage à LCI.
Auparavant, elle a travaillé en Irak comme Journaliste et a réalisé un Master en Relations Internationales à l’Université Saint-Joseph (Beyrouth, Liban).
Elle a également réalisé un stage auprès d’Amnesty International, à Tel Aviv, durant 6 mois et a été Déléguée adjointe Moyen-Orient et Afrique du Nord à l’Institut Open Diplomacy de 2015 à 2016.
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