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L’Aliya, au pluriel Aliyot, signifie en Hébreu la « montée », l’ascension des Juifs en Palestine. Chassés par les Romains en 135 après J.C avec l’écrasement de la révolte de Bar Kokhba, le peuple juif entretient l’espoir d’un retour en Terre sainte. A la fin du XIXème siècle, alors que l’on comptait environ 10 000 Juifs en Palestine en 1835, l’idée d’un retour en Palestine prend une tournure plus politique avec l’affirmation du sionisme. Des vagues d’immigrations vont alors s’organiser pendant près d’un siècle et concrétiser le rêve sioniste d’offrir aux Juifs du monde entier un Etat. Chaque aliya correspond à une vague d’immigration déclenchée généralement par un événement local ou régional précis dans une période donnée.
Confinée dans des Ghetto, la majorité des communautés juives européennes souffre de difficultés d’assimilation dans des sociétés souvent nourries d’antisémitisme. Il devient alors évident pour certains penseurs tels que Leo Pinsker (1821-1891), qui forme l’association les Amants de Sion, ou Theodor Herzl (1860-1904), considéré comme le père du sionisme, que l’avenir du peuple juif réside dans la formation d’un Etat juif en Palestine. Cet Etat juif devra alors permettre le « rassemblement » des exilés, dispersés dans le monde entier.
La première aliya remonte aux années 1881-1903 après l’assassinat du tsar russe Alexandre II en 1881. Accusés d’en être les principaux responsables, les Juifs vont alors connaître une importante vague de pogroms. Face à cette situation, nombreux sont ceux qui vont choisir d’immigrer vers les Etats-Unis, l’Europe occidentale et la Palestine. Le départ vers la Palestine est encouragé par les Amants de Sion qui vont apporter aux nouveaux arrivants une aide financière et logistique afin de former des entreprises agricoles. Leur implantation est également soutenue par le baron Edmond de Rothschild qui va financer de nombreux projets et permettre le rachat de terre. Environ 30 000 Juifs russes, roumains et polonais s’installent alors en Palestine. Mais la maladie et le manque de moyens limitent fortement cette implantation, et le mouvement reste limité.
Une seconde vague d’immigration s’organise entre 1904-1914 avec l’arrivée d’Europe orientale de nombreux Juifs marqués notamment par les idées socialistes. Ils encouragent alors l’emploi de main d’œuvre juive, et non plus arabe, dans les exploitations agricoles et les premiers systèmes d’exploitation collectifs, les kibboutzim se mettent en place à partir de 1911. En 1914, la population juive est de 80 000 en Palestine.
La déclaration Balfour de 1917 va peu à peu accélérer l’immigration en Palestine. La reconnaissance d’un Foyer juif par la Grande-Bretagne en Palestine encourage fortement les populations juives à s’y rendre durant l’entre-deux-guerres. Des jeunes militants de gauche, pour la plupart, arrivent alors dans la région et cherchent à développer les structures politiques et sociales de la communauté. Mais le manque de capitaux se fait cependant ressentir et des affrontements avec les populations arabes éclatent. Certains préfèrent alors quitter la région. Une quatrième aliya entre 1924 et 1929 s’organise cependant suite aux difficultés économiques que connaît la Pologne.
En Allemagne, l’arrivée au pouvoir de Hitler dans les années 1930 a pour conséquence la venue en Palestine de 30 000 Juifs par an entre 1932 et 1939. Cette immigration est alors facilitée par une convention signée entre Berlin et l’organisation sioniste en 1933 qui autorise l’exportation des capitaux juifs allemands. Généralement issues de la bourgeoisie et des classes moyennes allemandes, autrichiennes et hongroises, les familles des nouveaux arrivants éprouvent des difficultés à s’adapter aux exigences de cette nouvelle terre, préférant la vie citadine aux travaux agricoles. En 1939, les Juifs représentent 28% de la population palestinienne (soit 429 605) et ce nombre augmente tout au long de la guerre, de manière souvent clandestine suite aux restrictions mises en place par l’administration mandataire britannique.
L’enthousiasme qui accompagne l’annonce de la création de l’Etat d’Israël, le 14 mai 1948, auprès des Juifs du monde entier se double d’une vague d’immigration massive. On compte en 1948 650 000 juifs dans le nouvel Etat. Entre 1948 et 1951, la population est doublée, passant à 1 400 000 habitants. Les nouveaux résidents proviennent surtout d’Europe centrale et orientale. De nombreux survivants de la Shoah sont alors accueillis. Par ailleurs, au fur et à mesure que le conflit israélo-arabe s’intensifie, de nombreux Juifs du Maghreb et du Moyen-Orient quittent leur pays d’origine pour se rendre en Palestine. La loi du Retour voté en juillet 1950 par la Knesset, l’Assemblée législative israélienne, ouvre l’Etat d’Israël à tous les Juifs de la diaspora afin de favoriser le « rassemblement des exilés ». Les sionistes considèrent alors qu’il existe un lien particulier entre les Juifs dispersés dans le monde et l’Etat d’Israël. Pendant les trente années qui vont suivre la naissance de l’Etat hébreu, des vagues d’immigrants vont arriver d’Asie et d’Afrique et notamment dans les années 1980-1990 en provenance d’Ethiopie. Les aliyot des Juifs occidentaux et notamment françaises prennent quant à elles plus d’ampleur dans les années 1990.
Israël a par ailleurs œuvré pour faciliter la venue des Juifs d’URSS dans les années 1980. Tout au long des années 1990, avec l’effondrement de l’Union soviétique, 900 000 personnes s’installent en Israël.
L’arrivée constante de nouveaux citoyens, avec des passés et des origines très divers, fait d’Israël un Etat particulièrement pluriculturel. Leur intégration dans la société israélienne constitue alors un défi mais les dirigeants israéliens continuent à tout mettre en œuvre pour favoriser l’aliya.
Bibliographie :
André Chouraqui, L’Etat d’Israël, Paris, Presses Universitaires de France, 1998.
Alain Gresh, Dominique Vidal, Les 100 clés du Proche-Orient, Paris, Hachette Littératures, 2006.
Anne Grynberg, Vers la terre d’Israël, Paris, Gallimard, 1998.
Alain Michel, Racines d’Israël, 1948 : plongée dans 3 000 ans d’histoire, Paris, Editions Autrement, 2003.
Lisa Romeo
Lisa Romeo est titulaire d’un Master 2 de l’université Paris IV-Sorbonne. Elle travaille sur la politique arabe française en 1956 vue par les pays arabes. Elle a vécu aux Emirats Arabes Unis.
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